Marie-Laure

En ce temps de carême, beau témoignage de foi d'une jeune fille de chez nous

 

Marie-Laure Leclercq : Ma rencontre avec Jésus

 

 

 « Donner à boire aux assoiffés ». Éducatrice de jeunes enfants le jour et serveuse dans un bar catho le soir, la jeune Lilloise répond à la soif d'écoute et de présence de tous ceux qu'elle rencontre.

 

 

 

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A 18 ans, je me demandais :

 

       Ces filles de mon âge , comme moi en camp de formation pour devenir cheftaines des Scouts unitaires de France (Suf), ces étudiantes ancrées et à l'aise dans le monde actuel, que peuvent-elles bien trouver dans ce petit bout de pain exposé sur l'autel ? À travers leur posture, leur regard et leur silence, je les devinais engagées, à l'écoute d'une présence qui leur semblait réelle et qui m'échappait encore complètement. Je suis bouleversée. J'avais l'intention de ne passer qu'une tête dans la chapelle, par curiosité, juste pour savoir ce qu'était un temps d'adoration, et me voilà à genoux, tournée vers Jésus dans le saint sacrement. S'il est présent pour elles, ne l'est-il pas aussi pour moi ? Silence. Doucement, une relation s'établit entre le Christ et mon coeur en soif de Dieu. Ce Dieu que j'avais « fréquenté » de loin toute mon enfance en chantant dans la chorale paroissiale de Béthune, mais que j'avais abandonné vers 12 ans, quand mes parents m'avaient laissée libre de lâcher la messe.

 

 

Ma rencontre avec Jésus

 

       s'est approfondie grâce aux Petites Soeurs de l'Agneau. La communauté qui construisait son monastère à Béthune avait demandé aux Scouts Unitaires de France de l'aider pour les travaux. J'ai tout de suite accroché avec cette fraternité dont le style de vie est d'une simplicité tout évangélique. Leur accueil fraternel, empreint d'amour vrai - c'est-à-dire inconditionnel et exigeant -, leur liturgie riche de l'Ancien et du Nouveau Testament et des Pères de l'Église ont été pour moi une formidable catéchèse. La foi, je le crois, se transmet par attraction et comme par osmose : au contact de ces religieuses, je me suis peu à peu rapprochée du Christ, que j'ai pu confesser comme mon Dieu, mon Sauveur.

J'avais l'intention de ne passer qu'une tête dans la chapelle, par curiosité, et me voilà à genoux, tournée vers Jésus.

 

 

J'ai demandé la confirmation à 21 ans.

 

       Je voulais ainsi affirmer ma foi catholique, ma ferme résolution à aller chaque dimanche à la messe et ma volonté de me mettre au service de Dieu et de mon prochain ; autant de fruits mûris chez les Petites Soeurs et chez les Suf, dont la spiritualité me portait. La même année, en 2009, je suis partie en pèlerinage en Terre sainte avec 1500 étudiants. Au bord du lac de Tibériade, agité par un vent phénoménal, j'ai vécu presque en direct l'Évangile de la tempête apaisée (Matthieu 8, 23-27). 

 

 

La Parole devenait vivante,

 

        elle me brûlait de l'intérieur ; je n'allais plus jamais pouvoir la lire comme une lettre morte. À mon retour, j'étais prête à prononcer ma « parole de feu », l'ultime étape de la progression proposée par les Suf et par laquelle la guide aînée s'engage à vivre la charité et le don de soi jusqu'au bout. Tel était mon désir profond, car saint Paul frappe juste quand il écrit : « J'aurais beau avoir la foi jusqu'à transporter les montagnes, s'il me manque l'amour, je ne suis rien » (1 Co13, 2).

 

 

Dans l'élan de Pâques 2012,

 

        après avoir vécu un mois en fraternité avec les Petites Soeurs de l'Agneau, je suis retournée dans le monde, sachant enfin quel était mon appel. Je voulais, selon l'esprit que j'allais bientôt retrouver chez Madeleine Delbrêl, vivre l'Évangile dans la vie ordinaire, auprès des gens ordinaires. Avec un travail ordinaire : prendre soin de l'enfant et de l'élan de vie qu'il porte en lui. J'ai donc fait un CAP petite enfance, puis j'ai enchaîné sur le concours d'éducatrice de jeunes enfants. Ce que je suis depuis 2015 à Haubourdin, dans la métropole lilloise. Un poste atypique, puisque le matin je travaille dans un relais d'assistantes maternelles et l'après-midi j'accompagne des enfants de petite section pour développer leur langage.

 

 

Enfants, parents,

 

        assistantes maternelles sont en demande d'une écoute attentive, d'une oreille disponible qui sache recueillir paroles et silences, inquiétudes et questions. Par exemple, quand l'enfant commence à avoir des comportements transgressifs, c'est souvent qu'il a manqué d'attention. La pédagogue Maria Montessori explique que le petit a d'abord besoin de l'affection et de la présence des adultes. Présence physique - d'où la nécessité de passer du temps avec lui - et psychique - ce qui implique une grande disponibilité d'esprit de la part de l'adulte. En tant qu'éducatrice, mon rôle est aussi d'éveiller les parents à cette dimension vitale pour le bonheur de leur progéniture.

 

 

Ne sommes-nous pas tous assoiffés d'aimer et d'être aimés ?

 

Mon boulot

 

       me fait ainsi comprendre combien la relation est à soigner. Car le monde souffre de ne plus être relié. Il s'effrite, faute de liens fraternels entre les individus devenus des atomes. Dieu merci, des personnes de bonne volonté se lèvent pour remettre du liant entre les êtres ! J'en ai rencontré à l'église Saint-Maurice, dans le centre de Lille, où je me suis installée en 2016. Dans cette paroisse confiée à une équipe de la Fraternité diocésaine des parvis, j'ai trouvé une parole de Dieu qui s'incarne aussi dans la relation aux autres. Petits détails mais qui changent tout : l'assemblée dominicale est disposée en U autour de l'ambon, si bien que des regards et des sourires peuvent s'échanger durant la messe, commencée en se disant bonjour ; au moment de la communion, on s'avance tous ensemble vers l'autel pour recevoir Jésus, dont nous formons le corps. On vit alors la communion au sens fort, qui se prolonge sur le parvis où, après la messe, on continue de vivre l'Évangile.

 

 

Les étapes de sa vie

1988 Naît à Béthune (Pas-de-Calais).
2006-2012 S'engage chez les Scouts unitaires de France.
2010 Master 2 pour être professeure des écoles.
2012 CAP petite enfance, puis diplôme d'éducatrice de jeunes enfants.
2015 Bénévole au Comptoir de Cana pendant un an.
2016 Rejoint pendant deux ans l'équipe de la Fraternité diocésaine des parvis à Lille.
2018 Redevient bénévole au Comptoir de Cana.

 

 

Béatrice Henry :

Cet article est tiré de l’hebdomadaire « la vie » du 6 mars 2019, rubrique les essentiels : Donner à boire aux assoiffés