Sur le chemin d'Emmaüs

De la désillusion à la reconnaissance

Le jour de Pâques, de nombreux textes d'Evangile de la Résurrection  sont proposés. Le dimanche soir est repris Luc 24: les disciples d'Emmaüs.  A chaque eucharistie, nous parcourrons le même chemin de reconnaissance.  

 

Lever de soleil près de la Mer Morte Lever de soleil près de la Mer Morte  En maison d’Evangile, avec Marc (ch.8-10) puis avec Luc (ch. 9-19), les participants ont pu découvrir qu’il se passait bien des choses sur le chemin. Ce chemin, que nous considérons en occidentaux sous son aspect physique “vers Jérusalem”, ou "à partir de Jérusalem" revêt une forte dimension symbolique : chemin et cheminement; de l’un à l’autre il n’y a qu’un pas.

 

Ne parle-ton pas de cheminement pour les catéchumènes comme pour bien des groupes apostoliques où, chemin faisant dans la proximité et le souci du frère, la vie devient comme une longue marche à la recherche et à la rencontre de Jésus, le Christ, le Vivant. La route d’Emmaüs est l’expression d’un cheminement des disciples, du doute vers la rencontre du Ressuscité ; Il était là et nous ne le savions pas !

 

Sur les routes de Palestine, les disciples ont peu à peu deviné qui était Jésus, de quel amour il était animé, pour son père et pour ses frères. En Luc, c’est en chemin que Jésus distille la plupart des paraboles, avant la Pâque et après la Pâque. Il fait découvrir le visage de son Père, Père de miséricorde, et il prodigue des conseils aux disciples qui répondent à l’invitation à le suivre. Marc insiste davantage sur le “suivre Jésus”. Pour Luc c’est davantage la découverte de qui est Dieu, qui est Jésus. Ainsi en est-il sur le chemin, au dernier chapitre de Luc. Cela se passe entre Jérusalem et Emmaüs. Là encore nous discutaillons pour savoir combien il y avait de kilomètres de l’une à l’autre ville. Ce faisant, nos yeux d’occidentaux du XXIème siècle ont bien du mal à percevoir le chemin/cheminement parcouru par les disciples pour oser dire et proclamer que ce Jésus, leur ami, condamné comme blasphémateur et hors-la-Loi est en fait l’héritier de toute la Loi, celui qui Dieu nous a envoyé pour nous réconcilier avec Lui…


Les deux disciples cheminent dans la désillusion vers Emmaüs. Ils sont amenés à parcourir les Ecritures en même temps qu’ils parcourent leur “histoire-avec-Jésus”. Avec l’image de deux hommes en chemin, guidés par un troisième, Luc fait une description symbolique des premières communautés de croyants qui ont eu besoin de relire les Ecritures pour oser affronter ceux qui niaient que le Christ soit l’envoyé de Dieu. Nous avons peut-être souvenir de l’argumentation d’Etienne avant sa mort, nous nous rappelons les débats et combats, à coup d’arguments d’Ecriture, de Paul contre les chrétiens qu’il poursuivait… Nous sommes parfois étonnés du nombre de références d’Ecriture dans chacun des évangiles…, tout cela porte la trace de nombreuses années de méditation sur Jésus, Fils des Ecritures.


Pour oser affirmer devant le grand Tribunal et la foule des juifs que “ce Jésus que vous avez condamné, Dieu l’a ressuscité, nous en sommes témoins !”, il a fallu du temps, un certain temps, au moins quarante jours et un peu plus, disent les Actes des apôtres. Ceux qui fréquentent les Ecritures savent bien que ce chiffre symbolique exprime une certaine durée, nécessaire pour aller à la rencontre de Dieu, pour entrer en alliance avec Lui. Moïse, Elie, Jésus au désert ont vécu cette durée et rencontré le visage de Dieu avant de le proclamer à la face des peuples ; de même les premières communautés de disciples.

 

Ta Parole entre nos mains Les 24 heures de l'Evangile  
Ta Parole entre nos mains
Ta Parole entre nos mains
En feuilletant l’Evangile,
lisant et écoutant en maison d’Evangile ou ailleurs les Ecritures, c’est comme une nourriture que nous recevons. La distance entre Jérusalem et Emmaüs n’a guère d’importance, ni le temps pour parcourir ce chemin : il leur a fallu du temps pour cheminer dans la foi. Il nous faut aussi du temps sur notre chemin avec d’autres, pour devenir croyants. Après avoir reconnu Jésus proche de nous, tout commence ! Il nous faut nous relever pour l’annoncer à d’autres. Aux disciples qui voulaient s’installer dans leurs commodités Jésus avait signalé : “aux autres villages aussi il faut que j’annonce la Bonne Nouvelle. C’est pour cela que je suis venu”. (Luc 4,43). C’est à cela que nous sommes appelés… le chemin d’Emmaüs n’a pas de fin.


Abbé Emile Hennart