Il y a bientôt 70 ans, Pie XII ouvrait les portes de la recherche aux biblistes, exégètes et archéologues qui avaient été bridés de nombreuses années par les réserves émises au début du siècle dernier au sujet des études bibliques. En reconnaissant que l’inspiration des Ecritures ne signifiait pas dictée par l’Esprit Saint au porte-plume que serait l’auteur sacré, Pie XII invitait à retourner aux sources des écrits sacrés et à leur environnement. Une nouvelle compréhension du rôle des écrivains bibliques permettait de découvrir combien les textes de la Bible étaient insérés dans l’histoire humaine et tributaires de leur époque de production. Ainsi la Commission théologique internationale présidée par le cardinal Ratzinger rappelait, en avril 1993, combien il était nécessaire de prendre en compte la croissance de la Tradition évangélique pour favoriser son interprétation. Le document précise encore l’œuvre de “relectures” successives qui a fait émerger les Evangiles.
Dans le souci de relecture il y a volonté de discerner ce qui est souffle de Dieu dans les évènements vécus par les croyants. C’est en relisant et en méditant les Ecritures que les premières communautés ont pu accéder à la compréhension de Jésus, Messie de Dieu, salut et Lumière des nations. La relecture est un exercice spirituel par lequel le croyant reprend le fil d’une existence pour y discerner en quoi cela correspond à l’attente du Seigneur à l’œuvre par son Esprit.
“Dieu désire s’entretenir avec les hommes comme avec des amis pour les faire entrer dans sa vie divine…” (Dei Verbum). Quelle meilleure image de dialogue peut-on trouver que ce partage entre Jésus et deux disciples sur le chemin d’Emmaüs où, chemin faisant, ils relisent les événements récents qu’ils avaient subi et qui leur semblaient vides de sens. Ils relisent à la lumière des Ecritures. Encore fallait-il que quelqu’un leur explique le sens des Ecritures.
C’est à cela que nous sommes appelés aujourd’hui, membre des EAP ou non, quand notre évêque demande de porter attention au document remis au conseil du presbyterium et présenté dans ce numéro. Non seulement porter attention, mais mettre en œuvre et pratiquer l’exercice spirituel qu’est la relecture. Nous faisons tant et tant de choses, nous croisons tant et tant de gens, nous sommes soumis à un tel flot d’informations et de nouvelles brèves, que nous perdons le fil conducteur de notre existence : “Au souffle de l’Esprit”, dans tous les compartiments de notre vie. Relire c’est aussi un moyen de vérifier en quoi nous sommes fidèles à la mission qui incombe à tout baptisé: le témoignage, la sanctification, la charité effective (cf. Lumen Gentium n° 10).
Nous n’oublierons pas de prendre connaissance de la démarche œcuménique et de relire le travail réalisé par les chrétiens dans le souci de se rapprocher les uns des autres. Mieux encore, participer à leurs activités et leur prière, lorsque l’occasion se présente, lors d’initiatives locales, afin que tous deviennent un, selon la prière de Jésus la veille de sa Passion.
Abbé Emile Hennart