Fiche 05 Actes 13-15 Maisons d'Evangile

Actes Paul et Barnabé en Asie mineure. L’Assemblée de Jérusalem.

Nous voici à Antioche, ville déjà signalée au ch. 11. Antioche de Syrie est la troisième ville de l’empire romain, après Rome et Alexandrie. C’est d’abord une importante ville administrative au carrefour de routes d’Ouest en Est et du Nord au Sud. Il y avait là une forte communauté juive de la diaspora. Chez elle, a retenti la Parole de l’Evangile, grâce à des pèlerins et des visiteurs hellénistes (Actes 11, 19-21). La communauté est suffisamment importante et se développe chez les païens au point qu’on a envoyé Barnabé, homme de confiance ; il est allé chercher Saul à Tarse. Luc ne manque pas de rappeler que l’Esprit trouve à Antioche un terreau fertile pour l’envoi en mission.

 

Lecture d’ensemble

La section correspond au premier voyage missionnaire de Paul. Nous connaissons sans doute l’un ou l’autre épisode. C’est ici l’occasion de découvrir l’ampleur des passages et des obstacles que l’Eglise est amenée à franchir pour que progresse la Parole. En résumé : envoi pour la mission ; rencontre avec des non-Juifs et autres cultures ; affrontement avec un magicien, désaccord avec un compagnon, incompréhension totale des habitants de Lystre, efforts théologiques pour se faire comprendre ; conflits, crises et gestion de crises à l’intérieur des communautés. Puisse cette lecture nous rendre plus familiers de l’Ecriture et des témoins dont nous sommes les héritiers, appelés à poursuivre leur œuvre.
 
Vocation et envoi en mission (Actes 13,1-4). Ce n’est pas une affaire personnelle entre Dieu et un individu. La communauté d’Antioche prie, impose les mains et envoie en mission au souffle de l’Esprit. Cela serait à méditer dans les communautés d’aujourd’hui au moment où le diocèse présente son projet de catéchèse : comment les communautés et les EAP vont-elles interpeller untel et untel pour le service de l’annonce au-delà de la communauté déjà rassemblée ?
 
De synagogue en synagogue. A première vue, rien de bien extraordinaire. Partis pour évangéliser le monde, Paul et Barnabé s’adressent en priorité aux Juifs, dans les synagogues. Il était de coutume, en monde juif, de se retrouver à la synagogue, lieu d’hospitalité de la communauté. Outre la lecture des Ecritures, on y écoutait les nouvelles venues d’ailleurs et y hébergeait les voyageurs. Ainsi en est-il pour Paul. Et si sa parole sur Jésus est assez bien accueillie dans un premier temps, très vite naît une opposition, une opposition structurée qui va jusqu’à envoyer des commandos pour suivre Paul (14, 19). C’est à l’issue d’un conflit à la porte de la synagogue d’Antioche de Pisidie que nous trouvons la phrase résumant l’évolution dans la mission : “Puisque vous la repoussez (la Parole de Dieu) et que vous vous jugez indignes de la vie éternelle, alors nous nous tournons vers les païens” (13, 46). Phrase révélatrice du passage qu’il a fallu accomplir et dont on trouvera écho à la fin des Actes 28,28 : “Sachez-le donc, c’est aux païens qu’a été envoyé ce salut de Dieu, eux, ils écouteront !
 
1er et second de cordée ; changement de nom.
Le premier de cordée, c’est Barnabé et son second, Saul. Le moment où Paul change de nom est significatif : c’est lors de sa première rencontre “officielle” avec le monde romain, avec le proconsul de Chypre. Plus tard, Paul écrira : “je me suis fait juif avec les Juifs, sans-loi (païen) avec les sans-loi…” afin d’annoncer la Parole à tous (1 Co 9, 20). Le tandem Barnabé-Saul devient le tandem Paul-Barnabé (13, 13). Ce n’est qu’un détail de plus dans le texte, mais Luc fait ainsi reconnaître la place que Paul prend au sein de l’Eglise et pour la mission envers les non-Juifs. A noter la courte histoire de Jean avec Paul et Barnabé (13, 5-13). Jean, surnommé Marc, est probablement l’auteur de l’Evangile selon Marc. On ne sait pas ce qui s’est passé entre eux, peut-être une certaine réserve de la part de Marc devant l’audace de l’annonce aux païens.
 
Les doubles noms. L’antiquité romaine avait coutume de désigner quelqu’un par son nom et un surnom (ex. Marc Aurèle ; Marcus Tullius Cicero). La coutume juive était de désigner quelqu’un par son prénom et celui de son père (ex. Jacques, fils de Zébédée ou Simon, fils de Jonas). Mais la chrétienté d’origine juive qui fréquente le monde romain adopte le double-nom, nom hébreu auquel est accolé un nom gréco-romain (Simon-Pierre ; Jean-Marc, Saul-Paul, etc.)
 
A Antioche de Pisidie. (13, 13-52)Ne pas confondre avec Antioche de Syrie. Là aussi, Paul prêche à la synagogue, où il est bien reçu, trop bien même, au point que l’on vient de partout pour l’écouter. Dans la synagogue se trouvent des Israélites et des craignant-Dieu, c’est-à-dire des Juifs et des sympathisants (v.16 et 26). Les paroles concernant Jésus (kérygme, 26-31) ne nous étonnent pas. Les précisions qu’il apporte à l’histoire du peuple de l’Alliance complètent ce que disait Etienne. Cependant, Paul pousse son raisonnement au sujet de la Promesse et du pardon des péchés. “C’est grâce à Jésus que le pardon des péchés vous est annoncé et, alors que, par la loi de Moïse, vous ne pouvez pas être délivrés de vos péchés et être justifiés, par Jésus, tout homme qui croit devient juste” (38-39). C’est l’origine du clash qui va se produire.
 
Alors que tout le système religieux juif reposait sur le respect de la Loi de Moïse en vue d’appartenir au peuple choisi, voici que Paul pointe l’insatisfaction qui en découle chez les croyants, car nul n’accomplit parfaitement la Loi et donc chacun se sent toujours coupable. Tandis qu’en suivant Jésus, en ayant foi en ses paroles, par le baptême, la justification est pleinement accordée. On comprend que les incirconcis aient invité leurs amis à venir entendre la Bonne Nouvelle. Plus que par jalousie devant le succès de Paul, les Juifs circoncis ne peuvent accepter cette manière de “brader la religion”. Cela entraîne la réponse cinglante de Paul : “Puisque vous repoussez la parole de Dieu… eh bien, nous nous tournons vers les païens”. Cette attitude de Paul est bien éloignée de celle du jeune Saul poursuivant les disciples de Jésus jusqu’à Damas ! Cependant, ce n’est pas une rupture systématique d’avec les Juifs, car toujours, Paul continuera à enseigner d’abord dans les synagogues : priorité au peuple de l’Alliance. Hélas, de lieu en lieu, se reproduit le refus d’écouter.
 
Carte - Iconiuim Carte - Iconiuim   Iconium, Lystre et Derbé (ch. 14). Paul pousse son chemin dans la région montagneuse. A Lystre, ville de culture majoritairement grecque, Paul et Barnabé sont pris pour des dieux de la mythologie païenne descendus sur terre. La guérison du paralysé est donc mal interprétée et la parole de Paul est nécessaire pour signifier l’origine de la guérison : Nous vous annonçons la Bonne Nouvelle : détournez-vous des faux dieux, et convertissez-vous au Dieu vivant, lui qui a fait le ciel, la terre, la mer, et tout ce qu’ils contiennent. Des commandos Juifs retournent les foules contre Paul.
 
Avec Barnabé, il va jusqu’à Derbé puis ils reviennent sur leurs pas. Au cours du retour, ils affermissent les communautés, consolident leur organisation par la désignation des anciens (presbytres, d’où vient le mot prêtres), puis ils rentrent à Antioche de Syrie et témoignent comment Dieu a ouvert la porte aux païens. Lisez le retour de mission (14, 24-28). Demandez-vous s’il en est de même dans nos communautés et comment elles rendent grâce à Dieu avec les acteurs de la mission, pour l’annonce de la Bonne Nouvelle aujourd’hui.
 

Zoom : L’Assemblée de Jérusalem ch. 15, 1 à 29.

Pour ne pas se perdre en discussion d’idées, commencez par repérer quelles personnes ou groupes sont nommées. Quelle est l’attitude ou la position de chacun ? Qui prend la décision et fait rédiger la lettre finale ? A partir de là, que pouvons-nous dire du “fonctionnement” de l’Eglise ?
 
L’Assemblée de Jérusalem tient une place capitale dans l’histoire de l’Eglise primitive. Des conflits ont pu naître ici et là en raison de la présence de chrétiens d’origines diverses (disciples de Moïse, Hellénistes et Romains, mais aussi venus d’autres civilisations du Proche-Orient). Les heurts avec les judaïsants se multiplient d’autant plus que certains sont venus endoctriner les frères et troubler les esprits. Par discrétion, Luc ne donne pas de noms, pour ne pas réveiller le passé. La lettre de Paul aux Galates, écrite 20 ans auparavant est plus explicite (Galates 2, 11-16). Ces conflits sont présentés en délégation au cœur de l’Eglise-mère, à Jérusalem.
 
L’objet du débat et la résolution finale. Les pharisiens devenus chrétiens exigent la circoncision et l’observance de la Loi de Moïse pour les païens. C’est donc une remise en cause du salut obtenu par le baptême en Jésus-Christ. (Relire l’épisode précédent à Antioche de Pisidie, ch.13, 37-38). Pierre parle en premier et se réfère au baptême de Corneille à Césarée. Le dernier à parler est Jacques, responsable de la communauté de Jérusalem, représentant les anciens et leurs tendances légalistes.
 
Pourtant, dans le souci de ne pas nuire à la communion, il demande de ne pas accumuler d’obstacles devant les païens qui se tournent vers Dieu : “ne pas surcharger ceux des païens qui se convertissent à Dieu” (15,19). Comme dans tout compromis, on garde cependant quelques exigences, mais pas celles qui laisseraient croire la Loi supérieure à la foi en Jésus. A l’époque, des païens qui ne participaient pas aux cérémonies religieuses officielles de l’Empire étaient considérés comme incroyants par les autorités romaines. La décision de Jérusalem leur demande donc de limiter le plus possible leur participation aux cultes.
 
La finale de la lettre mérite toute notre attention : “L’Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé de … ” Le verrou de la circoncision est définitivement levé. Cependant, la mise en application de la décision sera longtemps contestée dans certaines Eglises. Paul aura souvent à souffrir de cette opposition lors de ses voyages et dans ses lettres. La composition de la délégation chargée de communiquer la lettre est voulue pour l’authentifier auprès des récalcitrants : Judas et Silas (noms à consonance hébraïque) sont bien en vue et font autorité parmi les frères de Jérusalem !
 

D’hier à aujourd’hui

Concile oecuménique Vatican II 1962-1965  
Concile oecuménique
Concile oecuménique

 

 Le chapitre 15 porte les traces d’une crise qui aurait pu être lourde de conséquences. Devant l’audacieuse ouverture aux païens, certains ont pris peur et préféraient se retrancher derrières les habitudes et rites anciens plutôt que de voir entrer en Eglise de nouvelles gens qui donnent leur foi au Christ, mais ne connaissent ni ne pratiquent toute la Loi de Moïse. L’unité des Eglises issues du judaïsme et du paganisme a été sauvegardée. L’Eglise-mère de Jérusalem n’a pas suivi ses “intégristes” ; elle a authentifié la mission paulinienne. Ce genre de débat a toujours existé ; aujourd’hui, l’assemblée du concile Vatican II demeure contestée par quelques-uns. L’Eglise risque toujours de se replier sur elle-même. Les chrétiens ont sans cesse à s’ouvrir à l’inattendu de Dieu, en fidélité à la Bonne Nouvelle pour tous.
 

Conclusion.

La section 5 rapporte le premier voyage de Paul. Il est parsemé d’embûches de tous ordres. Pourtant la Parole progresse, est annoncée. Paul et Barnabé, de retour à Antioche après l’assemblée de Jérusalem, continuent : “Ils enseignaient et, avec beaucoup d’autres, ils annonçaient la Bonne Nouvelle de la Parole du Seigneur” (15,35). Bientôt, ils repartiront pour un nouveau voyage. Une nouvelle étape sera franchie avec le passage en Macédoine vers l’Europe et l’arrivée à Philippes. A suivre !
 

Prier la Parole : A vin nouveau, outre neuve

 
Dieu très bon, Père de Jésus, le Christ notre Seigneur,
Répands sur nous ton Esprit Saint
 
Donne-nous l’esprit de sagesse et d’intelligence
La sagesse de faire confiance aux lumières que ta Parole nous apporte grâce à l’Eglise
L’intelligence de comprendre que, dans ces lumières, les chemins de nos fidélités s’éclairent.
 
Donne-nous l’esprit de conseil et de force.
Le conseil, cette capacité de mûrir nos décisions pour éviter de courir tête baissée
La force qui est dans l’humilité de bien faire ce que nous avons à faire,
Et dans le courage de tenir la parole donnée.
 
Donne-nous l’esprit de connaissance et d’affection filiale
La connaissance des signes des temps et l’heure de ta volonté
L’affection filiale qui délivre de la peur parce que tu nous aimes.
 
Donne-nous l’esprit de joie et d’action de grâce,
Cet émerveillement qui nous vient de toi Père, pour ton Fils, dans l’Esprit.
Viens Esprit-Saint, viens : nous t’ouvrons la porte de nos cœurs.
Inspiré par Mgr Favreau
 
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ou à hennart-eh@orange.fr

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