Rencontre avec Alain Lucas

"Je suis entré au Secours Catholique par les migrants".

Alain Lucas Alain Lucas    Alain Lucas, ancien prof de maths de lycée, a été vice-président puis trésorier d'Emmaüs-Saint-Omer pendant de longues années. Il était parmi les membres-fondateurs. Aujourd'hui, il est, pour le diocèse d'Arras,  « référent » d'une des cinq équipes d'animation territoriale du Secours Catholique.

 

Peu après le départ en retraite de M. Lucas, la responsable du Secours catholique audomarois s'adresse à lui à peu près en ces termes : « Tu sais t'occuper d'Emmaüs. Maintenant que tu as plus de temps libre, accepterais-tu de créer une équipe de volontaires pour aller vers les migrants de Calais ». Elle et lui se connaissaient de longue date, du temps où, il y a une trentaine d'années, le couple des Lucas accueillit une réfugiée parmi les vietnamiens arrivés à Saint-Martin-au-Laert.

Alain accepta cet appel. « Je crois beaucoup aux appels de Dieu par la bouche des hommes », explique-t-il. Emmaüs, pour lui, ce fut aussi un appel. Plus jeune, avant de participer aux ramassages des « Amis d'Emmaüs » audomarois, il se rendait à la communauté de Nieppe car ses parents habitaient Armentières. « Mais c'est bien plus jeune encore, en 1954, que j'ai été marqué par le message que l'abbé Pierre lança par radio ». C'est cet appel qui fait qu'actuellement, malgré de nouvelles charges qui l'ont amené  à passer le relais à Emmaüs-Saint-Omer, il a encore des responsabilités auprès d'une association crée par Emmaüs-Lille, nommée « Aida », Aide à l'Insertion des Demandeurs d'Asile.

                                       Au tribunal de Coquelles

Le Secours catholique diocésain lui demanda d'aller au tribunal de Coquelles pour comprendre le pourquoi et le comment de la mise des migrants en centres de rétention.  Un an plus tard, il est responsable du doyenné de la Morinie. De là il arrive au conseil d'administration diocésain et à la commission communication. C'est à cette époque qu'une nouvelle structure fut créée au Secours catholique, à mi-chemin entre doyennés et diocèse : les EAT. Le diocèse d'Arras fut partagé en cinq régions ou territoires avec chacun une Equipe d'Animation Territoriale composée de  permanents salariés, de personnes « ressources » (ressource migrants, prison etc.) et d'une ou un référent bénévole. « C'est une espèce de décentralisation de la délégation d'Arras, explique M. Lucas. Notre EAT, appelée EAT Saint-Benoît Labre, couvre la région Lys, Béthunois et grand Audomarois. Mon rôle est de visiter les 19 équipes locales, entretenir, relancer des ateliers, des activités telles les épiceries sociales, les ateliers convivialité, les groupes de correspondance avec des détenus en prison, les partenariats avec des pays émergents, les camps de vacances Jeunes (au Togo pour notre diocèse), les Vacances en famille, l'accueil de jeunes enfants de familles démunies durant les congés scolaires etc. ».

 

 

 

 

 

 

                            Les migrants de Calais : un éclairage nouveau

 

 

Migrants Migrants   Alain Lucas fait un parallèle entre les migrants de Calais et les demandeurs d'asile de l'association lilloise, Aida dont il est membre.

 

«Aida est, pour moi, le type même de ce que devrait être un accueil de jour pour migrants ou sans-papiers. »

Dans le local acheté par Emmaüs, près de Wazemmes, il y a six ans environ, la directrice est une médiatrice humanitaire. Dotée d'une licence de droit et d'un DESS en projets humanitaires, elle a la compétence pour l'établissement de papiers destinés à ceux qui n'en ont pas. « Si, à Aida, viennent surtout des gens de pays de l'Est ou du Maghreb qui cherchent à s'installer en France, en fait, à Calais, à côté de ceux qui veulent toujours rejoindre l'Angleterre il  en est aussi qui s'installeraient volontiers en France ou dans un autre pays de la communauté européenne. Parmi eux se trouvent, notamment chez les Érythréens et les Soudanais, des enseignants, des médecins, des gens diplômés.

Débrouiller les papiers mais aussi permettre de se doucher, de manger, laver son linge, se mettre au chaud, c'est cela Aida.  Or, se poser, se reposer, entrer en communication avec des gens de chez nous, livrer un peu de son passé et les raisons de son départ, faire, surtout, le point sur le lieu où on voudrait aller, c'est ce qui manque à tous ces migrants de Calais et environs. Des migrants de plus en plus jeunes, qui sont « en errance ». A Calais, il y a donc ceux qui veulent franchir la Manche mais pour beaucoup d'autres la première réalité est qu'ils ont fui leur pays et ne veulent pas y retourner.  Et s'ils trouvaient abri et conseil dans un bon centre d'accueil... et d'orientation ? »

 

Article publié par Chantal Guyot - Saint Benoît en Morinie • Publié • 3672 visites