LAPUGNOY

Images et Récits du Patrimoine Religieux

 

Eglise de Lapugnoy Eglise de Lapugnoy  Eglise de Lapugnoy

Nous vous proposons de relire un document écrit il y a quelques années par notre précèdent curé, M l’abbé Decoopman.

Quelques repères historiques

Au temps où Napoléon III ,après avoir été élu démocratiquement président, était devenu empereur des français (1852-1870), commençait l’industrialisation. La découverte des mines de charbon transformait les villages et les villes du Nord-Pas-de-Calais. La population se déplaçait vers les nouveaux centres de travail.

Le long de la route qui va de Chocques à Marles, des maisons, des industries se mettaient en place et le centre du village, originairement situé aux environs du cimetière actuel se déplaçait vers l’ouest.

Comment a été financée la construction de l’église !

Monsieur du Haÿs, qui faisait partie en même temps des différents conseils du village, autant municipal que paroissial, se rendait bien compte que la petite église en partie en bois et très délabrée ne suffisait plus pour accueillir les nombreux pratiquants (les temps changent !). L’ancienne église se situait au cimetière, à l’emplacement actuel de la chapelle récemment rénovée par la commune. (la maison tout proche était le presbytère). Il proposa donc de construire une nouvelle église plus grande et surtout plus centrale.

Il fit don du terrain situé entre « La motte » et la rue principale et le conseil paroissial offrit une somme de 10000 francs-or ainsi que 2000 francs-or , argent légué par Mademoiselle de Foucauld, décédée en 1858 et qui était apparentée à M du Haÿs. Cette donation fut enregistrée en l’étude de Maitre Richebez, notaire à Béthune, le 29 septembre 1862.

La commune vendit des arbres pour 5000frs et une souscription auprès des habitants de la commune fournit 4000frs. L’état et le département donnèrent 8000frs. Les impôts locaux prévoyaient de fournir 1000frs par an sur 11 ans, soit 11000 frs. Le devis total s’élevait à 40000frs-or uniquement pour le bâtiment

M Grigny, architecte, présenta un plan. L’église aurait une longueur de 40m et une largeur de 17m. Le clocher, initialement prévu pour une hauteur de 42m fut ramené à 35m.

L’accord fut signé par Mrs Lemaire, Raoult, Vasseur, Toursel, Dépretz, Bourdon, Bouchart .

Il ne restait plus qu’à acheter les cloches, les vitraux et le mobilier.

Et c’est le 8 juillet 1869 que l’évêque d’Arras, Mgr Lequette, vint bénir la nouvelle église de Lapugnoy. Il fut reçu par M l’abbé B.Bonnet, curé de la paroisse (1845-1881). Il félicita les conseillers des différents conseils et tous ceux qui avaient à cœur la construction d’un si beau bâtiment.

Réalisation

M Grigny, l’architecte avait présenté un plan ; c’était celui de l’église de Vendin-les-Béthune qu’il venait d’achever en 1859 : construction en briques des murs et du clocher, frise avec dessin en écaille, orientation vers l’est, comme c’était la coutume autrefois.

La municipalité de Lapugnoy et les conseillers paroissiaux trouvèrent qu’il fallait faire plus grand pour une population à l’époque plus nombreuse que celle de Vendin. De plus, le terrain donné par M du Hays est en pente depuis la Motte jusqu’à la Clarence. Il fallait donc orienter le bâtiment d’une autre manière. C’est ainsi que le chœur de l’église est dirigé vers le nord-ouest, le portail et le clocher donnant directement sur la route principale.

Le style et l’architecture sont semblables à ceux de Vendin, avec une différence importante : les voutes sont en briques et non en plâtre, ce qui mériterait d’être mis en valeur. Entourée de deux bâtiments de même style ; l’école Notre-Dame et l’école de musique, l’église présente un ensemble harmonieux complété par la mairie et le presbytère qui sont de même facture.

Avec d’autres bâtiments privés qui ont repris certains éléments décoratifs de façade, cela donne un style punéen à notre centre ville.

M du Hays avait demandé qu’une chapelle puisse communiquer avec le chœur et soit réservée à sa famille. Elle se trouve en face de la sacristie. Cette chapelle est maintenant utilisée pour des messes et des célébrations en petits groupes, en particulier en hiver car l’église, malgré les travaux de la municipalité reste difficile à chauffer. On peut voir dans cette chapelle plusieurs plaques de marbre au nom de la famille Du Hays et d’après les dates, elles ont du être ramenées de l’ancienne église. L’une rappelle le souvenir de trois enfants de la famille morts en 1824 en l’espace de dix jours suite à une épidémie qui a du aussi frapper l’ensemble de la population enfantine de Lapugnoy.

Il est vraiment dommage que l’on doive laisser les églises fermées pour éviter les vols, les dégradations et le manque de respect et rares sont les églises qui restent ouvertes sous la surveillance discrète de bénévoles. Qu’ils ou elles en soient grandement remerciées.

A Lapugnoy, le mercredi, l’église est souvent ouverte, vous pouvez y amener vos enfants quelques minutes, ils ont droit aussi à leur part de la beauté de notre patrimoine. Les cathédrales, les églises et les chapelles étaient autrefois comme une bible ouverte pour les personnes qui ne savaient pas lire.

Continuons à faire connaissance avec notre église. Les enfants et même des adultes demandent à monter dans la clocher. Ce n’est pas facile et de nombreuses araignées et autres bestioles défendent jalousement leur territoire. Aussi voici quelques renseignements. A l’avenir, peut-être aurons-nous d’autres détails à y ajouter.

 

 

Le carillon :

Monsieur l’abbé Bonnet n’a pas vu l’église terminée. Il y avait bien un clocher, mais les cloches étaient absentes. Les notables et la population avaient fait un gros effort pour la construction de l’église, et l’argent devait manquer. D’après les inscriptions sur les cloches, il fallut attendre dix-sept années pour que son successeur, Monsieur l’abbé Averlant, ait la joie de bénir et d’entendre sonner enfin les deux premières cloches. La plus grosse, montée en 1886, mesure à la base 1m22 de diamètre et le poids de bronze est estimé à 1140kg.La petite a été coulée aussi en 1886. Elle mesure 0.99m de diamètre et peut peser 620kg.

La moyenne, placée entre les deux autres en 1887 mesure 1m07 et pèse environ 760kg. Elle est la seule à porter les noms des fondeurs : Drouot et Neveu, fondeurs à Douai.

Le poids total des trois cloches est estimé à 2 tonnes et demie.

Etant donné leur différence de poids, la fréquence des battements est également différente. Mais, environ une fois par minute, elles sont toutes trois du même coté.. Multipliez le poids total par trois et vous aurez la tension provoquée dans le clocher lorsqu’elles sont en mouvement : soit plus de 7 tonnes lancées en pleine volée.

Inscriptions.

Les cloches portent souvent le nom du donateur ainsi que celui des parrain et marraine. L’escalier pour se rendre au dernier étage du clocher est assez périlleux, nous avons donc fait le nécessaire pour y trouver toutes ces inscriptions.

Pour la grosse cloche : En l’an de grâce mil huit cent quatre vingt six , je fus donnée par messire Geoffroy Marie Alphonse Auguste du Hays Dame Marie Charlotte Joseph de Foucauld son épouse, châtelains du Mont Eventé, commune de Lapugnoy. Mes parrain et marraine, Alphonse Marie François du Hays et Jeanne Mélanie Thérèse Ferault de Falandre m’ont donné pour noms Alphonsine Charlotte Marie Jeanne. Je fus bénie par Paul Averlant curé de la paroisse Saint Vaast de Lapugnoy

La petite cloche : En l’an de grâce Mil huit cent quatre vingt six, je fus donnée à l’église Saint Vaast de Lapugnoy par Monsieur l’abbé Paul Averlant curé de la paroisse et fus bénite par lui. J’ai pour parrain et marraine Messire Louis Omer Amédée Georges Le Sergeant de Monnecove et Mademoiselle Cécile Marie Jacqueline Le Sergeant de Monnecove, châtellains de la Vasserie, commune de Lapugnoy, qui m’ont donné pour nom : Paule Louise Cécile Marie Joseph.

La moyenne : J’ai été bénite en 1887 par M. Paul Averlant curé de Lapugnoy. Je m’appelle Henriette Charlotte. J’ai eu pour parrain Gustave Louchart et pour marraine Marie Legrand. M. Henri Louchart étant maire. Conseillers municipaux : MM.F.Raoult, Aimé Viez, Castellain Roger, Pruvost, Du Hays , Bout, Brige, Bouchart, Toursel. Fondeurs : Drouot et Neveu, Douai.

Les vitraux du chœur

Les verrières des cathédrales sont renommées et quand la guerre menace, on se presse de les démonter et de les mettre en lieux sûrs. Les vitraux de Chartres ou de la Sainte Chapelle à Paris donnent en couleur des pages entières de la Bible et sont irremplaçables.

Dans le chœur de notre église nous découvrons six vitraux figuratifs. Au centre bien sûr, le Christ qui porte le dessin du cœur pour nous dire : « Je vous aime ». Prés de lui, sa mère, la Vierge Marie. En bas de ces deux fenêtres, nous voyons deux blasons avec la couronne de vicomte, signature de deux familles du Hays. L’une est la famille du Hays de Foucauld dont la plaque funéraire se trouve dans la chapelle.

De chaque coté, à gauche Saint Joseph, à droite Saint Vaast patron du diocèse et de la paroisse. Ici la signature est donnée par deux lettres majuscules, initiales de l’abbé Bonnet, encadrées d’un calice et d’un ciboire. Ce vitrail de Saint Joseph a souffert de la guerre. Monsieur l’abbé Lejosne l’a fait réparer, mais le travail a été mal fait et la perspective du carrelage n’a pas été respectée. Le calice et le ciboire ont été remplacés par des losanges d’un bleu trop moderne.

Puis de nouveau à gauche Saint Nicolas avec les trois enfants qu’il aurait ressuscités (selon la légende) et à droite Sainte Catherine. Il y a plus de cent ans on célébrait davantage la fête de ces deux saints et sainte protecteurs des garçons et filles. Mais, à l’image de l’Amérique, la fête de Saint Nicolas a glissé vers Noël et il est devenu le Père Noël, sauf en Alsace-Lorraine où il est resté très populaire. Là aussi les donateurs ont placé leur blason ; un blason unique pour Saint Nicolas, don d’un célibataire, deux blasons avec la couronne de marquis pour Sainte Catherine. Nous remercions la municipalité (de l’époque) qui a fait réparer le vitrail de Saint Nicolas qui avait beaucoup souffert des tempêtes.

Que représentent les blasons ?

Un blason représente en miniature le bouclier qui protégeait le chevalier. Le dessin, appelé les armes, permettait dans le combat de reconnaître la personne qui portait un casque avec une visière qui lui cachait tout le visage. Le blason de la famille du Hays est : de trois épieux droits sur une surface noire. Le blason de la famille de Foucault est : d’un lion fauve (rouge) debout sur une surface dorée (jaune). Dans le cas de deux blasons, celui de gauche (pour nous en face) est celui du mari, celui de droite est celui de l’épouse. Pour ceux qui les portent c’est l’inverse, le mari se trouve à la droite de son épouse.

Vitraux de la nef

Après le coté gauche de la nef, relativement classique, où les cercles des vitraux nous conduisent de la naissance de la Vierge Marie jusqu’à son Assomption et son couronnement dans le ciel, tournons-nous vers la droite de la nef où cinq autres figures viennent compléter notre parcours.

<!  Prés de l’entrée, l’artiste a donné libre cours à son imagination. Nous voyons saint Joseph faire sa demande en mariage ; Marie lui répondant en montrant le ciel comme pour lui dire qu’elle s’est donnée entièrement à Dieu.

<!  Ensuite, l’ange Gabriel, envoyé par Dieu, a porté l’annonce à Marie. Elle a accepté l’honneur et la joie d’être la mère du Fils de Dieu. L’ange demande à Joseph de prendre Marie pour épouse et d’être le père adoptif de l’enfant à naître. L’artiste a imaginé un mariage au temple de Jérusalem en présence du grand prêtre.

<! Ici nous retrouvons l’évangile ; la nativité du Christ, fêtée le 25 décembre, avec Marie, Joseph et l’enfant Jésus dans la crèche à Bethléem.

<!  Jésus au milieu des savants et des enseignants. A l’âge de 12 ans, c’est son premier pèlerinage à Jérusalem et l’émerveillement d’être dans la maison de son Père. Il en oubliera le jour du retour à Nazareth où il habite maintenant.

<!  Jésus, le fils du charpentier dans l’atelier de Joseph. Comme tout garçon, en ce temps-là, il apprend le métier de son père. Marie regarde et conserve le souvenir de tous ces événements dans son cœur. Elle saura en faire le récit à l’évangéliste saint Luc, qui, à la demande des premiers chrétiens, écrira ces années de préparation à l’annonce de l’Evangile.

Ces petits tableaux sont comme un livre de catéchèse en couleur. Sachons, comme tous ceux qui sont passés avant nous dans cette église depuis140 ans, prendre le temps de les contempler et comme Marie de les méditer dans notre cœur.

 

Tempête dans un verre d’eau

Nous vous décrivons ici des événements qui se sont déroulés dans des temps anciens et dont personne de vivant à Lapugnoy n’a pu en être le témoin. N’y voyons ici aucune animosité. C’est de l’histoire, c’est tout !

Commence d’abord la confiscation de tous les biens de l’Eglise. Donc, encore maintenant, la commune est propriétaire de l’église avec l’obligation d’en laisser l’utilisation exclusive à la communauté chrétienne de Lapugnoy.

Le 13 décembre 1906, par un arrêté préfectoral, la paroisse de Lapugnoy se voit spoliée de tous ses biens par un avis adressé au « conseil de fabrique », ancien nom du conseil paroissial, actuellement équipe d’animation paroissiale (EAP) ; « Sont placées sous séquestre à partir de ce jour… les biens de toute nature ayant appartenu à la fabrique (Conseil paroissial) de l’église de Lapugnoy et notamment les biens suivants :1) valeurs mobilières- 2) Rentes sur l’Etat- 3) Propriétés immobilières… (ce qui rend de fait la commune propriétaire et responsable du bâtiment église)

Mais quelques années plus tard, le mobilier contenu dans l’église de Lapugnoy a été restitué. Nous vous en donnons dans ses grandes lignes toute l’histoire tirée des archives paroissiales et des documents en notre possession.

Le 20 octobre 1909, un mémoire déposé par M De Rainvillers pour la restitution des objets renfermés dans l’église de Lapugnoy est adressé à M le Préfet.

Le 8 octobre 1909 un autre mémoire déposé par M Alphonse Du Hays avait été aussi adressé à M le Préfet en vue de la restitution de ces biens. En effet, les familles Du Hays et De Rainvillers étaient les donateurs de ces biens mobiliers.

Suite à ces demandes il y eut délibération du Conseil Municipal de la commune dont voici le compte rendu.

« L’an 1909 , le 30 octobre à 6 heures du soir, le Conseil municipal de la commune, assemblé au nombre de 13, en session extraordinaire sous la présidence de Aimé Vietz, maire … de Raoult (1er adjoint), Caron, Diéval, Emile Blond, A Du Hays, François Lefebvre, Bouchart Cyr, Genel , H. Pottiez….

Monsieur le Maire communique au conseil municipal les mémoires de revendication des objets mobiliers placés dans l’église de Lapugnoy présentés par M A. Du Hays propriétaire demeurant au château du Mont Eventé et de M de Rainvillers. Il invite l’assemblée à se prononcer sur la valeur de ces réclamations. Après délibération, le conseil municipal reconnait que ces objets revendiqués ont été donnés pour l’exercice du culte par les familles citées et que leurs héritiers sont en droit d’en réclamer la restitution et qu’ils doivent en avoir la pleine et entière propriété. Le conseil engage M le Maire à en informer M le sous-préfet pour dégager la commune de toute responsabilité dans l’avenir quant à l’entretien, la conservation et la garde de ces objets.

Le 8 décembre 1909, M le Maire de Lapugnoy envoyait cette lettre à M du Hays ;

Suite à la délibération du conseil municipal……..conformément aux instructions de M le Sous-Préfet….

Je vous avertis qu’à partir de ce jour la commune de Lapugnoy décline toute responsabilité au sujet de la garde, l’entretien et la conservation des objets dont vous revendiquez la possession…..

L’affaire ne sera réglée définitivement qu’en avril 1910 avec la restitution définitive du maître autel, des bancs , des statues et autres meubles..

Par contre, les dalles funéraires de la famille Du Hays se trouvant dans la chapelle latérale à gauche du chœur restent la propriété de cette famille.

La vierge de calvaire en bois peint du XVIème siècle, qui se trouvait autrefois sur la place de Lapugnoy dans la chapelle de Notre-Dame de Grâce et que M le Maire de l’époque a fait déposer dans l’église après la destruction de cette chapelle pour l’agrandissement de la place est maintenant accrochée à gauche en entrant dans l’église. Cette chapelle détruite de peu de valeur architecturale était une fondation du syndicat agricole et avait été restaurée en 1914.

La vierge du XVIème siècle ainsi que les dalles funéraires relèvent des monuments historiques et sont protégées officiellement par les Beaux-Arts. Actuellement ces objets ne peuvent être déplacés et modifiés sans une autorisation préfectorale. Le conseil paroissial avait débattu de ces questions lors d’une assemblée du 13 janvier 1975.

D’après un document écrit par M l’abbé Decoopman

En 2012 la peinture intérieure de l’église et le carrelage du chœur ont été réalisés par la commune et la paroisse.

Les travaux ont duré 3 mois. Il a été aussi amélioré la sono et l’éclairage. Après l’achat récent du nouvel orgue, les statues ont été aussi toutes remises en couleur par un spécialiste.

On ne peut que se réjouir d’avoir une si belle église, héritage de nos ancêtres et entretenu au cours du temps.

N’hésitez pas à la visiter lors des célébrations et en particulier lors du marché de Noël.

 

Article publié par Paroisse Sainte Trinité sous Roquelaure • Publié • 5617 visites