Il vient !

Edito de Mgr Leborgne - Eglise d'Arras n°11 - 2021

messe-installation-mgr-leborgne messe-installation-mgr-leborgne  Il vient !

 

Nous venons d’entrer en Avent, désirant nous disposer à Celui qui est venu dans la chair et qui reviendra dans la Gloire.

Nous l’avons fait en nous laissant déplacer par la nouvelle traduction du missel romain. Une langue est par nature vivante. L’original du missel de la messe dite de Paul VI, fruit du Concile Vatican II, est en latin. Après plus de 50 ans, il était nécessaire, pour demeurer fidèle à l’intention initiale, de reconsidérer certains éléments de la traduction.

 

Pour certains, cela passe un peu inaperçu. Pour d’autres cela est étonnant, telle formule déstabilise ou encourage, c’est selon. Je crois qu’il y a là une grâce profonde : le déplacement opéré oblige à nous renouveler dans la manière de célébrer, à être attentifs aux détails pour être disponibles à l’essentiel, et ainsi peut-être, renaître à l’inouï de ce que nous célébrons à chaque eucharistie.

 

C’est aussi avec le rapport de la Ciase et les décisions prises par les évêques lors de leur assemblée plénière vécue à Lourdes début novembre que nous entrons en Avent. Le choc est évidemment bien plus violent qu’une nouvelle traduction du missel. Pourtant, il y a aussi des éléments décisifs pour nous préparer à Celui qui vient.

Parce que l’Église des abus est une Église qui ne s’est pas laissé déplacer, qui s’est enfermée dans des habitudes jusqu’à justifier de ne pas entendre les personnes victimes et couvrir trop souvent les agresseurs. Le drame révélé dans son ampleur par la Ciase est un cri. Celui des personnes victimes dont la parole demande à être vraiment accueillie et reconnue, jusque dans la reconnaissance de la responsabilité institutionnelle et l’engagement dans un processus de justice restaurative. Celui de l’ensemble des baptisés qui veut prendre toutes les mesures nécessaires pour ne plus permettre ce « système » qui, quand bien même il n’aurait pas été voulu comme tel, a opéré. Celui du Seigneur qui veut que son Église se laisse renouveler en redevenant ce qu’elle est, l’Église qui témoigne de l’Évangile et dispense la vie de Dieu, une Église missionnaire, rayonnante de la joie du salut.

 

Ainsi, de dépouillement en dépouillement, il ne faut pas craindre le processus de vérité qui doit aller à son terme, ni de la nudité dans laquelle l’Église pourrait se retrouver. Il y a là un travail indispensable dans lequel la grâce se fraie un chemin. Cela nous déplace — et je demande au Seigneur qu’il n’y ait aucun indifférent, que tous soient déplacés —, cela nous déstabilise, cela peut nous entraîner sur des chemins vertigineux et nous faire perdre l’équilibre.

Nous sommes dépossédés et désappropriés. C’est une bonne nouvelle. C’est ainsi et ainsi seulement que nous saurons tous ensemble (non pas dans un « vous » dont on se tiendrait à distance, mais bien dans le « nous ecclésial » que nous sommes appelés à devenir), synodalement, prendre les mesures nécessaires, vivre évangéliquement l’Église et rendre les rênes au Seigneur. Ce qui alors surgira nous réjouira.

 

Nous voilà convoqués à entrer dans la pauvreté de la crèche pour accueillir Celui qui vient.

 

Bon Avent !

 

+ Olivier Leborgne,

Évêque d’Arras, Boulogne et Saint-Omer