45 ans d'affiches du CCFD

L'évolution du regard par l'image sur le développement : quelques traits saillants , à partir d'un modeste échantillon ...

Le CCFD-Terre Solidaire est une organisation de solidarité internationale  créée en 1961 pour porter l'engagement des catholiques français dans la lutte contre la faim.  Au cours de ses soixante ans d'existence, il a publié un grand nombre d'affiches, dans le cadre des campagnes de carême ou de campagnes de notoriété; si l'on y ajoute les affiches de Noël et celles qui sont destinées plus spécialement à la jeunesse, le total dépasse la centaine ... Le  mince échantillon ici retenu  présente  quelques-unes des  facettes  de son histoire et de son action , et souligne  une partie  des principes qui l'animent .

 

Deux affiches  des débuts : 1963-1964 :

 

affiche1963 affiche1963   Une première affiche associe :

 

à l’arrière plan, un paysan travaillant la terre avec la traditionnelle daba (houe à manche court),
au premier plan, une femme, bébé sur le dos, qui pile le mil ; les regards sont tournés vers le spectateur… Une scène finalement assez proche des « images reçues » de l’Afrique « soudanienne », celle des savanes. Mais ces « représentations » courantes à l’époque comportent une part de vérité : de fait, l’agriculture africaine demeure largement dépendante de l’énergie humaine ; oui, dans « l’Afrique des greniers » ( à mil), manger, c’est bien « manger la boule » (de mil). Et piler est toujours une tâche féminine : avec le portage (des objets) sur la tête et des bébés (sur le dos), c’est même « un de ces gestes primordiaux qui disent, dans leur simplicité, la mission nourricière que la tradition ancestrale assigne aux femmes » (R. Pourtier, géographe)
 
La deuxième image (1964- ci-dessous) reprend le dessin du paysan muni de sa daba, qui contraint à travailler courbé. La confrontation avec la moissonneuse ne fait pas dans la demi mesure ! Le choc des techniques et des productivités … Ce qui, là encore, repose sur un fond de vérité : en Afrique Noire, en l’absence de travail animal ou mécanique, il faut (en moyenne) 40 jours pour labourer un hectare , contre 4 en culture attelée.
 
Les premières affiches (de 1961 à 1970 en gros) sont essentiellement africaines , évocatrices de l'Afrique occidentale des savanes et du Sahel plus que de l'Afrique forestière. Des scènes asiatiques ne seraient pas moins aptes à suggérer le sort des nations affamées dans les années 1950-60; les études de la FAO indiquent alors que la sous-alimentation sévit à des degrés divers sur tous les continents, et les indices de production alimentaire  par tête n'incitent pas à l'optimisme en Asie du Sud.  Mais l'Africain  apparaît sans doute comme le plus "proche" des "peuples lointains", le moins étranger à notre histoire, à nos préoccupations, à nos émotions. Un siècle de colonisation a créé des liens de tous ordres avec l'Afrique, modelé la construction du savoir national sur ce continent et ses habitants, nourri les représentations de Français-pour le meilleur et pour le pire.
La majorité des projets aidés par le Comité contre la faim concernent alors l'Afrique Cela correspondait d'ailleurs aux voeux de l'Assemblée des Cardinaux et Archevêques de France (ACA) , qui accorde une priorité explicite aux pays d'Afrique Noire d'expression française: on mesure là le poids des liens déjà établis  autant que le souci de ne pas disperser les efforts.
 
Le trait commun des deux affiches , en dépit d’inflexions de détail un peu différentes (les gros caractères soulignent d’un côté « aidons les »,  de l’autre « il a faim »), c’est la visée : combattre  la faim. Le CCFD s’est constitué en juin 1961 autour de cet objectif majeur (on ne parle pas encore de développement) Lutter contre la faim est à la fois une sorte d’évidence, une urgence vitale (littéralement), surtout dans une époque où l’on voit poindre une « course entre production et reproduction » (essor démographique). C’est aussi une fidélité à l’enseignement évangélique ( Matthieu , 25 ) , repris par les Pères de l’Eglise : « donne à manger à celui qui meurt de faim car, si tu ne lui as pas donné à manger, tu l’as tué », rappelé par le Concile de Vatican 2 (qui bat alors son plein).
 
affiche 1964 affiche 1964    Les deux affiches reposent aussi sur une intuition fructueuse : « ils s’en sortiraient » … « il s’en sortira ». On ne propose pas ici de nourrir les paysans africains ou de subvenir directement à leurs besoins… C’est du progrès technique que sortira la solution : « mieux équipé » (grâce à l’aide apportée), l’agriculteur africain doit pouvoir passer d’une agriculture extensive, à faible productivité, à une agriculture plus  intensive, utilisatrice « d’intrants » (machines, engrais …) capable d’assurer la quantité de vivres nécessaires.
Cette intuition juste  (s'en sortir par soi-même) s’articule donc à une « vision technicienne » du développement dont la pertinence sera rapidement remise en cause. Vision technique qui est aussi dans l’esprit du temps, caractéristique de l’engouement d’une époque pour l’agriculture motorisée et les techniques de la « révolution verte ». Vision naïve, au bout du compte, qui résistera mal à l’épreuve des faits. Le CCFD est vite passé à une autre vision des choses , affirmant un soutien croissant à une  agriculture paysanne respectueuse des hommes et de l'nvironnement .
  

L'affiche De carême 1966:    D pour développement

 
ccfd-aff careme 1966 ccfd-aff careme 1966   Carême 1966 . Plusieurs vignettes en noir et blanc : rien de spectaculaire  et point de grosses mécaniques ...Mais des images de formes concrêtes de développement plus nuancées, et qui suggèrent d'autres enjeux: la maîtrise hydraulique, mais aussi l’éducation, et une sorte de reconnaissance du savoir faire traditionnel des paysanneries.Et un mot d’ordre : « partageons » présenté comme un "devoir de justice"
 
Si le refus de la faim reste une préoccupation majeure, l' innovation cruciale sur cette affiche est bien le mot « développement ». Le CCF est devenu CCFD (1966) . Ce n'est pas seulement les effets de la faim qu'on entend combattre, mais aussi ses causes. Le Comité chemine vers une conception plus large  qui ne sépare plus la faim d'autres éléments de la réalité des pays en voie de développement , comme l'organisation sanitaire et sociale ou l'éducation. Son intérêt se porte aussi sur les "facteurs externes" de la situation,  particulièrement les déséquilibres des relations entre pays riches et pauvres, tel que l'échange commercial inégal.La réflexion du CCFD s'éloigne d'une conception purement économique du développement limitée à l'augmentation de valeurs comptables. Le développement implique aussi des changements structurels qui touchent autant à la manière dont  le revenu est produit qu'au produit lui-même; il ne suffit pas créer des richesses ,il faut encore s'attacher à leur répartition et à la satisfaction des besoins fondamentaux. La finalité du processus , c'est "le développement de tout l'Homme et de tous les hommes"
 
Cela s’accompagne d’un glissement de « l’assistance » à la solidarité. Comme le rappelait Ph. Farine (délégué général puis président du CCFD de 1961 à 1977), le mouvement a découvert « qu’au-delà de la faim physique existe une faim de dignité, de responsabilité, de liberté (…) de cette découverte découlera tout naturellement le passage de la lutte contre la faim à la lutte pour le développement » (FDM, n° 170-171 ;N° spécial oct-nov. 2001 ; p.35-36).
 
« Partageons » donc… C’est même là « un devoir de justice ». Le soutien financier matérialisé par la collecte est le signe d’un engagement concret, qui répond aussi à une dimension spirituelle.  Et la justice, ce peut être : rendre à chacun ce qui lui revient. Le Concile n’a-t-il pas insisté, « devant un si grand nombre d’affamés de par le monde », pour que tous « partagent et emploient vraiment leurs biens en procurant avant tout aux individus et aux peuples les moyens qui leur permettront de s’aider eux mêmes et de se développer ».  Et ce n’est là que justice, puisque « tous les hommes ont le droit d’avoir une part suffisante de biens pour eux-mêmes et leur famille » en raison le la destination universelle des biens de la Terre… (Gaudium et spes : l’Eglise dans le monde de ce temps ; § 69)
 

"La Terre est à tous", version 1978  (DH)

 

affiche1978 affiche1978  Lancée dans les années 1970 , la campagne "La Terre est à tous" a été déclinée de plusieurs manières , qui souvent mettent en scène une certaine représentation du monde, à partir de l'image du globe. La déclinaison du thème  en 1978 se distingue par sa référence explicite aux Droits de l'Homme. Le trentième anniversaire de la déclaration de 1948 procure à la campagne  le renfort d'un texte universel et programmatique.

 

L’affiche est frappée en haut à droite du symbole géométrisé de la planète ; la photographie, prise en bord de mer, suggère la courbure de la planète où nous vivons. Les traces de pas sont plus ambiguës, ou « polysémiques ». (C’est le genre de symbole qui peut être interprété de manière très différente par les uns ou par les autres, quand il ne  laisse pas perplexe : image de l'homme debout en marche pour les uns, évocation d'une solitude pour d'autres).
Référence explicite est faite aux « droits de l’homme », dont:  le « droit des peuples au développement » (qui n'est pas encore dûment reconnu par les instances internationales) : c’est qu’on se place bien sur le terrain du droit et non pas celui des « sentiments » ( surtout pas la commisération ou de la « bonté d’âme » ), dans le registre de la justice plutôt que celui de la charité (qui pourtant ne s'excluent pas), dans une perspective universaliste acceptable par tous (« laïque » et sanctionnée par la déclaration universelle de 1948).
 
Dans les années 2000,  le CCFD accentuera cette approche du développement comme promotion des droits fondamentaux : un droit à l'alimentation qui s'applique vraiment  grâce à la maîtrise  des ressources par les populations paysannes;  un droit à la santé qui s'attaque aux causes des maladies par une amélioration de l'accès à l'eau potable et aux systèmes d'assainissement , etc
  

« le développement çà s’apprend »:

(affiche 1988)affiche 1988 affiche 1988  

 
 Sur fond de bord de mer habité, et de ciel immense (et bleu), un pêcheur indien ou bangladeshi, en bonne santé, fier de son travail, brandit son filet bien rempli . Evidente référence à une célèbre formule (dont circulent plusieurs variantes) : si vous voulez aider quelqu’un à se nourrir, faut pas lui livrer le poisson chaque jour, mais lui apprendre à pêcher. Comprenez : c’est bien dans cet esprit là que travaille le CCFD.
 
"Le développement , cela s'apprend"... mais sûrement  pas comme une leçon  administrée par "quelqu'un qui sait mieux" ... Il s'agit de choisir des projets dans une optique de transformation globale et dans la durée, définis et réalisés par des individus et des groupes en charge "de se développer eux-mêmes".  Depuis le début des années soixante dix on parle au CCFD  de partenariat  . La conception de la lutte contre la faim et du  développement  défendue par le CCFD accorde en effet une place majeure  aux acteurs de terrain considérés comme des partenaires . Ce sont des associations, des fédérations, des organisations paysannes , des ONG locales , des mouvements de femmes et de jeunes  qui bénéficient d'un soutien financier , d'une aide au renforcement de leurs structures ou d'une mise en réseau avec leurs homologues... bon an mal an ce sont 500 à 600 initiatives  qui sont ainsi soutenues  dans plus de 60 pays du sud et de l4est, qui touchent la souveraineté et la sécurité alimentaire, l'économie sociale et solidaire, la prévention des conflits...
 
Cette notion essentielle et fondatrice est présentée et illustrée dans une autre rubrique sur ce site ("Partenariats et Partenaires"):
      https://arras.catholique.fr/rubrique-6236.html
 
 

"Tous"...(L’affiche de carême 1989-1991 )

 

 

L’image (une nébuleuse de visages, de toutes couleurs et de tous pays, sur fond bleu).. Une sorte de 'pâté de têtes' en train de s’aggréger  diront certains ... L'image n’est peut être pas si heureuse  (elle  a pu  faire penser au générique des « Guignols de l’info ») . C’est dommage puisque on évoque ici toute la diversité de la famille humaine : des gens tous différents, mais semblables (et même frères).  Rassemblés, ces visages peuvent nourrir un sentiment de commune humanité , telle que chacun la rencontre dans sa propre culture. Mélangés sans distinction d'origines mais  rapprochés par le mouvement qui anime l'image : ce qui peut suggérer les liens d'interdépendance croissante entre les hommes.

 

Le texte souligne bien la dimension collective d’une responsabilité que l’individualisme ambiant tend à battre en brèche : « Tous responsables et solidaires de tous ». Texte et image font la paire : solidarité vient de « solidus », entier … Le mot véhicule l’idée d’une dépendance mutuelle, d’une sorte d’obligation mutuelle entre les hommes, au-delà de leurs oripeaux.
L’idée que le développement est une responsabilité collective demeure très forte au sein du CCFD depuis l’origine ; reste à en convaincre chacun…
 
La référence chrétienne de l’engagement est ici clairement affirmée par de brèves citations qui encadrent le nouveau sigle, extraites de deux encycliques : d'une part  Popularum progressio, signée par Paul VI en 1967, traitant en des termes renouvellés d’une «  question sociale » qui est « devenue mondiale » ; d'autre part Sollicitudo rei socialis délivrée par Jean Paul 2 en 1987 à l’occasion du 20 ème anniversaire de la précédente (et de tonalité plus alarmante encore).
Ces citations établissent deux équivalences : 1. le développement c’est la paix ; 2 la paix est le fruit de la justice et de la solidarité … Car la paix est au cœur du propos du CCFD , depuis l'origine : « Après guerre l’une des exigences premières (des) chrétiens progressistes est le maintien de la paix mondiale. L’un des facteurs potentiels de déséquilibre, donc de guerre, qu’ils identifient est l’existence permanente d’un déséquilibre profond entre pays riches et pays pauvres » … (JP Rivière, in « Form’actifs », HS, septembre 2007, p.5)

 

sur paix et développement , voir sur ce site:
https://arras.catholique.fr/prevention-resolution-conflits-que-ccfd-dit-paix.html
 

 Retrouver le sens du développement ...

affiches :  "Développement" de 1992  et "Terre d'Avenir" 1993

 

La fin des années 1980 et la décennie 1990 sont souvent présentées comme une "ère de doute" et de remise en cause du développement , dans un contexte géopolitique et économique profondément changé. L'idée même de développement se heurte au scepticisme ambiant.  Les quelques  pays du sud qui avaient un temps constitué des "modèles" perdent leur valeur exemplaire. Le développement économique et social piétine et les résultats sont très  disparates  (rattrapages asiatiques, dégradation en Afrique). En outre, la critique post-moderniste dénonce le développement comme un concept suspect (un avatar de la "mission civilisatrice de l'occident"?). Faut-il jeter le  bébé avec l'eau du bain?

La  crise des théories et des modèles  interroge tout le monde, ONG comprises .

 

 On conçoit que l'affiche de 1992 ait pris des airs de récapitulation .comme un résumé des 20 ans écoulés . Dans le texte  de l'affiche, on  retrouve en effet :

-  l’idée de développement  elle même,   destiné à un « tiers monde » (on parlera bientôt , comme  d’autres, de « nord » et de « sud » : l'image du globe  enregistre déjà cette partition ) ; 

- le souci d'un  développement local  à l'initiative des interéssés (« par eux-mêmes »),

- la dialectique :   ici  -  là-bas …

Dans une période de doute et de remise en cause, cela sonne comme une réaffirmation (une cause à défendre?). Comme s’il fallait redire aux autres (et à soi- même) tout ce qui avait fait la trame d’une solidarité et de ses moyens d’agir.  D’agir dans la durée, avec persévérance , pour soutenir des hommes et des femmes qui se prennent en main;  tendre vers un développement social sans cesse en chantier ...Le contraire même de l’action humanitaire  alors en plein essor et   fortement médiatisée,-qui travaille dans l’urgence en limitant (de façon plus réaliste ?) ses ambitions et ses objectifs.

 

 

 

1993: « terre d’avenir… maintenant c’est chacun pour tous »

L'affiche met en scène sur fond d'azur une petite planète bleue et tous ses continents rapprochés, comme blottis les uns contre les autres (Antarctique compris). On pourrait voir là une expression symbolique de la "contraction" de l'espace terrestre  et de la mondialisation en marche. Le rassemblement des continents évoquerait alors une       communautés de destin, qui devrait dépasser les clivages et stimuler les solidarités : "maintenant, c'est chacun pour tous"

 

 

 

 
Les deux affiches (1992 et 93) montrent la Terre : ce ne sont plus des représentations schématisées ou abstraites comme dans les années 70, mais des images du monde plus expressives.  Prise de conscience, sans doute  : la mondialisation est en marche. Des interdépendances multiples  nouent désormais pays et continents (internationalisation des échanges et des flux financiers; et   mondialisation sociale et culturelle…). 
Mais à première vue  rien qui indique une prise de conscience « écologique », ou qui pose la question de la durabilité du développement, dans la lignée du rapport Brundtland  (1987) ou du sommet de Rio (1992) .Cela viendra un peu plus tard:  à cette époque le CCFD est encore fortement focalisé sur "la question sociale". Ce qui d'ailleurs n'est pas totalement à côté de la plaque, puisque la notion de durabilité n'est pas purement écologique mais aussi sociale  (dans le regard qu'elle porte sur la persistance des inégalités  et la "priorité" qu'elle souhaite accorder "aux plus démunis"  dit le  rapport Brundtland). 
 
La justice climatique et la préservation  de la planète sonr devenues depuis des préoccupations majeures. La référence à l'encyclique "Laudato Si" (2015) est désormais cruciale.
 
 

Plaidoyers ...

exemple : l’affiche de 2004-2005 : « tu mangeras quand tu seras compétitif »

 
  Au début des années 2000, la dévalorisation du développement sur le marché des idées et la crise des "modèles"  rendent malaisés l'identification de solutions  ... Des remèdes , justement, le courant libéral alors en pleine renaissance en a plein sa besace.! Pour générer la croissance (qui seule viendra à bout de la pauvreté) il ne jure que par l'ouverture des frontières et la libéralisation des échanges, la primauté des investissements internationaux,et le désengagement de l'état . Le credo néo-libéral trouve un écho considérable auprès des Institutions Financières internationales (banque mondiale et FMI), qui en tirent des applications dans le cadre des Plans d'Ajustement Structurels  imposés aux pays endettés, amputant au passge les états pauvres d'une bonne partie de leur capacité d'initiative.
...
La série d’affiches  des années 2000 apparaît globalement comme l’une des plus percutantes (force de l’image ; celle du texte aussi, volontiers distancié, sinon ironique). La tonalité est plus militante que jamais : au bout du compte, les affiches de cette série pointent toutes un système (capitaliste mondial) et en critiquent les tares (notamment les effets sociaux et économiques  des plans d’ajustement structurels). En même temps, les affiches ont un petit côté  didactique : elles expliquent dans les grandes lignes au lecteur de quoi il retourne  (au sein d'un petit paragraphe de bas de page)..
L’orientation dominante est franchement altermondialiste. Non qu’on refuse la mondialisation, inéluctable ; mais on en conteste les formes contemporaines. Depuis 2001, le CCFD est engagé dans la dynamique des « Forums sociaux », à côté de ses partenaires (« l’initiative des premières rencontres de Porto Alegre doit beaucoup à quelques uns de ses partenaires brésiliens »…). Il prend position en faveur d’alternatives aux principes actuels dominants.
 
 La série d'affiches  remet  donc explicitement  en cause  :
-les règles du commerce international, et le credo libéral en matière d’échanges ; sa pesée sur le développement économique, l’étoffement des ressources d’exportation et l’équilibre de la balance commerciale, la sécurité alimentaire (mais aussi l’attitude des pays riches et en particulier de l’Europe)
-le remboursement intégral de la dette, ou la manière dont elle pèse sur les investissements en matière de santé ;
-les principes des PAS  , favorables à la privatisation des services publics et à la gestion privée de services élémentaires mais cruciaux, comme la distribution de l’eau:
-le sort des migrants économiques (car une partie des migrations mondiales se nourrit de la misère), dans les pays occidentaux
 
Le CCFD-TS  s'est  donc engagé depuis 20 ans  sur les sentiers du plaidoyer. S'il suit en cela l'exemple des ONG anglo-saxonnes, le Comité  n'en est pas moins fidèle à "l'esprit maison":  pour agir sur les causes structurelles de la pauvreté , il est nécessaire de peser sur les politiques publiques qui les entretiennent, ou bien de soutenir  les décisions susceptibles  de les faire reculer . Comment une cause pourrait-elle avancer si on néglige de la plaider auprès de la société civile et de l'opinion, et plus encore auprès des décideurs politiques et économiques ? Et puis la pleine réciprocité de la relation partenariale crée des obligations qui doivent satisfaire les attentes mutuelles : celles des partenaires ne se limitent pas au seul soutien financier.
 

Le Sud mérite mieux que nos clichés : Affiches 2010

(retour sur le partenariat)

 

 

 CCFD-2010 CCFD-2010   Le CCFD-Terre Solidaire a publié une série d’affiches, photos “décalées” par rapport à ce à quoi nous sommes habitués. Mais nos inconscients ont-ils pris la mesure du décalage entre eux et nous ? Il semble utile de rappeler deux valeurs essentielles portées par l’association de solidarité CCFD-Terre Solidaire.


Refuser l'assistanat, célébrer le partenariat

 

Célébrer le partenariat, CCFD-2010 CCFD-2010  c’est encourager à voir autrement les habitants des pays du Sud. Souvent présentés comme simples bénéficiaires d'une aide extérieure, ces hommes et ces femmes seraient-ils incapables de prendre leur destin en main, de proposer des solutions pour leur propre développement ? L'aide humanitaire bénéficie d'un large écho dans les médias ; elle produit des représentations profondément ancrées qui cultivent en chacun la notion d'assistanat. Le message du CCFD-Terre Solidaire place ces hommes et ces femmes  en acteurs principaux du développement. Ce message rejoint l'intuition fondatrice du CCFD-Terre Solidaire : le partenariat dans le respect des différences.  Le message invite donc à liquider la confusion qui associerait pauvreté et manque d’idée… Ou manque de compétence et  manque de force ou de courage. Reconnaissons que les acteurs locaux  sont capables de créer leur propre avenir dans la dignité!


Développer l'esprit critique

 

CCFD 2010 CCFD 2010   Cette affiche porte un second message moins évident, à partir de l’expression “Ceci n’est pas…”. Parler d’un être humain en le qualifiant de “ceci” est une expression dévalorisante qui situe l’être humain d’un pays sous-développé comme un objet, une chose. Le texte de l’affiche invite à considérer la personne représentée comme un être humain : “c’est une jeune femme qui…” C’est à cette personne que nous sommes invités à venir en aide.

 

Dans le monde aujourd'hui “ouvert” est traversé par de très nombreux messages de communication. Ces messages bien souvent annihilent l'esprit critique en se présentant comme des évidences. Leur objectif est davantage de faire acheter, de faire voter... sans que l’on ne se pose aucune question. Ces affiches que nous avons vues et revues aux portes des églises ou dans les magazines ont-elles provoqué notre réflexion ou développé un simple “bof !” ? A chacun de développer un esprit critique et positif à l’égard de ces gens d’ailleurs. Ils sont aussi nos frères en humanité. 


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Extraits d'une étude de G. Jovenet ,2008,  complétée en 2011  à partir des affiches mises à disposition  par Guy Dequeker, collectionneur avisé et patient.

 

Article publié par Gestionnaire technique du site internet du Diocèse • Publié • 16446 visites