Lectorat et acolytat de Jean-Michel, Nicolas et Bruno
Chapelle de la maison diocésaine Saint-Vaast, Arras
Homélie de Mgr Jean-Paul Jaeger
Nous célébrons habituellement les ministères institués du lectorat et de l’acolytat de façon assez discrète parce qu'il faut reconnaître qu'il est difficile de bien faire comprendre au peuple de Dieu pourquoi ces ministères ne sont conférés qu'à ceux qui deviendront diacres et prêtres. Car, en fait, ils ont une signification en eux-mêmes. Déjà le pape Paul VI, saint Paul VI, souhaitait qu’une réflexion soit menée pour que ces ministères soient étendus dans l’Église.
De fait, pendant ces temps de confinement, nous avons été privés du rassemblement eucharistique dans nos églises. Beaucoup d’hommes et beaucoup de femmes se sont retrouvés, par les circonstances, lecteurs et acolytes. Dans les familles, dans les maisons, nous avons continué à écouter, à méditer et à vivre la parole de Dieu. Les pères de famille, les mères de familles se sont en quelque sorte trouvés dans cette situation de responsabilité d’une annonce plus explicite de la Parole de Dieu.
Il en était de même pour la prière. Nous avons peut-être retrouvé dans nos familles, dans nos cercles personnels, la mission que nous avons de prier. Il ne s’agit pas simplement de répondre à l’appel des évêques, des prêtres et des diacres quand nous nous retrouvons dans nos églises. Mais la prière est une réalité de notre quotidien. Il est important que l’on puisse être guidé et éclairé. La prière est accompagnée quelquefois de la réception de l’eucharistie quand il n’est pas possible de la célébrer pleinement dans le sacrement que nous connaissons et qui nous est familier.
C’est dire que l’étape que franchissent aujourd’hui nos trois amis est une étape qui vaut pour toute l’Église. Et sans doute pourront-ils mieux aider, dans les temps qui viennent, celles et ceux qu’ils rencontreront à découvrir l’essentiel que constitue pour nous la Parole de Dieu liée étroitement à l’eucharistie dans la célébration complète du sacrement, ou bien dans la communion lorsqu’elle est seule possible.
Une troisième dimension qui va toujours avec les deux premières, c’est le service du frère, c’est l’entrée de la Parole de Dieu, l’entrée de la prière, l’entrée de l’eucharistie dans l’existence du quotidien. Jésus lui-même vient de nous rappeler la force de cette présence dans les réalités humaines. Lorsqu’il nous dit que pas un seul cheveu de notre tête n’est oublié, que toute l’existence humaine vaut bien plus dans le cœur et dans l’amour de Dieu que la splendeur de la Création que nous pouvons contempler. Je ne sais pas ce qu’en disent les écologistes… Mais acceptons l’image que le Seigneur lui-même nous donne parmi ces beautés que Dieu nous veut, que Dieu nous choisit. Il les veut tellement, il les choisit tellement qu’il n’hésite pas à envoyer son propre fils lorsque le mécanisme relationnel entre lui et l’humanité, et entre les êtres humains eux-mêmes, est faussé, est cassé. Lorsque l’être humain, dans notre réalité quotidienne, dans notre vie sociale, est oublié, abandonné, lorsqu’il souffre, lorsqu’il est rejeté, le Seigneur nous invite toujours à le reconnaître comme une splendeur, la splendeur qui est le fruit de son amour.
Et nous mesurons ce soir combien cette parole peut être forte lorsque l’on est touché par un deuil particulièrement douloureux. C'est aussi pour Sophie que le Seigneur prononce cette parole. Elle est toujours à ses yeux, comme elle est à nos yeux, la splendeur de Dieu plus belle que les fleurs des champs, plus belle que tout ce que nous pouvons réaliser. Et de cela nous sommes témoins.
Il est bon peut-être que l’Église le redise particulièrement, même si ça devrait être de façon plus étendue, à ceux qui vont être, nous l’espérons bien, dans quelques mois, ordonnés diacres. Il est bon aussi de nous le redire pour nous inviter à vivre de façon permanente cette insertion de la Parole de Dieu dans nos vies, dans nos cœurs, dans l'histoire de l'humanité et pour nous tourner vers Dieu dans la prière et l’accueillir dans l’Eucharistie.
Tout cela, nous le comprenons mieux peut-être en ces temps difficiles. Nous avons dû remettre en question beaucoup de nos habitudes. En quelques semaines, les échelles de valeur ont été terriblement bousculées. Ce n’est pas une vengeance de Dieu, mais c’est un appel à retrouver ce qui est essentiel, ce qui est important, ce qui est fondamental, ce qui est beau, ce qui est grand et ce qui mérite qu’on le mette en premier. Oui, nous avons un prix immense aux yeux de Dieu. Chacun et chacune d’entre nous, et nous tous ensemble, nous avons une valeur inestimable. Nous croyons que la parole de Dieu, la prière et l’eucharistie nous introduisent au cœur de ce mystère d’amour. Avec Jean-Michel, Nicolas et Bruno, ce soir, nous prenons conscience que le seigneur vient à notre rencontre et qu’il redit son amour fou à notre humanité.
Quelques images de cette célébration en suivant le lien ci-dessous :