De la Corne de l’Afrique à la Côte d’Opale

 

Norent-Fontes Norent-Fontes  Nous voyons au bord de nos routes et sur nos plages  leurs silhouettes longilignes et leurs visages aux traits fins. Ces africains cherchent à rejoindre en nombre le Royaume-Uni et sont pour partie des chrétiens orientaux qui cherchent à fuir leur pays, l’Ethiopie. Pourquoi ?

 

La religion chrétienne est arrivée en Ethiopie au IVème siècle  qui a été  évangélisée en profondeur durant le Vème siècle. L’église d’Ethiopie suit l’Eglise copte d’Égypte dans la séparation avec Rome après le concile de Chalcédoine en 451. Longtemps sous tutelle du patriarcat d’Alexandrie, elle devient indépendante en 1962. L’église catholique comprend aujourd’hui 900.000 fidèles et l’église orthodoxe  plus de 35 millions de fidèles sur une population totale de 115 millions d’habitants dans l’État fédéral  que constitue l’Ethiopie.

 

Ce pays est en guerre depuis plus d’un an. Elle a éclaté en novembre 2020 dans la province du Tigré située au nord du pays. Elle oppose à titre principal les forces gouvernementales d’Addis-Abeba et le front de libération du Tigré (TPLF selon le sigle anglais). Le premier ministre actuel, Abiy Ahmed, et les responsables du TPLF n’ont pas toujours été ennemis car ils l’ont porté au pouvoir en 2018, étant majoritaires dans la coalition gouvernementale. Mais un an plus tard, le premier ministre a choisi de dissoudre la coalition gouvernementale pour affirmer son pouvoir sur le pays et créer à cet effet un nouveau parti le »Prosperity party » que le TPLF a refusé de rejoindre. L’une des principales causes de la guerre civile  a été le report des élections législatives prévues en septembre 2020, le gouvernement fédéral prétextant les risques liés à la pandémie du COVID 19. Suite à ce report, le TPLF  a défié le gouvernement fédéral pour organiser son propre scrutin régional au Tigré. Dans les semaines qui ont suivi, le TPLF a organisé des attaques contre plusieurs bases militaires fédérales qui lui ont permis d’acquérir des armes en grande quantité et de constituer les forces de défense du Tigré (TDF). Peu après, en novembre 2020, le gouvernement fédéral a lancé une offensive pour reprendre le contrôle de cette province et mettre au pas le TPLF.

 

Elle a permis aux forces fédérales de reprendre le contrôle de MEKELE en juin 2021, la capitale du Tigré, mais les combats se sont poursuivis dans le reste de la province et dans les provinces voisines, les TDF s’étant alliées avec une autre organisation ethno-régionale, l’armée de libération Oromo (OLA).Le gouvernement fédéral a alors proclamé l’état d’urgence sur l’ensemble du territoire éthiopien. En septembre 2021, un rapport de l’ONU faisait état de massacres, de violences sexuelles, de tortures commis par tous les belligérants, le gouvernement fédéral cherchant de surcroît à affamer les provinces rebelles. On comprend donc que les populations locales cherchent à fuir le pays  le plus souvent en transitant par la Libye pour rejoindre l’Europe par l’intermédiaire d’organisations de passeurs qui maltraitent et exploitent ces migrants. A travers cette situation dramatique, nous sommes conviés à une prise de conscience, comme nous y invitait le Pape François lors de son séjour à Chypre voilà quelques semaines. Que le Seigneur réveille la conscience de nous tous ! Nous ne pouvons pas nous taire et regarder ailleurs!», a exhorté François. «La migration forcée n’est pas une habitude touristique», a martelé le Pape, dénonçant une nouvelle fois notre indifférence et nous invitant à poser un autre regard notamment sur nos frères Ethiopiens qui cheminent sur nos routes et nos plages en espérant rejoindre le Royaume-Uni dont beaucoup  parlent la langue.

 

 

Jacques DORÉMIEUX

 Délégué diocésain de l’Œuvre d’Orient