Un chemin dangereux
La ségrégation par l’âge
nous avertit Bruno Frappat dans sa chronique du journal La croix, "L'humeur des jours" : le temps passe trop lentement
Les autorités, comme le virus, balancent entre divers variants : reconfiner ou pas ? Allonger ou pas le délai entre deux doses de vaccin ? S’orienter ou pas vers un passeport vaccinal réservant l’entrée des restaurants et salles de spectacles aux personnes vaccinées. Sévir plus durement contre les manquements au couvre-feu ? Rouvrir les universités pour cesser de décourager la jeunesse ou maintenir la prudence qui prévaut depuis le début de l’hiver ? Laisser rouiller ou pas les remontées mécaniques qui ornent nos belles montagnes ?
Nous hésitons tous, au fond de nous-mêmes, entre les divers choix qui s’offrent aux décideurs.
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Nos débats publics ou privés, enchaînements de propos péremptoires s’enlisent dans des méandres et hésitations pratiques ou conceptuelles. L’agressivité est de mise.
Nous passons d’une idée à l’autre avec souplesse. Ceux qui étaient hostiles à une campagne de vaccination ne sont pas les derniers à tempêter contre la lenteur avec laquelle elle se passe.
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Ceux qui redoutaient le vaccin, désormais le réclament.
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D’autres refusaient avec horreur toute idée d’un troisième confinement, ils l’exigent et demandent ce qu’on attend pour le décréter.
Ce mauvais climat traduit vraisemblablement une angoisse collective très forte que nul animal politique ne peut atténuer ou réorienter vers l’action. Les angoisses particulières s’additionnent qui, toutes, ont un rapport direct ou indirect avec la mort qui rôde et frappe autour de nous, aveuglément.
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Générations
À propos de Covid – puisque décidément on n’en sort pas mais comment parler d’autre chose quand on surfe chaque semaine sur l’air du temps ?
Un débat terrible et lourd est en train de monter à l’horizon des médias et de l’édition.
En raison de la déprime sévère qui affecte notre belle jeunesse, particulièrement universitaire, des esprits forts commencent à risquer l’idée que la « priorité » accordée à la protection des plus fragiles, à savoir, les vieux et les pensionnaires des Ehpad, est sans doute une erreur.
Le raisonnement consiste à présenter la jeunesse comme un investissement pour l’avenir des sociétés, ce qui relève de l’évidence, mais la vieillesse comme un poids de plus en plus en plus lourd. Ainsi, pour la vaccination, faire passer les vieux devant serait idiot et un mauvais calcul.
De même les mesures générales liées aux confinements ou au couvre-feu en pénalisant les actifs autant que les inactifs ne seraient pas un service rendu à la société et à notre économie. Il vaut mieux laisser aller et venir la jeunesse que bloquer tout le monde puisque c’est elle qui produit et consomme.
En contestant les priorités choisies par les autorités, sans que personne n’y trouve à redire, ces messieurs sémillants qui se voient jeunes pour longtemps (on pense à Christophe Barbier et Alexandre Jardin) nous mettent sur
un chemin extraordinairement dangereux qui est celui de la ségrégation par l’âge.
Belle idée que celle de déclencher une guerre des générations !
Extraits de la chronique de Bruno Frappat, l'humeur des jours, essentiellement le 3e paragraphe.
Bruno Frappat est un journaliste et homme de presse français, né le 3 octobre 1945 à Grenoble. Il a été directeur de la rédaction du Monde, directeur de La Croix et président du directoire du groupe Bayard Presse.
En retraite, il rédige encore des articles comme celui-ci pour le journal La Croix dans la chronique « humeur des jours »
Il fut lauréat du prix 2019 de l’académie catholique
Pour l'article complet :
https://www.la-croix.com/Debats/Le-temps-passe-trop-lentement-2021-01-29-1201137781
B Henry