Funérailles de Désiré Marle
Prêtre Ouvrier-. Funérailles le 14 août 2013
Désiré a passé ses années de ministère surtout à Liévin. Il est le premier prêtre ouvrier du diocèse après avoir travaillé à la mine puis à R.C.F.C à Lens et enfin aux Laminoires de Lens et Loison. Sa maladie l'a conduit à l'EHPAD "Les Bonnettes" à Arras où il disait :"Je suis né, et je mourrai à Arras…" Il y est décédé le 11 août 2013 dans sa 88ème année. Beaucoup de ses camarades étant réticents à entrer dans une église, Désiré avait prévu de célébrer ses funérailles, dans un lieu neutre et avec simplicité. Mais il tenait à la participation des prêtres ouvriers du Nord Pas de Calais qui, pour lui, étaient le lien indispensable avec l’Eglise. Les funérailles ont donc eu lieu au Crématorium proche d’Arras le mercredi 14 août 2013. Parmi la centaine de personnes, étaient présents, de manière discrète, le Père Evêque et une dizaine de prêtres. Une célébration aura lieu ultérieurement à l’église du Sacré Cœur de Calonne Liévin.
La célébration de la vie et l’Adieu s’est déroulée en trois étapes.
1 Sa famille.
Les premiers à prendre la parole furent ses proches, sa nièce Myriam qui la accompagné durant sa maladie; elle était relayée par sa famille et Suzanne une de ses amies de longue date venue de Bretagne à plusieurs reprise. Elles rappelèrent que Désiré croyait en l'impossible, que pour lui la mort était secondaire : l'important est le temps présent, ce temps qui est bref. Cette partie s’achève par l’écoute du chant de Florent Pagny : « Savoir Aimer »…. « et s’en aller ».
2 Les camarades du parti politique.
Après la famille, témoignent ses camarades de lutte : Pole de Renaissance Communiste en France.
Vincent :" Désiré fait partie des camarades que j’ai rencontrés quand j’ai commencé à militer. j’ignorais l’existence des prêtres-ouvriers. Je savais que les prêtres existaient, les ouvriers aussi, mais les prêtres-ouvriers, non.
.En 1992, face au procès Honecker, des militants ont décidé d’empêcher cette infamie ; Désiré a été choisi pour présider notre Comité, tant son activité et son autorité tranquille étaient indiscutable parmi nous. Il avait parfaitement compris que le procès Honecker était extrêmement grave contre la souveraineté nationale, puisque cette procédure signifiait que pour la RFA, la RDA n’avait jamais existé. Désiré s’enthousiasmait comme un jeune militant à chaque signature de notre pétition, à chaque lettre d’encouragement, à chaque soutien d’une personnalité
Désiré ne voulait pas laisser faire. Nous ne l’avons jamais vu se mettre en colère, mais nous ne l’avons jamais vu se décourager non plus. La musique de l'Internationale vint rappeler cet aspect du Comité de Solidarité, plus que jamais nécessaire.
Annette ajoute:….. « Nous avons conscience de perdre un homme d'exception, extrêmement fraternel et accueillant. Sa disparition nous accable même s'il est hors de question de baisser les bras tant Désiré était l'incarnation même du courage modeste, de la persévérance, de la confiance en la vie. Désiré a donc complété ses choix syndicaux de classe par un choix politique clair et carré : le Parti communiste français
Les divergences sur la question religieuse n'étaient pas un obstacle, mais faisaient l'objet d'un débat serein et respectueux. Désiré avait même invité G. Gastaud à des rencontres avec les P.-O. du Nord-Pas-de-Calais. Au demeurant Désiré, qui croyait à l'au-delà, ne conditionnait nullement sa vie et le sens de son combat à l'"après". Tout le sens de son existence était au service du peuple, comme c'était aussi le cas de ces P.-O. et grands militants qu'étaient Philippe Toulemonde ou René Déjardin. Après cette intervention, l’assemblée a repris le chant du Chiffon Rouge.
3 Les prêtres ouvriers du Nord-Pas-de-Calais.
Avec Henri Caffart de Liévin, ils entourèrent le cercueil et exprimèrent l'unité fraternelle qui les unissait à Désiré. Une gerbe d'épis de blé, un chiffon rouge, une Bible, un crucifix en bois, la coupe dont il se servait pour célébrer, étaient posés sur son cercueil. Ils ont repris les expressions de Désiré lors du dixième anniversaire de la mort de René Déjardin. Les phrases qui suivent sont donc de Désiré.
…."Il faut savoir nous écouter, nous accepter différents. Entre les croyants et ceux qu'on dit incroyants, il y a une foi commune : c'est la foi en l'homme… Il faut se rejoindre dans nos libertés pour faire l'homme nouveau”.
…. « Cet amour passionné de la vie, René l'a vécu très courageusement dans ces dernières années de maladie et de souffrance. Ses proches ont alors été témoins d'un dur combat pour la vie "jusqu'au bout" qui continuait d'une autre manière ses années d'ouvrier militant et de prêtre.
…Mais ce qui a le plus profondément marqué René, c'est qu'il est devenu ce jeune "Prêtre-ouvrier" que j'ai accueilli à Calonne-Liévin en 1967. Il en avait fallu des évolutions, des préjugés dépassés, des rancunes surmontées, des condamnations vaticanes, des vies brisées, avant que ces deux mots, prêtre et ouvrier, reçoivent un trait d'union reconnu de part et d'autre !
Un temps de prière commença par un texte de contemplation du Christ crucifié, écrite par René Déjardin, dans sa chambre d’hôpital, en juin 1997 : …“Un pauvre regard d'un pauvre homme vers un pauvre Jésus”…
Les prêtres ouvriers ont alors posé leur main sur le cercueil de Désiré passé sur l'autre rive. Ils dirent avec lui, et tous les chrétiens de l’assemblée, le "Notre Père" et le "Je vous salue Marie
Le groupe des prêtres ouvriers du Nord Pas de Calais.
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Texte de la méditation à l'hôpital, devant le Crucifix:
« II est - silencieux -face à mon lit.
Il m'attendait sans doute - au plus fort de la douleur.
Il ne me regarde même pas.
Sa tête est tombée sur sa poitrine et son ventre troué.
Il n'a plus de forces.
Ils lui ont même cassé les deux jambes.
Il ne parle pas. Il est là. Cloué. Dépouillé. Nu. Homme des douleurs.
A l'image de tous les suppliciés de ce monde.
Je n'ai plus la force de lui parler beaucoup...
Dans la nuit en particulier, je lève seulement mon regard vers lui,
mon camarade, mon frère, celui à qui j'ai livré toute ma vie.
Et ma tête retombe.
Un pauvre regard d'un pauvre homme vers un pauvre Jésus.
Je ne le prie même pas pour ma guérison.
Ma prière c'est l'irruption de centaines de personnes dans mon "monastère invisible".
Toutes celles et tous ceux qui n'arrêtent pas de m'aider à vivre.
Cette prière revient en moi comme un boomerang au travers
de ces "Je vous salue Marie" qui jaillissent alors de mes lèvres asséchées.
Pas d'autre formulation que le "Je vous salue Marie" récité
comme un vieux fidèle de l'Islam bredouille ses "Allah akbar"
Une prière de pauvre vers un pauvre supplicié qui n'en peut plus
d'agoniser sur sa croix et qui n'arrive plus à prier non plus.
Voilà la contemplation du Christ crucifié dans cette chambre 223.
Voilà ma prière. 29 juin 1997 »