Neuvaine à Benoit Labre
Dimensions spirituelle et humaine de la démarche, par X.Lemblé
Le week-end des 3 et 4 septembre 2011 clôturait la semaine à Amettes où de nombreux chrétiens se sont réunis pour prier et porter ensemble leur existence : blessés de la vie, familles, malades et handicapés, ministres ordonnés et vie religieuse jeunes ou retraités, etc. La marche des jeunes s'est déroulée le samedi et des confirmations étaient célébrées, rappelant le 250ème anniversaire de la confirmation du saint Benoit Joseph Labre.
Le père Xavier Lemblé à assuré les prédications.
C'est difficile de résumer une semaine. Il y a tellement eu de moments forts. Durant toute la semaine, nous avons vécu de beaux moments de fraternité. Avec les prêtres et les religieux, avec les membres du Rosaire, avec les personnes retraitées, les personnes malade et handicapées, avec les animateurs laïcs en pastorale, avec les personnes blessées par la vie, avec les jeunes. Tout au long de cette semaine, nous avons vécu dans un esprit de famille, comprenant que nous sommes tous frères les uns des autres. Jésus et frère aîné, et il nous introduit dans l'amour de Celui que nous pouvons appeler : Notre Père.
C'est difficile de résumer les rencontres, les échanges et aussi les souhaits que j'ai voulu exprimer pour vos familles. Comme les choses me semblaient compliquées, ce matin je suis venu dans la petite maison, pour demander à Benoît de m'éclairer.
Alors que je priais, croyez-le ou pas, d'un seul coup, j'ai entendu Benoît me parler. Ou plutôt c'était sa famille. La maison était silencieuse, et pourtant, j'ai entendu des pas dans l'escalier. C'était un gamin qui dévalait les marches quatre-à-quatre. Il semblait être en retard pour la messe. Ses parents et ses nombreux frères et sœurs l'attendaient dehors. J'ai entendu d'autres bruits : le crépitement du feu dans la cheminée. Et là, j'ai vu, oui j'ai vu une maman entrain de filer la laine et j'ai vu le berceau d'un bébé. Le père rentrait le bois. On entendait deux enfants se chamailler dans la pièce à côté. Ces deux-là s'aiment profondément, mais ils ne peuvent pas s'empêcher de se taquiner. Il y avait une grande fille qui s'occupait du linge. Il y avait des cris. Des « À table tout le monde » , des « Je n'arrive pas à apprendre ma leçon » et des « Je vous aime mes enfants ». Il y avait des regards, des confiances échangées, des p'tits clins d'œil, des baisers pleins de tendresse. À ce moment-là, j'ai pensé à la chanson de Benabar : quatre murs et un toit. Comme le chanteur, j'ai entendu l'amour qui me parlait.
Un Amour de famille, un amour simple. Et là, je me suis dit que Benoît me demandait de vous dire ceci : « Mes amis, chères familles, ne cherchez pas le bonheur ailleurs que là où il est. Il est dans vos maisons, dans vos familles. Il est dans les combats quotidiens, dans tous les instants. Il est dans les repas partagés, dans les moments angoissant où l'on attend un résultat d'examen. La vaisselle entassée des lendemains de fête, une vaisselle durant laquelle on rit des souvenirs de vacances, on raconte les bêtises d'écolier. Le bonheur est dans le bouquet de tulipes que l'enfant a décapitées ; adieu le beau massif, « C'est pour toi, maman ». Le bonheur, c'est un esprit de famille. Ensemble, on pleure les échecs, les séparations, les départs. Ensemble, on rit. »
Benoît me dit de vous dire que je pouvais m'inspirer de l'image qu'utilise saint Paul quand il parle de l'Église, simplement parce que l'Église est une grande famille. « La famille est comme un corps. Si un membre souffre, tous les membres souffrent. Si un membre est à l'honneur, tous les membres sont à l'honneur ». Il y a solidarité.
Mes amis, aimez votre famille, chaque membre de votre famille. Aimez les familles. Protégez les familles. Que vos enfants y grandissent en paix. Qu'ils y apprennent le respect et le pardon. Le sens du partage et de la simplicité. Construisez sur le socle de l'Évangile. Priez en famille. Que vos familles soient des lieux de sécurité… mais jamais des lieux fermés.
Que les volets soient ouverts. Que les pauvres y aient toujours leur place. Jamais d'exclusion. Si un jour quelqu'un quitte la maison, qu'il entende au moment de franchir le seuil : « Reviens, tu nous manques déjà ». Ne fermez jamais votre cœur, ne restez pas sur une rancune, une jalousie, une bêtise qui bousille la vie. Aimez, pardonnez, aimez toujours. Vous voulez un monde meilleur, vous voulez un monde de paix, fabriquez de la paix au sein de vos maisons. Le monde a besoin de saints et l'on apprend la sainteté dans la maison.
Ne soyez pas des familles cocons. S'il y a du bonheur chez vous, qu'il porte du fruit pour le monde. Agissez ensemble, en famille, avec des amis, pour que vos proches soient plus heureux, Que celles et ceux qui n'ont plus de famille se sentent aimés. Que grâce à vous, ils se découvrent de la grande famille humaine qui a pour père celui du Christ. Ce père qui accueille, embrasse, chérit. Chère famille, aimez le monde. Vivez avec tous, et surtout avec les pauvres, les Benoît d'aujourd'hui, vivez l'Esprit de famille.
Résumé de l'homélie de Mgr Jaeger: l'esprit de famille.
Une famille a une mission, c'est évoquer des joies merveilleuses, mais aussi des soufrances… Pourtant, la famille demeure un lieu fondamental de la vie de l'Église… Dans le diocèse, nous avons les maisons d'Évangile. Le mot Maison est important car la maison est le lieu privilégié de la famille.
La constitution de la famille est un sacrement. Dieu lui donne sa force, sa lumière. La famille c'est d'abord Dieu lui-même. C'est la trinité : Dieu, Fils et Esprit. La Trinité, c'est une famille. C'est dans sa famille que Jésus s'est préparé 30 ans durant, à sa maison, à sa mission.
C'est Marie qui est debout au pied de la croix. Il est bon de rappeler que nous sommes une famille… C'est avec un esprit de famille qu'il nous faut reprendre tel ou tel frère pour l'aider à grandir et en le faisant au nom de l'Amour, on ne rejette pas, on ne condamne pas.
Benoît Joseph Labre a grandi dans une famille et nous savons ce qu'il doit à sa famille. C'est ici, avec les prêtres rencontrés, qui lui ont permis de faire sa communion et sa confirmation que Benoît s'est construit.
Et qu'est-ce que l'Église, sinon une famille ? Un corps ? Nous n'avons pas tous la vocation en famille. Les uns avec les autres, les uns pour les autres, pour construire l'Église, qui est une famille. C'est une famille que le Christ va conduire vers son père et notre éternité sera vie de famille. Voilà pourquoi il est important de porter cette vie de famille. Nous en portons les joies, les peines…
Les évêques de France ont souhaité que nous réfléchissions sur le rôle de nos familles. Benoît a quitté sa famille. Ce qu'il a reçu à Amettes, il l'a vu grandir par la force de l'Esprit saint et par l'Eucharistie.
Baptisés, confirmés, pratiquants de l'eucharistie, nous trouvons là une force extraordinaire pour faire grandir nos familles.
Je ne peux qu'inviter celles et ceux qui n'ont pas été confirmés, à demander ce sacrement. Il n'y a pas d'âge pour partager cette vie de famille en Église. Tous et toutes, nous sommes invités à partager cette sainteté.
Clôture de la neuvaine. Homélie de Mgr Jaeger.
Il faut nous remettre dans le cadre qui servait à Jésus de lieu de prédication. Et de nous souvenir que le peuple de Dieu et le peuple d'Israël qui a été choisi d'abord, attendait la venue du messie. Et il se considérait bien sûr comme le peuple privilégié pour accueillir de façon presque exclusive le Seigneur lui-même. Vous vous souvenez de cette phrase de Jésus qui rappelait qu'il est venu d'abord pour les brebis perdues de la maison d'Israël. Les juifs, notamment les pharisiens, les chefs des prêtres, les scribes, c'est à dire les responsables, vont débouter Jésus dans la seule mesure où ils ont le sentiment qu'il accomplit cette mission au bénéfice du peuple choisi. Mais vous avez bien compris que la parabole que nous venons d'entendre a de quoi faire grincer les dents à ce peuple qui est aimé de Dieu. Car lorsque Jésus parle des invités qui n'étaient pas dignes, il dénonce bien entendu ceux qui se contentent d'honorer le Seigneur, les membres de ce peuple qui acclament le Seigneur, mais qui n'accueillent pas son fils et qui ne laissent pas transformer et changer leur cœur. Et Jésus va rappeler de façon forte, notamment dans cette parabole, qu'il est venu pour tous les hommes. Et même si un peuple a été choisi, de façon privilégiée, c''est pour être signe et témoin de ce que Dieu veut réaliser pour l'humanité tout entière.
Oui, la maison est la maison d'un banquet de noce. Qui de plus beau, de plus chaleureux, de plus vivant qu'in banquet de noce qui exprime la joie et le bonheur des familles qui se rassemblent. Et voilà que les invités à ce repas de noce font la fine bouche et qu'ils n'accueillent pas celui qui est vraiment l'époux, Jésus qui est venu aimer comme l'époux aime l'épouse, comme un époux aime la famille qu'il fonde. Et le Seigneur va nous dire que la multitude qui ne se sentait pas d'abord invitée va réponde à cet amour du Seigneur et va se laisser habiter, transformer, renouveler par ce Seigneur lui-même et fera partie de la famille invitée à vivre la joie permanente, le bonheur et l'amour des noces.
Notre neuvaine se termine et je suis sûr que pour beaucoup d'entre vous, elle est source de grâces, source es dons que Dieu nous réserve de façon quelque fois inconnue à nos propres yeux, à notre propre cœur. Mais notre prière n'est jamais une prière stérile, même si le Seigneur ne l'exhausse pas toujours dans les termes mêmes que nous avons employés pour crier vers lui notre souffrance et notre attente.
Dieu veut nous faire vivre la joie et le bonheur d'aimer. Alors, laissons-le travailler nos vies et nos cœurs pour faire fructifier tous les dons qu'il nous a fait au cours de cette semaine.
Que le Seigneur nous confie maintenant une mission particulière : allez inviter nos frères au repas des noces. Allez leur dire qu'ill y a un Dieu qui nous aime, qu'il y a un père qui nous ouvre les bras, qu'il y a un frère qui a donné sa vie par amour pour eux, qu'il y a une multitude de frères qui avec leurs limites, leurs faiblesses mais aussi avec leur enthousiasme veulent constituer dans notre monde non pas une société où l'on vit en conservateur, en rivaux, en clients, mais où l'on vit en frères et sœurs. Frères et sœurs qui ne sont jamais plus unis que lorsqu'ils célèbrent les noces de l'un ou de l'une d'entre eux. Voilà le projet d'amour de notre dieu pour la multitude de ceux qui ne pensaient pas qu'ils pourraient être un jour invités dans la main du Seigneur et partager le festin des noces.
Mes amis, nous avons à le dire à ces frères et sœurs, nous avons à les inviter parce qu'il y va de leur bonheur, de leur vie, de leur capacité d'aimer et de leur capacité d'être heureux. Je sais, nous avons beaucoup de peine à dire aux autres en qui nous mettons notre foi. Beaucoup de peine parce que nous pensons quelques fois que notre foi est une affaire privée qui ne concerne que nous, qui ne concerne que notre relation intime avec Dieu et qui ne regarde pas les autres. Il ne s'agit pas d'imposer quoi que ce soit à qui que ce soit. Mais comment pourrions nous laisser des frères et des sœurs méconnaître l'amour que Dieu a pour eux. Comment pourrions nous les laisser ignorer qu'ils sont les invités de la famille, qu'ils sont invités à entrer dans la maison de Dieu et de vivre le bonheur des noce que Dieu organise pour la totalité de ses enfants. Il ne s'agit pas d'imposer des règles, des lois. Il ne s'agit pas d'opprimer, de manipuler, il ne s'agit pas d'enfoncer dans la tête des idées, des principes,. Il s'agit de faire découvrir cet amour qui est déjà présent dans le cœur des hommes et que Dieu veut partager avec toute l'humanité.
Quand nous avons une bonne nouvelle à partager. Quand une naissance se produit dans la famille, quand un garçon ou une fille dit qu'il veut se fiancer, quand un jeune a son baccalauréat, lorsqu'il a un emploi, on le crie et on le dit à tout le monde parce qu'on a envie de partager la joie et le bonheur. Et quand Dieu nous invite et quand Dieu vient nous crier aux oreilles et au cœur sont amour, nous nous tairions etnous ne voudrions surtout pas déranger les autres. Déranger avec l'amour, réveiller avec l'amour, secouer avec l'amour, ce n'est certainement pas embarrasser, embêter ou gêner. C'est aider à vivre et à faire vivre.
Mes amis, n'ayez pas peur en quittant cette neuvaine d'inviter, d'appeler, de faire découvrir, de témoigner non pas de ce que nous sommes et de ce que nous voulons faire, mais de l'amour de Dieu pour ses enfants, de sa volonté de nous rassembler autour de son fils Jésus…
Quelque soient les peur, les souffrances et les doutes, nous sommes les messagers et les témoins d'un amour plus fort que tout.
Benoît rêvait d'exercer une mission particulière dans l'Église. Il avait pensé être prête, être moine, avoir un statut dans l'Église. Et grâce à Dieu, il y a des prêtres, pas assez à mon goût, il y a des moines. Le seigneur avait choisi pour Benoît un autre chemin. Sa fonction particulière sera d'être un témoin de l'amour de Dieu. Le Seigneur l'a dépouillé de tout. De tout bien matériel, d'avoir une espérance, d'avoir une place dans nos vies, dans notre monde dans notre société. Benoît a été dépouillé de tout. Dépouillé de lieu, dépouillé d'argent, dépouillé de considérations, dépouillé de la famille qu'il aurait pu fonder, de la profession qu'il aurait pu occuper… Benoît n'avait que l'amour de Dieu. Et c'est cet amour qui l'a rendu heureux et qui l'a conduit sur les chemins. Il en a été témoin. Et il est étonnant de constater comment cet amour a su inviter et appeler tant d'hommes et de femmes que Benoît a rencontrés alors que lui avait le sentiment de chercher Dieu, de chercher encore, de chercher toujours. Il était si riche alors que tout montrait en lui sa pauvreté.
Mes amis, nous sommes moins démunis que Benoît. Mais qu'importe. Dieu nous envoie. Dieu nous demande d'aller inviter nos frères. Vous le ferez dans nos communautés habituelles, dans nos maisons d'Évangile. Vous le ferez dans toute la pastorale que nous allons mettre en œuvre : la pastorale de la famille, le service des frères, la catéchèse, la liturgie et que sais-je encore ? Il y a mille moyens, mille lieux pour inviter, pour préparer le banquet de noce où chacun est aimé…
Chers amis, notre église aujourd'hui est trop petite… Comme je voudrais que l'Église faite des pierres humaines, que l'Église dans notre diocèse soit trop petite pour accueillir tous les hommes et toutes les femmes qui viendrons y chercher, y découvrir l'amour de notre Dieu, partager le repas de noce alors que souvent, ce sont les larmes et les pleurs qui occupent la vie de nos frères isolés, rejetés, abandonnés. Oui, Dieu nous invite à la fête. Ne manquons pas le rendez-vous et n'ayons pas peur d'appeler à vivre cette fête.