Mgr Delaby - Homélie et Testament

Dieu nous aime inlassablement

Homélie de Mgr Jaeger.
 

En la personne de Mgr Delaby se trouve rassemblé le souci de l’Eglise et de la mission. Il l’a vécu en grande partie avec les mouvements en monde ouvrier. Il ne s’agissait pas de compter les fidèles, mais de leur permettre de découvrir de quel amour chaque être humain est aimés et doit aimer, dans les faits c’est-à-dire dans la recherche et la promotion concrète du respect des personnes, de lieur dignité de leur condition de vie et de leur manière de se situer dans les dynamismes économiques et sociaux de notre époque.

 

Ce faisant cette génération n’a pris la place de personne, mais à manifesté clairement que la foi qui rassemble est aussi un ferment d’espérance et de vie pour tout être humain. La démarche du père Delaby s’exprime clairement dans le préambule à l’évangile que nous venons de lire. Juste avant de prendre la parabole de la brebis perdue, Jésus vient de rappeler qu’un tout petit, un enfant est le plus grand dans le royaume des cieux et qu’il doit être respecté parce qu’il voit la face de Dieu. Voir la face de Dieu pour un croyant c’est la dignité suprême, c’est resplendir de l’amour du Dieu créateur, c’est accueillir l’amour du Christ sauveur, c’est vivre, être enflammé par l’esprit d’amour. Et si tout être humain a cette grandeur et cette dignité, il importe que dans la vie des hommes elles soient manifestées par les croyants bien sûr mais aussi par tous ceux qui ne partagent pas forcément la même foi mais ont pressenti la valeur inestimable de chaque entre humain.

 

Henri Delaby fut ce qu’il convient d’appelle un grand aumônier de JOC et sans doute a-t-il médité cette très belle phrase du fondateur et l’a-t-il répété : un jeune travailleur vaut plus que tout l’or du monde. Quel qu’il soit un seul être humain vaut plus que tout l’or du monde parce qu’il est aimé de Dieu et qu’il a droit à la place pleine et entière dans l’unique famille des enfants de Dieu faite des hommes et des femmes de toute langue, de toute race de toute culture, et j’ajouterai, de toute condition sociale et de toute appartenance ethnique.

 

Oui, nos frères, nos sœurs nous ont laissé un magnifique héritage, amplifié et systématisé par le travail, la recherche du concile de Vatican II qui a rappelé la mission de tous les membres de l’Eglise et particulièrement de celle des fidèles laïcs dans l’annonce de l’Evangile ; et nous savons désormais que l’Eglise n’existe que pour annoncer la Bonne Nouvelle, et permettre à tout être humain de la goûter, de la recevoir et de la partager. Sans doute les méthodes pastorales vont-elles évoluer, et le père Delaby lui-même le reconnaissait.

Sans doute, faut-il explorer de nouveaux chemins, qui étaient inconnus quand le jeune aumônier s’est lancé dans l’aventure de l’accompagnement des mouvements. Mais nous ne ferons jamais l’économie de l’annonce de l’évangile par toute l’Eglise, spécialement par les fidèles laïcs, assistés par les ministres ordonné. C’est toujours le même chemin qu’il nous faut suivre, quel que soit le temps, quelles que soient les situations et nous savons qu’aujourd’hui encore, dansenotre société hautement technicisée, dans notre société où, par les médias les hommes et les femmes se sentent si proches les uns des autres, nous rencontrons encore la dégradation, la dévaluation, la méconnaissance d’être humains par d’autres êtres humains.

 

Ce qu’a vécu le père Delaby et tous ceux qui s’étaient rassemblés autour de lui, ce qu’a vécu le concile Vatican II, ce que vit notre Eglise aujourd’hui va toujours dans le même sens : permettre à chaque être humain de se découvrir, comme le disait saint Paul, à travers la corruptibilité, ce qui a une valeur unique, l’être aimé, l’être servi, l’être uni aux autres, parce que nous vivions du même amour, et cette Bonne Nouvelle, il nous faut la proclamer.

 

Le père Delaby a participé au grand rassemblement de la JOC de 1956. Au cours de ce rassemblement, des milliers de jocistes ont chanté à tue-tête -c’était déjà la de des tubes- : “forts d’avoir prié ensemble, et d’être unis, forts du Christ qui nous rassemble allez dire à tous nos frères, il n’est qu’un sauveur.

 

Lorsque nous avons choisi en 2010 de mettre de remettre au point quelques éléments pour ‘l’annonce de l’Evangile ou le partage avec nos frères, lorsque les évêques de France ont demandé que cette année 2013 soit consacrée à la reconnaissance du service et du frère, à travers le service selon la volonté de Dieu, nous n’avons pas fait autre chose que de chanter : “fort d’avoir prié ensemble, forts du Christ qui nous rassemble, allez dire à tous nos frères qu’il n’est qu’un sauveur. C’est toujours la même joie qui nous anime.
Mgr Jaeger, Arras, le 20 février 2013
 

 

Testament spirituel de Mgr Henri Delaby

lu lors des funérailles, Arras, le 20 février 2013


Père Henri Delaby Père Henri Delaby    Je voudrais dire d'abord que j'ai aimé passionnément la vie sur cette terre. C'est Dieu qui nous l'a donnée, pas seulement en attendant mieux Je n'ai jamais aimé qu’on la présente comme «vallée de larmes », bien qu'elle le soit pour certains plus que pour d’autres.


Je reconnais que j’ai eu beaucoup de chances Une bonne santé (jusqu'ici du moins), un bon tempérament, plutôt optimiste, une bonne facilité d'adaptation aux circonstances et aux charges qui m'ont été confiées. De nombreux parents et amis, des personnes qui ont été lumière pour moi, d'autres (quelquefois les mêmes) pour qui j'ai été lumière également et qui ont bien voulu me le dire, où me le faire comprendre.


Autant le dire tout de suite, j’ai été un homme heureux et un prêtre heureux.
Bien que, par tradition familiale sans doute, j’ai toujours été sensible à l’injustice sociale, à l’inégalité des chances, au malheur qui semble s'acharner sur certains. Je n’ai jamais pensé que le monde était mauvais (ce qui serait d’ailleurs faire injure au Créateur). Mais qu’il faillle l’aménager, travailler, lutter pour en faire une terre plus humaine pour tous, çà oui je l’ai toujours pensé.


C'est pourquoi j'ai été heureux que pour l’essentiel de mes ministères successifs ils soient consacrés au Monde Ouvrier et à la Mission Ouvrière. J’y ai connu de grandes joies, j’ai été témoin, grâce à la J 0 C surtout, de véritables miracles. Oui j’ai vu à l'œuvre l’Esprit de Dieu, j’ai vu l'Evangile révélé aux petits, aux sous grades, aux sans considération, et j’ai vu ce dont ils étaient capables avec la Force de Dieu.


J'ai vécu des moments inoubliables lors des grands rassemblements, jocistes en particulier, au 50ème anniversaire du mouvement en 1978. Je revois encore cette femme qui pleurait à l’écoute d’un chant jociste. La J 0 C disait-elle «c'est ce qui a donné un sens à toute ma vie». Comme je jetais un regard vers elle, elle se crut obligée de s'excuser «Excusez moi, mais la J 0 C a changé toute ma vie».


J’ai aimé (passionnément) l’Eglise, en laquelle je suis né et au service de laquelle j’ai été ordonné. J’ai quelquefois souffert par elle et plus souvent pour elle, car le l'aurais voulue sans rides et sans défauts. Mais ce sont nos rides et nos défauts qu’elle porte sur son visage car 1'Eglise, c'est nous. Que ce soit l'Église avec un grand E ou un petit e, j'aurais voulu - j'espère, y avoir travaillé un peu - que 1'Église soit la maison du Peuple et que chacun puisse y trouver sa place. C'était l’un de mes principaux soucis, pendant les 22 années ou je fus archidiacre pour la région des Mines.


Un jour, lors d'une fête de l' A C E dans les Mines, sur le coup de midi, une pluie torrentielle se met à tomber. Un seul endroit assez vaste pour se mettre à l'abri :l'église de la commune. C'est là que les centaines d'enfants se réfugient pour un pique-nique inattendu. Certaines bonnes âmes, parait-il, s'en scandalisèrent. Moi j'étais dans la joie. Que cette église, grande mais un peu froide, soit redevenue, l'espace d'un moment, la maison des hommes, la maison des enfants de Dieu.


Il y a des noms que j’ai oublié, mais je les retrouverais dans le Livre de Vie, car ils y sont inscrits, j’en suis sûr. Un jour je reverrai leur .visage et nous nous reconnaîtrons!


Pour moi comme pour d’autres, le Concile Vatican II, lié au souvenir du bon Pape Jean, a été un grand moment de bonheur, ou le rêve devenait réalité, inattendue actualité. J’avais 40 ans, quel cadeau!!


J'ai entendu l'appel du Christ à 11 ans. Près de 60 ans plus tard, je l'entends encore, c’est toujours le même : « Viens suis moi (Jean 21,19) et son corollaire, “Va vers mes frères (Jean 20,17), dis leur que je suis ressuscité, et qu'il y a un avenir pour eux, quels qu'ils soient »


J'ai essayé de répondre tant bien que mal à l’un ou l’autre appel. Dans la durée et la fidélité, malgré mes maladresses et bien des faiblesses. Si j'ai pu blesser quelqu’un, scandaliser peut-être, si je n'ai pas répondu a l’attente de ceux qui me faisaient confiance, j'espère qu'ils me pardonneront, si ce n’est déjà fait.


Il y a une chose dont je n’ai jamais douté et je voudrais en témoigner une dernière fois, c'est de la miséricorde divine. J'ai été, nous avons tous été un jour ou l'autre, nous sommes tous plus ou moins les fils prodigues de l'Evangile. Dieu nous attend sans cesse, sa porte est toujours ouverte. Ca je l'ai toujours su ! !
Au fond, il y a une seule chose à laquelle il faille croire absolument : Dieu nous aime chacun, chacune. En son fils Jésus Il nous sauve chacun, chacune.
Rédigé durant une retraite, octobre l993
Henri Delaby