L'impact du synode
Des voies pour la pastorale paroissiale
L'abbé Laurent Boucly, curé de la paroisse Saint-Benoît-en-Morinie et doyen de la Morinie, a participé aux travaux du synode provincial, à Merville.
Il nous livre quelques unes de ses réflexions sur le synode lui-même et son impact sur la pastorale à venir.
« J'ai en tête, comme première leçon de ce synode, le fait qu'il y avait, d'entrée, des opinions, des points de vue très ciblés, très différents. Mais si, au début, certains points de vue étaient un peu revendicatifs, peu à peu, même s'ils sont restés confrontés à d'autres, ce le fut dans un climat de plus en plus paisible. Les uns et les autres n'ont pas forcément changé d'avis mais il y a eu une réelle écoute, une réelle attention ; une qualité d'écoute qui a grandi au fur et à mesure des rencontres. Au niveau de la pastorale dans nos paroisses, j'en retiens qu'il faut un « itinéraire » où les points de vue puissent se confronter et que, sans en arriver à une cohésion molle, qui plaise à tout le monde, on puisse s'écouter, reconnaître le point de vue de l'autre. Il y a quelque chose de l'Eglise « présente » dans cette évolution. Une communauté paroissiale est faite de personnes d'âges différents, de styles et vécus spirituels et humains différents. De ce fait, il peut y avoir des oppositions dues au poids de la crainte de ne pas être reconnu mais aussi à l'ignorance de l'autre. Un travail de communion est alors à réaliser. Le synode a montré, à ce niveau-là, une voie intéressante ».
Une autre notion de l'autorité
L'abbé Laurent évoque ensuite une autre évolution, une autre voie, au niveau de l'autorité, des « autorités » :
« Même s'ils sont intervenus sur certains points de détail, même si c'est eux qui présentent le texte final à Rome, nos évêques ont laissé le synode avancer avec sa propre dynamique. Cette autre dimension synodale m'a frappé : on donne la matière de la réflexion à un groupe ; on le laisse travailler. On l'accompagne dans sa recherche mais, en même temps, on écoute ce qu'il a à dire avant de prendre des décisions. Prenons, par exemple, l'assemblée générale de la paroisse : avant de prendre telle ou telle orientation, il faut que la discussion puisse se vivre dans l'écoute mutuelle. »
Il va encore plus loin quand il rappelle que la formulation du vote final, à Merville, n'a pas été : « êtes-vous d'accord avec ce qui a été dit et écrit » mais « êtes-vous d'accord pour dire que le texte final représente bien le travail du synode ». Il en tire comme autre leçon qu'être participant à la vie de l'Eglise n'est pas être d'un groupe de pression qui tient à faire avancer son point de vue mais être au service d'une dynamique plus globale : «Pour un prêtre aussi, c'est important. On est sur une paroisse pour six, huit... neuf ans ? Comment se faire serviteur d'une dynamique et, en même temps, apporter sa note, mais que sa note. »
Regard : Dans quel état d'esprit êtes-vous revenu de ce synode ?
« Je suis revenu du synode avec la conviction que je n'avais pas à attendre de solutions miracles mais des méthodes. A ce sujet, un témoignage m'a interpellé, celui d'un prêtre de Lille qui est allé en ministère dans le Nord Canada. Il nous dit s'être retrouvé dépossédé de la possibilité d'organiser lui-même son temps. Il répondait à la demande, se mettait à la disposition de.... Dans les années qui viennent nous, prêtres de ce diocèse, seront appelés à fonctionner comme lui. Des communautés n'auront pas forcément le ministère d'un prêtre mais il faudra, cependant, qu'elles s'organisent pour vivre. Pratiquement, des équipes de vie locale inviteront, par exemple, leur curé à un après-midi de visite pastorale, à venir célébrer une messe chez une personne âgée etc... Le prêtre vivra ainsi sa vie de prêtre au service de la communauté. Cela renversera la perspective actuelle : ce n'est plus le prêtre qui organise une pastorale, même avec son EAP, mais c'est au niveau local que s'organise la vie de la communauté. »
Le père Laurent pense aussi qu'il est nécessaire, comme dit le pape François, d'entrer dans une dimension missionnaire, un dynamisme, mais qui ne soit pas forcément issu d'une centralisation telle un « centre-ville » par rapport à ses alentours, surtout s'ils sont ruraux. C'est ce qu'il appelle la notion de subsidiarité : « le centre-ville paroissial ne doit qu'apporter l'aide nécessaire pour que le lieu éloigné vive en autonomie. Les communautés locales ont leur histoire, leurs réalités. Par subsidiarité j'entends ne pas infantiliser les communautés, même si je ne désire pas voir revenir l'esprit de clocher. Les communautés chrétiennes, tout comme les mouvements d'action catholique, les petites équipes, ont à vivre leur dimension missionnaire là où elles sont. Qu'elles s'ouvrent à leurs réalités locales, qu'elles s'étendent dans les ramifications sociales où elles vivent ! Mais, entre toutes les communautés locales, les équipes et mouvements, il y a des liens à tisser. Quand la mission ouvrière et l'ACE, se joignent, par exemple, à la communauté « territoriale » au « Relais* », ils se revitalisent l'un l'autre ».
En conclusion, l'abbé Boucly retient qu'il lui faut faire, en tant que prêtre, « une transformation, une conversion personnelle. C' est en laissant chacun être touché par l'Evangile, c'est en essayant de mettre les uns et les autres ensemble, que l'Esprit va pouvoir susciter des pistes nouvelles. Le ministère du prêtre doit veiller à cette œuvre de l'Esprit Saint au sein des communautés. Bien sûr, restera le nécessaire équilibre entre la liberté du groupe et la mission de coordination de l'Eglise. »
(extrait de Regard en Marche)
(propos recueillis par Jean-Paul Chavaudra)