Fiche 8 Actes 22-26

Plusieurs discours, entre l’arrestation et l’embarquement.

Section 8. Actes 21, 37 à 26, 32, Section facultative.

 

Vue d’ensemble

Ces chapitres, à replacer dans le déroulement de la finale de Luc, ch. 21 à 28, comportent différents discours ou plaidoiries de Paul et des Juifs. Paul s’adresse à différentes catégories de personnes : Juifs, Sanhédrin, autorités romaines : Félix, Festus, Agrippa et Bérénice. On y explique le guet-apens préparé par les Juifs contre Paul, comment il est déjoué, mais surtout on comprend pourquoi Paul en appelle au tribunal impérial, à Rome.


Au cours de cette section 8, se révèlent la stratégie et les arguments des uns et des autres. Mais la progression du récit est aussi une stratégie de Luc pour conduire son œuvre vers son achèvement et amener ses auditeurs à comprendre le message des croyants, concernant le Christ sauveur de tous les hommes : Christ est Lumière et salut pour tous les païens. Cf. Syméon, début de l’Evangile, Luc 2,32) ; On prêchera en son nom la conversion et le pardon des péchés à toutes les nations (Emmaüs, fin de l’Evangile, Luc 24, 47) et conclusion des Actes : c’est aux païens qu’a été envoyé ce salut (Actes 28, 28).


Au cours de nos lectures de l’Evangile et des Actes, nous avons pu découvrir cette “Bonne Nouvelle pour tous” grâce aux gestes et rencontres de Jésus, grâce à son enseignement et à ses paraboles, dans sa mort et sa résurrection puis dans la continuité et la persévérance avec lesquelles les témoins ont proclamé le salut en Jésus-Christ. Nous en sommes aujourd’hui les héritiers et les témoins ; à nous d’en rendre compte. Que vient nous dire le message de Luc dans notre recherche pour vivre l’annonce ?

 

Pour faciliter la lecture, il est utile de repérer la succession des séquences de 21 à 26

  • La montée vers Jérusalem : de Milet à Jérusalem en passant par Césarée (21, 1-16)
  • Rencontre de la communauté judéo-chrétienne de Jérusalem.(21, 17-26)
  • L’arrestation de Paul dans le Temple (21, 27-36)
  • Premiers plaidoyers de Paul devant les juifs et second récit de conversion (21, 37 à 22, 30)
  • Plaidoyer de Paul devant le Sanhédrin (division des Juifs au sujet de la résurrection, 23, 1-11)
  • Complot monté par les juifs et déjoué (23, 12-35)
  • Plaidoyer des Juifs devant le gouverneur Félix (24, 1-9)
  • Plaidoyer-défense de Paul devant Félix (24, 10-23 et 24-27)
  • Relance de la procédure devant Festus successeur de Félix (25, 1-12)
  • Contexte préparant la comparution devant Agrippa et Bérénice (25, 13-27)
  • Paul s’explique devant Agrippa, troisième récit de conversion (26, 1-32)
     

  bronze, contemporain de Paul. Musée de Arles Esclave prisonnier, premier siecle  
bronze, contemporain de Paul. Musée de Arles
bronze, contemporain de Paul. Musée de Arles
La section 8 se termine
avec la comparution de Paul devant le roi Agrippa (voir zoom, ci-dessous).

Dans le plaidoyer aux Juifs, au moment même de l’arrestation, Paul s’explique sur l’origine de son revirement et son baptême des mains d’Ananie, homme pieux, fidèle à la Loi, Juif exemplaire… c’est une manière d’authentifier sa conversion. Evoquer sa présence au meurtre d’Etienne confirme sa qualité d’authentique Juif. Evoquer longuement les dialogues entre Paul et le Seigneur est une manière d’authentifier sa mission auprès des païens comme venant, non de lui-même, mais de Dieu. C’est l’ouverture aux païens qui choque les Juifs et provoque leur rejet.


Le plaidoyer au Sanhédrin peut sembler être une ruse de Paul par laquelle il fait apparaitre au grand jour la division pharisiens/sadducéens au sujet de la Résurrection. Il marque là un point devant les Romains contre ses agresseurs. C’est ailleurs que Paul dira le contenu de son enseignement sur Jésus, devant Agrippa. La succession des évènements judiciaires présentés par Luc montre que Paul “tient la route” face à des adversaires coriaces et sectaires. La succession des discours fait apparaître un même procès étalé dans le temps et devant des autorités de plus en plus haut placées. Le verdict viendra en son temps, après la comparution devant Agrippa.

 

Zoom : Troisième récit de la conversion de Paul. Ch. 26, 9-23.
 

Paul, lapidation à Lystres Paul, lapidation à Lystres  Les Actes racontent trois fois la conversion de Paul, ce qui signifie l’importance que Luc lui accorde. Reprendre trois fois de manière différente un même évènement est un exercice littéraire dont sont friands les écrivains latins. En maison d’Evangile, nous n’avons pas la possibilité de faire une étude comparative détaillée des trois récits et, encore moins, des multiples rapprochements avec les récits de vocations dans l’Ancien Testament : vision, lumière, se tenir debout, être renversé, une parole qui donne la mission, etc. Une certitude doit nous habiter : la démarche de conteur de Luc est aussi une démarche théologique. La mission confiée à Paul est plus développée ici, en 26, 14-18, qu’en Actes 9, 15. Quand Paul se justifie auprès des Juifs (ch. 22), ce ne sont pas les mêmes arguments qu’auprès d’Agrippa (ch.26) : les arguments sont ciblés selon l’interlocuteur présent.

 

Quelques éléments communs aux 3 récits de conversion

Actes 9, 1-19 ; 22, 3-21 ; 26, 9-23.
• Paul est d’origine juive et de stricte observance dans sa jeunesse, recherchant les Juifs convertis à l’Evangile pour les ramener à la Loi de Moïse.
• Au cours d’un déplacement à Damas, il est retourné par une lumière et une force mystérieuses. Les Actes ne parlent pas de cheval ! Dans les trois récits, la voix affirme : “Je suis Jésus, celui que tu persécutes”. Cette affirmation n’est pas une définition sur Jésus, elle met en avant une relation entre Paul et Jésus, relation appelée à se transformer. A chaque récit de vocation, l’envoi de Paul aux païens est précisé comme quelque chose qui s’impose à Lui. Il est dur de regimber contre l’aiguillon v.14 ! Puis v.19 : “Je n’ai pas résisté à cette vision céleste”. Difficile résistance, comme pour Pierre, lors du baptême de Corneille, 10, 47 et 11, 17 : “Qui étais-je, moi, pour empêcher l’action de Dieu ?” Impossible résistance aussi en 3,20 : “Quant à nous, (Pierre et Jean) il nous est impossible de ne pas dire ce que nous avons vu et entendu.” Souvenons-nous enfin des récits de vocation de prophètes, pour qui il semble impossible de refuser (Moïse, Amos, Isaïe, Jérémie, etc.). Retenons que Jérémie, dès sa vocation, est appelé : prophète des nations (Jr. 1, 1-5).
• Pour Paul, la conséquence immédiate de la vision est le début sa proclamation (26,20) : “J’ai parlé aux gens de Damas d’abord, puis à ceux de Jérusalem, à tout le pays de Judée et aux nations païennes ; je les exhortais à se convertir et à se tourner vers Dieu, en menant une vie qui exprime leur conversion”. Ac. 9, 20 : “Sans plus attendre, il proclamait Jésus dans les synagogues, affirmant qu’il était Fils de Dieu”. Au ch. 26, c’est le même appel à la conversion que proclamait Pierre en 3, 19 : “Convertissez-vous donc et revenez à Dieu pour que vos péchés soient effacés”.

 

Tous les détails ne sont pas reproduits d’un récit à l’autre, en particulier devant Agrippa. On comprend que Paul ne dise, dans ce plaidoyer, que ce qui lui semble essentiel à dire pour défendre sa cause et celle de Dieu devant les Romains. Ainsi la conclusion résume-t-elle une dernière fois le kérygme : “Je ne disais rien d’autre que ce qui avait été prédit par les prophètes et par Moïse, à savoir que le Messie devait souffrir, et qu’il devait ressusciter le premier d’entre les morts pour annoncer la lumière à notre peuple et aux nations païennes” (26, 23). La résurrection est bien au cœur de la proclamation de Paul et de l’Eglise aux païens : “Si Christ n’est pas ressuscité, votre foi est vaine” (1 Co. 15, 17). C’est ainsi que Paul a rendu compte de sa foi, devant le sanhédrin, devant les païens, devant Agrippa.


S’ensuit un court dialogue entre Festus, Paul et Agrippa, une sorte de complément d’information, puis voici la conclusion ou sentence : “Cet homme ne fait rien qui mérite la mort ou la prison.” On a déjà entendu semblable affirmation par trois fois, dans la bouche de Pilate au sujet de Jésus.

 

Omissions et amplifications. Dans ce troisième récit, peut-être avez-vous repéré certaines omissions, comme Ananie, mais aussi des amplifications, comme l’insistance sur l’annonce aux païens ; par exemple, entre le 1er récit en 9, 15 : “Va ! cet homme est l’instrument que j’ai choisi pour faire parvenir mon Nom auprès des nations païennes” et le 3ème récit, en 26, 16-18 : “Si je te suis apparu, c’est pour te destiner à être serviteur et témoin de ce moment où tu m’as vu, et de ceux où je t’apparaîtrai encore. Je te délivre de ton peuple et des nations païennes vers lesquelles je t’envoie pour leur ouvrir les yeux, pour les ramener des ténèbres vers la lumière et du pouvoir de Satan vers Dieu, afin qu’ils reçoivent le pardon des péchés et une part d’héritage avec ceux qui ont été sanctifiés, grâce à la foi en moi.” Cette amplification prépare la finale en 28,28.

 

Pour aller plus loin.

Dans ses lettres, Paul évoque plusieurs fois sa conversion : 1 Corinthiens 9, 1 ; 15, 9 ; Galates 1, 13-23 ; Philippiens 3, 4-14. Il peut être intéressant de relire les trois textes.

 

Bérénice est née en +28 ; fille ainée d’Hérode Agrippa ; veuve à 20 ans de son oncle, Hérode, roi de Chalcis, elle vécut avec son frère Agrippa II, épousa Ptolémon, roi de Cilicie, puis retourna auprès d’Agrippa. Elle eut une relation avec Titus, venu mener la guerre juive (66-70) au cours de laquelle Jérusalem fut assiégée et détruite. Titus, empereur en 79, se montra favorable aux Juifs et par la suite aux chrétiens. Il avait 11 ans de moins que Bérénice.

 

Rendre compte de sa foi.

 

En parcourant les Actes, nous avons pu voir Paul et d’autres rendre compte de leur foi. Si nous avions été à la place de Paul, qu’aurions-nous fait ? La question est sans doute intéressante, mais mieux vaut se demander comment aujourd’hui nous rendons compte de notre foi. La manière de faire de Paul peut nous aider. Quel bilan dresseriez-vous de votre lecture des Actes en maison d’Evangile ?
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Telle ou telle question ci-dessous proposée peut retenir notre attention. Ce questionnaire peut être personnel ou partagé au cours d’une autre rencontre en maison d’Evangile.

 

  1. Avez-vous déjà songé à rendre compte de votre foi ? Est-ce important pour vous ? Jusqu’à quel point ? De quelles expériences pouvez-vous témoigner ?
     
  2. Dans quelle mesure rend-on compte de sa foi personnellement, en conscience, et dans quelle mesure en rend-on compte avec d’autres, dans une communauté croyante ?
     
  3. Quelle est l’appartenance commune à laquelle vous vous référeriez, si vous aviez à convaincre un interlocuteur ? Famille ? Nation ? Ensemble culturel ? Communauté de vie ? Fraternité humaine au sens large ? Epreuve partagée ? Quels liens ou quels référents évoqueriez-vous ?
     
  4. Quel évènement central de votre vie a forgé votre foi ? Est-ce une conversion identifiable dans le temps ? ou une conversion continuée au fil du temps ? Quel rôle ont joué les épreuves de la vie, les expériences spirituelles fortes ? Les rencontres ? Les enseignements ? Les héritages bien transmis ?
     
  5. Qui serait l’Ananie qui veille sur la croissance de votre foi ? Un prêtre, une religieuse, un ami qui écoute ? Un psychologue, une communauté qui vous accueille ? Auriez-vous le désir d’écrire, de vous appuyer davantage sur les sacrements ?
     
  6. Quelles persécutions au sens large du mot reconnaîtriez (reconnaissez) vous avoir exercé ? Critiques, mise en dérision des opinions d’autrui, manque d’écoute ? Ou bien d’avoir laissé dormir le trésor de la foi, d’avoir peu transmis ce que vous aviez reçu ?
  7. Pourriez-vous, comme Paul, définir votre foi ? La placeriez-vous du côté de l’espérance ? Votre foi change-t-elle votre rapport à l’Eglise ?
     
  8. Par quels gestes rendriez-vous (rendez) vous compte de votre foi ? Par un choix d’état de vie ? Par un engagement pour la justice ? Par une action caritative ? De quel type ? Par un plus grand détachement du monde ? Par une plus grande immersion dans le monde ? Par la poursuite de tout ce que vous faisiez jusqu’à maintenant, mais autrement ? Comment définiriez-vous cet autrement ?
     
  9. Accepteriez-vous de mourir pour votre foi ? De quoi pourriez-vous vous priver –quelles parties de vous pourraient mourir- pour que vive votre foi ? Qu’est-ce qui doit demeurer vivant en vous pour que votre foi vive ?
    Paru dans Biblia n° 41.

Prier la Parole.
1 - Tu crois que l'amour n'a pas de frontière.
Tu crois que donner ouvre un avenir.
Tu crois qu'un sourire peut plus qu'une guerre.
Tu crois en Dieu qui croit en l'homme.
Tu crois en Dieu qui croit en toi.

Alors viens écrire tes actes d'apôtre
Ouvrir une page à son Esprit
Alors viens écrire tes actes d'apôtre
Une page avec Lui.

2 - Tu crois en un Dieu aimant comme un père
Tu crois qu'en ses mains tout est création
Tu crois qu'il t'attend pour bâtir la terre
Tu crois en Dieu qui…

3 - Tu crois qu'en Jésus, Dieu s'est fait tout proche.
Tu crois que sa vie a vaincu la mort.
Tu crois qu'aujourd'hui encore il s'approche.
Tu crois …

4 - Tu crois que chacun est pierre d'Eglise
Tu crois que l'Esprit nous met en chemin
Tu crois en la vie que Dieu a promise
Tu crois …
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Article publié par Emile Hennart - Maison d'Evangile • Publié • 4874 visites