Conseil permanent épiscopat et élections
Elections : un vote, pour quelle société ? Eléments de discernement.
Assemblée générale des évêques de France 2009 Durant les prochains mois, notre attention sera largement sollicitée par la préparation des élections présidentielles et législatives.
Ces temps que nous traversons sont des temps de crise. Une crise globale touche tous les pays occidentaux depuis plusieurs dizaines d'années. Ce n'est pas une particularité française. Les effets de la crise financière mondiale qui s'est accélérée en septembre 2008 sont loin d'être épuisés. Ce déséquilibre s'est ajouté aux difficultés sociales et politiques qui sont les conséquences de la transformation profonde et rapide de nos sociétés et de toutes les structures qui organisent notre vie sociale.
De nombreux facteurs de transformation se conjuguent.
Trois d'entre eux méritent, selon nous, de retenir l'attention de tous ..."
Communiqué de presse Paris, le 3 octobre 2011
Message du Conseil Permanent de l’Episcopat à l’occasion des Présidentielles 2012
« Elections : un vote pour quelle société ? »
Le Cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris et Président de la Conférence des évêques de France, a présenté ce lundi 3 octobre un message du Conseil Permanent de la CEF en vue des élections présidentielles et législatives à venir.
Titré « Elections : un vote pour quelle société ? », ce texte situe l’échéance électorale dans le contexte d’ «une crise globale (qui) touche les pays occidentaux depuis plusieurs dizaines d’années ». Sont abordées les transformations qui affectent différents domaines dont « le développement des techniques scientifiques », « la fin d’une certaine homogénéité culturelle de nos sociétés », et la montée d’un individualisme qui « finit par dissoudre la vie sociale dès lors que chacun juge toute chose en fonction de son propre intérêt».
Dans un appel à la confiance, et rappelant «la haute importance que l’Eglise, depuis ses origines reconnait à la fonction politique», les évêques invitent les catholiques à prendre part au vote «de la manière la plus sérieuse possible». Ils proposent des éléments de discernement pour examiner les projets des partis et des candidats sur différents points qui leur « semblent importants à prendre en compte en vue de ces élections » : la vie naissante, la famille, l’éducation, la jeunesse, les banlieues et les cités, l’environnement, l’économie et la justice, la coopération internationale et l’immigration, le handicap, la fin de vie, le patrimoine et la culture, l’Europe, la laïcité et la vie en société.
Pour aller plus loin, le Conseil Permanent de l’Episcopat propose quelques citations récentes du Pape et des évêques de France. Ces six pages denses et profondes permettront de se situer dans le débat électoral, car « les catholiques n’entendent pas être des citoyens interdits de parole dans la société démocratique ». On aurait tord de considérer ce texte à la simple intention des catholiques. Il redit à toute une opinion publique et aux candidats que voter engage des véritables choix de société.
Mgr Bernard Podvin
Porte-parole des évêques de France
Commentaire paru dans La Croix du 4 octobre 2011
Le ton est nouveau, plus précis Et plus incisif. Il est d'usage que, quelques mois avant les élections, les évêques de France rendent public un texte de réflexion, de façon éclairer les chrétiens sur les enjeux du débat politique à venir. Mais, par rapport au document « Qu'as-tu fait de ton frère ? », publié dans les mêmes circonstances, en octobre 2006, avant l'élection présidentielle de 2007, le texte présenté par le cardinal André Vingt- Trois, président de la Conférence des évêques, «Élections: un vote pour quelle société?»; se veut beaucoup plus concret.
Après une première partie qui dresse le tableau de fond, évoquant la crise économique et le pluriculturalisme qui caractérise désormais la société française, un second volet expose 13 points d'attention, appelés « éléments de discernement », sur lesquels les électeurs chrétiens doivent s'interroger et interpeller les candidats. Avec, pour certains d'entre eux, l'explicitation très claire de ce que l'Église catholique estime essentiel ainsi, le rejet ( impératif») de l'instrumentalisation de l'embryon, la différence sexuelle homme-femme («fondatrice et structurante »), le refus de l’injustice économique (corrections des écarts disproportionnés de richesse «exigée»), la prise en compte de l'immigration (« accueillir au mieux ceux qui se présentent ») ou de la fin de vie (« rejet » de l'euthanasie). II s'agit d'une sorte de «boite à outils » pour l'élection présidentielle : une grille de lecture morale, sur des rubriques précises.
De ce point de vue, le textes des évêques marque pour l’Eglise une nouvelle manière d'intervenir dans le débat politique, qui fait penser aux « points non négociables» souvent énumérés par Benoit XVI lorsqu'il s'adresse aux dirigeants politiques : l'Église ne se contente pas d'une position de principe éthique. Elle aborde les sujets qui lui tiennent a cœur en donnant précisément sa position.
Certes, Comme l'a rappelé le cardinal Vingt-Trois en présentant ce texte à la presse, « l'essence de la politique, c'est la négociation». Donc «on peut toujours dire qu'il y a des éléments non négociables, mais les hommes politiques, eux, sont là pour négocier». Il n'empêche, le président de la Conférence épiscopale note que « des lobbys, même minoritaires, militent pour que l'on légalise un certain nombre de choses». Dans ce contexte, la prise de position dé l'épiscopat est destinée à « alerter les citoyens», « allumer des balises, sur le chemin ardu du choix».
Les évêques prennent acte du nouveau positionnement d'une parole chrétienne désormais minoritaire dans l'espace politique. Dans un monde où les valeurs chrétiennes ne sont pas, et de loin, partagées par la majorité, l'Église ne peut se contenter de présenter les grands principes de la doctrine sociale, mais doit intervenir de manière plus explicite sur tel ou tel point, avec son expertise. Une méthode éprouvée lors de la révision des lois de bioéthique en 2010, par Mgr Pierre d'Ornellas, archevêque de Rennes, qui a présenté sur les questions précises le point de vue de l'Eglise, après un important travail de réflexion en amont.
De plus, l'épiscopat a conscience aussi de la sensibilité nouvelle des catholiques sur certains sujets, notamment éthiques, et de la capacite de mobilisation de réseaux catholiques. Enfin, avec le document, les
évêques commencent à marquer le terrain en cas d'alternance politique, et de projets législatifs concernant des "questions de société”. De fait, si les 13 points abordés concernent aussi les domaines économiques et sociaux, les sujets d'éthique sont particulièrement présents, qu'il s'agisse de la différence sexuelle, de la recherche sur l'embryon, ou de l'euthanasie.
En proposant un texte aussi détaillé, les évêques ont bien conscience d'être sur une ligne de crête difficile à tenir. Fidèles en cela à la tradition politique française, ils se refusent soutenir un candidat en particulier. a Nous excluons totalement de nous situer dans une identification à un parti politique a bien rappelé Mgr Vingt-Trois. Et dans le même temps, il n'est pas besoin d'aller bien loin pour trouver dans les programmes politiques des mesures contrevenant à certaines des exigences formulées par l'épiscopat, notamment les questions liées au mariage, la fin de vie ou l'immigration. L’épiscopat ne veut en aucun cas s'ériger en autorité suprême mais seulement proposer aux Français des éléments de réflexion :
« L'Église n'a pas d'autre puissance que sa capacité de convaincre et son autorité morale, ajoute encore le cardinal Vingt-Trois. La responsabilité pèse sur les électeurs, qui vont devoir arbitrer.
Isabelle de Gaulmyn.