Le feu sur la terre ?

20ème dimanche ordinaire

 

Jérémie 38, 4-10 ; Hébreux 12, 1-4 ; Luc 12, 49-53

 

« 

Je suis venu apporter le feu sur la terre… comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ! ». Parole énigmatique de Jésus, car notre premier réflexe est de penser à la guerre, à la violence. J’apporte la division laisse encore entendre Jésus. Cet évangile est une succession de phrases, de ‘sentences’. Comment entendre et accepter de telles affirmations ?

 

En précisant ‘division au sein même d’une famille’, l’évangile ouvre déjà une piste de compréhension. On peut en effet penser au scandale provoqué par Jésus quand il commente Isaïe dans la synagogue de Nazareth. Nous pouvons aussi nous souvenir de telle autre parole d’évangile qui laisse supposer division et mésentente dans la famille à cause de Jésus : "qui sont ma mère, mes frères, mes sœurs ? Ceux qui entendent et font la volonté de celui qui m’a envoyé" (Luc 8, 19-20). On peut continuer la réflexion en faisant mémoire de la Parole et des actes de Jésus à l’égard des vendeurs du Temple, les associés du culte du Très-Haut : "De la maison de mon Père, vous avez fait un repère de brigands, et l’on voit alors le Christ saisir un fouet et, dans un geste inhabituel, frapper et chasser. On a vite fait d’atténuer la violence en affirmant que Jésus n’a frappé que les moutons ! Voire. N’y aurait-il pas à faire même action aujourd’hui pour certaines boutiques religieuses pas très catholiques où le Père et son Fils sont relégués au rang d’accessoires ou, pire encore, complètement oubliés.

 

Il n’est pas difficile de comprendre qu’au temps de Jésus et des premiers chrétiens, il y ait eu au sein des familles des divisions, oppositions et même dénonciations contre ceux qui suivaient Jésus. De l’apôtre Paul on dit que, dans sa jeunesse il fut un zélé pourfendeur de chrétiens qu’il agissait « sur commission rogatoire » suite à des plaintes et dénonciations.

 

Lorsque le Christ parle, il pouvait bien penser à ce qu’on disait de lui dans les chaumières. Plus tard, Luc rédigeant les Actes des Apôtres avait sous les yeux la guerre (ouverte ou larvée) entre Paul et ses adversaires au sein même des synagogues. Il connaissait les premières persécutions de Néron ou Vespasien qui avaient déjà fait de nombreuses victimes chrétiennes.

 

Dans l’Apocalypse, Jean reprochera à plusieurs communautés chrétiennes d’être des tièdes, d’avoir prêché des paroles lénifiantes et non des paroles de feu. C’est de ce feu-là, source de divisions issues du refus des compromis, que Jean voulait parler.

 

Aujourd’hui encore, l’Eglise est divisée et les paroles de Mgr Ricard invitant à la charité fraternelle sont évocatrices des divisions réelles et profondes et des blessures ouvertes entre les tenants de l’Ordre dans le Temple et les ouvriers qui veulent semer à tous vents, dans les terres arides et les chemins rocailleux du monde d’aujourd’hui. Cette guerre-là, cette division-là continue. Pour semer avec le Christ, il ne faut pas regarder en arrière. Pour interpréter les paroles de l'évangile, il faut avoir en ligne de mire la mission d’annonce et de témoignage, où nous mettons nos pas à la suite du Christ, sur les chemins de l’humanité, d’hier pour Lui, d’aujourd’hui, pour nous.