Le père Kermoal au pays des mineurs

A Loos-en-Gohelle et Mazingarge.

Mission : servir, se donner de la peine

Association La chaine des terrils Au pays des mines  
Association La chaine des terrils
Association La chaine des terrils
  

Quinze jours durant,

le père Kermoal a sillonné les routes du Pas-de-Calais. Invité par le service diocésain de la coopération missionnaire, il a pu tout à la fois rendre compte de son expérience missionnaire en Corée du Sud (Séoul), et écouter les manières de vivre l’annonce de l’Evangile chez nous : à Berck, Calais, Estrée, Arras etc.

 

 
Le doyenné de Lens-Liévin avait organisé une demi-journée en trois temps.
L’une des activités pastorales du père Kermoal est sa présence au monde des mineurs et des silicosés à Séoul. Aussi le doyenné de Lens-Liévin, a-t-il favorisé la rencontre avec les acteurs actuels du bassin minier. Ce fut une manière de rapprocher les gens d’ici et de là-bas, chrétiens ou d’autres confessions religieuses. Les participants furent ainsi plus réceptifs au témoignage du missionnaire et à sa présence à la population. Pour lui le ministère ne peut être séparé entre “partie religieuse” et “présence active aux hommes”. C’est tout un, devait-il dire en fin de soirée. On est avec eux, parce qu’ils souffrent et non parce qu’ils ont fourni un certificat d’identité chrétienne. 90% de la population est Hindoue, bouddhiste ou musulmane, et nul ne cache ses convictions. Le service de l’homme et le service de Dieu se rejoignent dans l’unique commandement de la charité. On ne saura trop remercier les animateurs de la journée et les partenaires invités d’avoir su présenter l’esprit de service qui animait chacun d’eux.
 
A la découverte de la vie associative

Bassin Minier Unesco Au pays des mines  
Bassin Minier Unesco
Bassin Minier Unesco
 A Loos en Gohelle: L’association “Bassin Minier Unesco” ; la “chaine des terrils”. A Mazingarbe, le développement du “centre social”.

Les dernières mines ont fermé en 1990, et l’idéologie de l’époque voulait que l’on taise l’histoire et la vie des hommes. Il fallait raser tout ce qui pouvait évoquer la vie ouvrière de ces lieux. On parlait de crassier là où chaque pierre du terril portait la souffrance et la sueur d’un peuple souterrain. Il a fallu redonner dignité et raisons de vivre et non raisons de se taire. Mariamme se réjouissait lorsque, au cours d’activités d’éveil de la mémoire au 11/19, un enfant confie que son papy lui a montré sa lampe de mineur « on n’en parlait jamais, je ne savais pas, il n’osait pas en parler ». Plonger ses racines dans l’histoire pour que vive demain, réveiller la dignité et les solidarités humaines, faire que soient reconnus par l’Unesco les richesses humaines d’un territoire en pleine évolution, c’est un pari fou en train de se réaliser. Il ne s’agit plus de la reconnaissance d’un monument, mais d’un espace humain de plus de 120km de long et 1.200.000 habitants. Mr Caron, maire de Loos en Gohelle et président-fondateur de l’association a montré les enjeux de cette reconnaissance.

 
Le temps du dialogue
Mr Caron, maire de Loos-en-Gohelle Au pays des mines  
Mr Caron, maire de Loos-en-Gohelle
Mr Caron, maire de Loos-en-Gohelle
Le soir, au centre paroissial Ste Barbe à Mazingarbe, c’est un fructueux dialogue qui a pu s’établir avec le père Kermoal, car au-delà des frontières les mêmes causes produisent les mêmes effets, et partout où il y a du charbon à extraire, partout se met en place une organisation selon les principes capitalistes. Partout on peut observer des migrations et l’exploitation de ceux qui ont obtenu une carte de séjour ; partout il y a concentration de pauvretés et nombreuses victimes. Pour le pays, 3.000 morts par an, des silicosés qui se retrouvent sur le bas-côté de l’existence sans aucune indemnité. Ceci explique un nombre élevé de suicides parmi les victimes de la mine. Le père Kermoal a témoigné des luttes pour la justice et la dignité menées dans le pays par les organisations de travailleurs. Leur objectif est de susciter le dialogue avec le gouvernement pour qu’un minimum d’aide sociale puisse être accordé aux malades. Le 28 avril est une « journée pour les victimes du travail » très suivie… Le débat nous a amené mesurer les effets de la mondialisation et que, pour les mineurs de tous les pays il y avait nécessité de se connaitre et d’agir ensemble. La lecture de Germinal est parlante, aussi bien en Afrique du Sud qu’à Séoul.
 
L’Eglise en Corée
L’Eglise en Corée voit grandir de nombreuses vocations sacerdotales et religieuses (plus que chez nous) ; mais le ministère vécu auprès des plus pauvres, sur les poubelles de Séoul ne semble pas attirer beaucoup devait dire le père Kermoal. Dans le pays, les chrétiens y sont reconnus et, quoique représentant 10% de la population, ils ont une place importante dans la vie politique. L’Eglise catholique a joué un rôle de leadership pour faire venir la démocratie, au temps de la dictature. Deux présidents du pays étaient des catholiques et l’actuel est de confession protestante. Le père Kermoal est aussi responsable de la communauté francophone. Parmi les souffrances il évoque celle de n’avoir pas le moindre indice de l’existence des chrétiens de Corée du Nord, séparés qu’ils sont depuis 1953 par un régime de dictature au Nord.
 
Diversité des témoins
Myriam.. avec rien on fait de la musique Au pays des mines  
Myriam.. avec rien on fait de la musique
Myriam.. avec rien on fait de la musique
Au cours de la soirée, Mariam a présenté quelques unes des activités de l’association Kabé-Bénin qui, depuis Loos-en-Gohelle soutient le développement d’un village du Bénin.
 
Mr Haribi a montré comment la mise en œuvre du centre social et sa vie au quotidien dépendent d’une volonté de rendre les uns et les autres acteurs et animateurs des animations. Il n’y a pas d’un côté ceux qui donnent, de l’autre ceux qui reçoivent, mais un souci commun de la participation de tous à l’élaboration et à la mise en œuvre des projets.
 
Sœur Thérèse a rappelé le thème de cette année pour la mission : « Que votre charité se donne de la peine ». La couleur principale de l’affiche est le violet. En Asie du Sud-est, c’est la couleur symbole du service. Se donner de la peine signifie la volonté de se prendre en main, de devenir participatifs, de satisfaire les gens que l’on rencontre. Cela passe par le service, le partage.
 
L’abbé Michel Becquart, responsable de la pastorale des migrants dans le diocèse a rappelé la présence d’autres sensibilités religieuses dans l’assemblée et proposé de conclure par la prière du Notre Père, unis à ceux qui portent la mission de témoigner de Jésus-Christ auprès de tous, unis à tous ceux qui se mettent au service de l’homme, agissent pour la dignité, la justice et la paix. 
 
Abbé Emile Hennart

Article publié par Emile Hennart - Maison d'Evangile • Publié • 9460 visites