Ne pas tourner la page !
Communiqué de Mgr Jaeger
Plus de 5000 personnes dans les rues d'Arras, venu munis d'un crayon et/ou d'une pancarte © arras.catholique.frAucune cause ne saurait justifier l’élimination barbare d’êtres humains par d’autres humains. Les circonstances qui ont conduit à la disparition violente de 17 de nos concitoyens sur le sol français ne peuvent que blesser gravement la raison humaine et les consciences personnelles.
Nous ne pourrons jamais nous résigner à la mortelle agression de quêteurs de la liberté, de membres d’une communauté religieuse, de représentants des forces de l’ordre, de citoyens remplissant simplement les obligations de leur emploi.
La communauté nationale s’incline devant la souffrance de membres de familles, de la rédaction d’un hebdomadaire, de frères et sœurs juifs, de proches et de collègues de policiers massacrés dans l’exercice de leurs fonctions, d’anonymes privés soudain de la présence d’être chers qui s’acquittaient des obligations de leur emploi.
Rarement les Français se sont rassemblés avec une telle spontanéité sur toute l’étendue du territoire national. Devant l’adversité, les querelles dont nos concitoyens sont friands et familiers, est réapparue au grand jour la capacité d’unité et de rassemblement tellement nécessaires pour réaffirmer la volonté de mieux vivre ensemble.
L’étonnante concentration de chefs d’Etats et de gouvernements exprime la solidarité internationale avec la France. Elle rend aussi visible la crainte commune et avoue peut-être une certaine impuissance face à un virus qui a pour nom terrorisme et fanatisme. Nous mesurons, aujourd‘hui, à quel point, ce cancer se joue des frontières, des cadres et des institutions qui structurent les états et les sociétés. Notre pays est aujourd’hui touché, mais nous ne pouvons pas oublier les ravages que fait, depuis longtemps déjà, dans le monde ce mal pernicieux.
Arrive plus que jamais le moment de passer de la légitime émotion à la décision, à l’action et à la durée. Cette évolution engage bien évidemment les responsables politiques. Elle n’est cependant possible que par un labeur soutenu, quotidien et solidaire des personnes, des groupes, des institutions, sans aucune exception.
Seuls la rencontre, le dialogue, le respect, le partage, la reconnaissance, la coopération ouvriront des perspectives nouvelles. Tous veulent défendre la liberté. Il faut encore apprendre à la vivre ensemble et la mettre au service de tous.
Une loi peut imposer et faire respecter la liberté d’expression. Aucun texte ne contraindra cependant à la liberté des uns de ratifier tous les effets de l’exercice de la liberté des autres. La juste pratique passe par l’écoute, la parole, le face-à-face. La liberté n’est pas une valeur offerte en kit. Elle est souvent une semence que la famille humaine doit patiemment découvrir, faire grandir, entretenir et protéger. Chacun est responsable de l’utilisation de ce précieux trésor.
Il serait choquant que l’Eglise ne soit pas aux avant-postes de ce travail. Elle n’a pas le monopole de la fraternité. Sa source et sa réalité même sont, cependant, signe de communion. Il lui revient donc, une fois encore, de prendre sa part du tissage des liens humains qu’il est bon et heureux de resserrer. Fidèles et pasteurs de l’Eglise Catholique dans le diocèse, nous sommes particulièrement attendus dans deux domaines : donner dans la vie quotidienne de notre Eglise l’image d’une vraie fraternité, favoriser et renforcer les relations entre les différentes religions.
+ Jean-Paul Jaeger