Un chat est un chat !

Edito Eglise d'Arras n° 20-2013

arche de Noe Genèse arche de Noe Genèse   Qui ne connait l’expression un chat est un chat ? On pourrait poursuivre cette forme de rhétorique par un chien est un chien et un singe est un singe. Il est rarement décent d’envoyer à la figure de quelqu’un des noms d’oiseau, encore moins des noms de quadrupède inférieur.

 

Il y a fort longtemps on s’est gaussé (et parmi eux, il y avait des croyants) à l’idée que l’homme descende du singe... et le singe de l’arbre : manière de ridiculiser les théories de Darwin sur l’évolution des espèces. Ces théories étaient fondées sur l’expérience et l’observation bien plus fouillées que celles des créationnistes, variété de républicains américains qui s’en tiennent à une lecture fondamentaliste des Saintes Ecritures.


Dans l’imagerie animalière je n’ai pas su où placer le rat et ses dérivés : rat, raton, ratonnades. Les français sont fiers d’être descendants des gaulois dont l’emblème est le coq… sans préciser sur quoi il pose ses pattes ! Il se fait que ce dossier n° 20 d’Eglise d’Arras rapporte succinctement les conférences de François Euvé et Robin Sautter sur Ecologie et création. Ils invitent à tenir compte de l’histoire des idées pour comprendre comment, d’hier à aujourd’hui, la compréhension du monde et le rapport à la nature ont grandi.
 

Je n’ose pousser plus en avant les métaphores évoquées ci-dessus. Il se fait que cet édito est écrit mi-novembre, pendant la journée de la gentillesse, à croire que cette vertu ne soit pas la mieux partagées chez les français. Au lendemain des célébrations du 11 novembre qu’il soit encore toléré que l’on demande si le sang des tirailleurs sénégalais morts au champ d’honneur était aussi rouge que celui de français de pure ( ?) souche.

 

Voici le temps de l’Avent. Faut-il rappeler que géographiquement et généalogiquement parlant, Jésus était un asiatique ? C’est pourtant en lui que plus d’un milliards d’humains ont mis leur foi. Il y a fort longtemps, saint Paul avait écrit que désormais il n’y avait plus ni juifs, ni grec, ni homme ni femme, ni esclave ni homme libre (Galates 3,28), parce que tous, nous avons été baptisés en Jésus-Christ. Faut-il relire le prologue de l’Evangile selon Jean qui, lui aussi, affirme que la Parole de Dieu s’est faite chair et qu’il donne à tous ceux (et celles) qui le reçoivent de devenir enfants de Dieu.

 

Qu’il nous soit permis de prier pour que les paroles de Jésus soient entendues et que nous-mêmes devenions les témoins actifs de l’affirmation que Christ est le sauveur du monde, sans exception aucune (Jean 4, 42). Sans doute y a-t-il dans le troupeau quelques brebis égarées qui n’ont pas entendu ou voulu entendre les paroles du Christ. Il n’y a pas que les paroles, il y a aussi les gestes que le Christ a partagés avec l’exclu, le pauvre, l’humilié, le publicain, bref avec nombre de catégories sociales rejetées alors par les autorités religieuses de son temps. Suivre le Christ, c’est mettre nos pas sur le même chemin qui fut le sien. Raison de plus pour relire ce qui est dit de Lui dans les Evangiles, comme le demandent les diocèses: lire avec attention et non superficiellement l’ensemble des textes qui parlent de Lui.

 

Nous ne sommes donc pas dans l’ordre de la morale ou du politiquement correct, mais bien dans l’ordre de la foi. Peut-on se dire disciples de Jésus-Christ et prêcher la haine de l’autre différent ? Des philosophes comme Levinas ont insisté sur l’autre différent, mais il n’était pas thomiste. Faut-il le désavouer au nom du serment antimoderniste? Beaucoup de chrétiens ont été éduqués dans "la philosophie du même" ; cela explique que la rencontre de l’autre différent devienne insupportable : tel est le fruit de certaines éducations. Nous ne sommes pas responsables de ce que nous avons reçu, mais nous sommes responsables de ce que nous transmettons.
Abbé Emile Hennart