Veillée pascale à Montreuil sur Mer

Homélie de Mgr Jaeger

Montreuil-sur-Mer Pâques 2009  
Montreuil-sur-Mer
Montreuil-sur-Mer
“Christ est lumière au cœur des hommes,

Christ est lumière au cœur du monde !”.

Dans la nuit de Pâques, les chrétiens ont renouvelé les promesses de leur baptême.

 

Dans le diocèse, 39 adultes ont été baptisés (plus de 3.000 en France).

 

 

L'homélie de Mgr Jaeger: Jusqu'au bout

 

Jusqu'au bout. C'est bien vers ce terme ultime que veulent marcher ces trois femmes qui se rendent de grand matin au tombeau. Il s'est refermé l'avant-veille sur le corps de Jésus de Nazareth. Et ces femmes veulent lui être fidèles jusqu'au bout.
Il manquait un geste à leur indéfectible attachement. En raison de l'ouverture du Sabbat pendant lequel tout travail est formellement interdit, elles n'avaient pas pu, selon l'usage juif, rendre au défunt l'hommage de l'embaumement. Dès que s'achève le temps de la fête, les femmes se précipitent et montrent ainsi que rien ne les séparera du maître qui, selon le belle formule juive, sera réuni maintenant à ses pères. Ces femmes ont suivi Jésus pendant sa vie terrestre. Elles ont écouté son enseignement et ont été subjuguées. Elles avaient confiance en lui. Elles ont été bouleversées par le procès qui lui a été intenté et qui a conduit à la mort infamante et dégradante de la croix.


L'aventure de Jésus sur la terre avait tourné court, et il fallait maintenant se rendre à l'évidence. Les femmes allaient emporter de cette histoire de merveilleux souvenirs. Des encouragement peut-être. Elles en retireraient des forces réelles pour poursuivre la route. Mais maintenant, tout était fini, et il fallait dans une ultime démarche tourner la page.
Nous entrons facilement dans la personnalité de ces visiteuses matinales. De façon régulière ou de loin en loin, comme elles, nous sommes les disciples de Jésus Christ. Peut être même, depuis le mois de septembre dernier, avons nous tiré grand profit de la rencontre avec Jésus dans la lecture de l'évangile selon saint Marc. Cette lecture nous a remis en mémoire des paroles oubliées, des attitudes de miséricorde ou de tendresse, de réconfort qui, peut-être, n'avaient pas résisté à la foule de nos préoccupations quotidiennes et des multiples soucis de la vie. Dieu, le Christ, l'Église peuvent être de bons compagnons de route. Mais, tôt ou tard, ils se heurtent aux impératifs de l'opinion, de la culture, de la pensée dominante et correcte. Sur Dieu, sur l'Église, sur le Christ, se referme souvent la porte de l'oubli, de la négligence, comme fut un jour roulé sur le corps de Jésus, la pierre qui fermait l'entrée du tombeau.


Et voilà que soudain, cette nuit même, la logique, la routine, le conformisme sont bouleversés. Et l'édifice de nos existences tremble sur ses bases. Un messager nous annonce N'ayez pas peur. Vous cherchez Jésus de Nazareth le crucifié. Il est ressuscité. Notre foi est sollicitée. Est-il donc vrai que la mort n'a pas pu garder pour elle celui qui s'est donné totalement par amour? Il s'était laissé condamner et mettre à mort parce qu'il avait fait le choix, lui aussi, d'être fidèle et d'aimer jusqu'au bout.


Les femmes venues au sépulcre étaient bien persuadées que Jusqu'au bout voulait dire pour elles Jusqu'à la mort incluse. Mais le Jusqu'au bout de Jésus Christ va encore plus loin. Il est celui qui triomphe. Il est celui de la vie redonnée par le Père. Celui de la vie plus forte que tout. Plus forte que la mort elle-même. Nous comprenons la peur des trois femmes soudain tremblantes et hors d'elles même. Comment pouvaient-elles croire que celui qui était mort si tragiquement pouvait être vivant ?
Avouons que ce doute fondamental nous habite en permanence. Pas plus que les femmes en question, nous ne verrons de nos yeux le Christ ressuscité tel qu'il a parcouru les routes de la Galilée. Mais comme elles, et avec elles, nous ferons l'expérience de Jésus ressuscité au cœur de notre vie.


Amis qui, cette nuit, allez être baptisés, quel que soit votre âge, amis qui allez être confirmés, amis qui allez participer pour la première fois à l'eucharistie en partageant le corps et le sang de Jésus, je sais que dans votre vie, dans votre cœur, vous avez rencontré la vie et l'amour du Christ ressuscité. Ce Christ ne vous est pas apparu de façon mystérieuse. Mais vous savez déjà que dans vos doutes, il est votre certitude. Dans vos ombres, il est votre lumière. Dans vos interrogations, ils est votre réponse. Dans les peurs, il est votre réconfort. Dans l'épreuve, ils est votre soutien. Être baptisé, croire au Christ ressuscité, ce n'est pas signer une assurance tout risque contre toutes les difficultés de la vie. Croire que le Christ est vivant, c'est percevoir et accueillir dans les faiblesses les pauvretés et les chutes de l'existence, la présence, la tendresse et la puissance du fils de Dieu.


Jésus ressuscité nous introduit déjà dans la vie et dans l'amour qui brisent les haines, les rejets, les exclusions, les jugements et les déchéances.
Amis, même la foi au Christ passé de la mort à la vie, ne peut pas vous dire de quoi demain sera fait. Nous avons parfois de légitimes motifs de craindre pour notre propre avenir, celui de notre famille, de notre planète, de notre humanité. En nous, et autour de nous, se posent des questions fondamentales et nous leur apportons dans ce chemin des réponses au moins provisoires, susceptibles de nous offrir les satisfactions immédiates dont nous avons tellement besoin. Mais sommes nous bien certains que toutes les réponses que nous apportons nous font faire le bon choix? La science, les techniques, les moyens de communication, la mondialisation nous donnent des moyens insoupçonnables, mais plus nous disposons de moyens modernes, plus nous sommes confrontés à de redoutables et lourdes responsabilités. Les capacités les plus pointues, les plus efficaces et les plus performantes, garantissent-elles à tous les coups le bonheur de l'homme. Suffit-il d'être au top des dernières inventions, pour se réussir soi-même et contribuer au bien de tous ?


Oui, nous rêvons tous et toutes d'aller jusqu'au bout de nous-même. Mais pour y parvenir, il ne suffit pas de succomber au chant des sirènes de la consommation, de l'opinion, de la publicité, des avances technologiques. N'avons nous jamais remarqué que les groupes et les systèmes qui nous promettent la liberté sont exactement ceux qui nous rendent petit-à-petit conformes à l'idéologie dominante et nous réduisent finalement en esclavage.


Le Christ, affranchi de la mort, constitue la meilleure garantie de notre propre liberté. Que peut ont craindre de quelqu'un qui a été condamné à mourir comme le dernier des criminel? Et pourtant, c'est lui qui, ce soir, nous appelle à la vie et nous donne la vie. L'Église et ses membres ne sont pas exempts des limites humaines. Nous nous en sommes aperçus au cours des mois écoulés. Pourtant, le Seigneur lui-même constitue cette Église, signe et instrument de cette vie et de cette liberté que Dieu nous donne. Au delà des troubles si bien orchestrés, demandez à l'Église de vous accompagner sur les chemins de la vie qui triomphe de la mort, sur les chemins du Christ lui-même. Jamais, non, jamais, Jésus ressuscité ne viendra brimer et stériliser votre liberté. Il vient nous libérer de toutes les chaînes qui nous enferment et qui étouffent les trésors de la vie qui sont en nous. Ce soir, Dieu en son fils Jésus nous redonne ces trésors et les offrent plus particulièrement à celles et à ceux qui vont recevoir les sacrements de l'initiation.
L'heure est venu pour nous de répondre à la sollicitation du jeune homme vêtu de blanc qui accueille les femmes au tombeau. Il les invite à ne pas monter la garde devant un tombeau vide, mais à appeler les disciples aux rendez-vous de la vie.

Temps convivial Confirmations  
Temps convivial
Temps convivial

 C'était ce jour-là en Galilée, lieu habituel de la vie des apôtres que Jésus avait choisis. Il les retrouverait vivants au cœur de leur propre existence. C'est aujourd'hui dans ce même quotidien, notre quotidien, que le Seigneur vivant vient déjà triompher de toutes les formes de notre propre mort. Nous sommes bel et bien rassemblés ce soir au nom de la vie et au nom de l'Amour. Déjà, avec le Christ, ils triomphent en nous et pour nous.
Alleluia.
 Mgr Jaeger

 

Retranscrits par Jean et Anne-Marie Capelain

 

Lire l'homélie de la messe chrismale

Article publié par Emile Hennart - Maison d'Evangile • Publié • 8846 visites