Groupe des Dombes, œcuménisme au travail
Réflexion sur le Notre Père
Notre père en hébreu et araméen, transcription par l'école biblique de Jérusalem (Française) Le groupe œcuménique de réflexion théologique dit “des Dombes” fondé en 1937 s’apprête à publier un important document sur le « Notre Père ». Quoique discret, l’impact de sa réflexion est mondial. Certains de ses travaux ont pu inspirer le concile Vatican II et le Conseil œcuménique des Églises.
La fécondité du groupe des Dombes est d’autant plus étonnante que ses quarante théologiens catholiques et protestants – choisis par cooptation – n’ont reçu aucun mandat officiel de leurs communautés respectives, et s’expriment donc en leur nom propre lorsqu’ils se réunissent chaque fin d’été, à l’abbaye bénédictine de Pradines, près de Roanne.
On ne peut pas ronronner dans les échanges
Réunis à l’abbaye bénédictine de Pradines (Loire), ils ont choisi de se pencher patiemment sur les grandes querelles qui ont opposé les Églises issues de la Réforme et l’Église catholique. Leurs travaux se déroulent dans un climat de bienveillance et d’écoute, ce qui n’exclut pas une certaine vigueur. Ils se refusent cependant à manier la langue de bois. Dans le groupe, c’est un débat permanent qui fait qu’on ne peut pas ronronner dans les échanges. Le groupe à conscience de traîner porter avec d’autres un contentieux vieux de 400 voire 500 ans. Il faut donc savoir empoigner le problème, revisiter l’histoire des Églises pour démonter les mécanismes de division, afin de mieux les remonter dans une perspective d’unité.
Désireux de faire avancer l’œcuménisme
septembre 2010, à l’abbaye bénédictine de Pradines (Loire), De fait, en plus de soixante-dix ans, le groupe des Dombes a abordé de front de très nombreux points de clivage entre protestants et catholiques. D’abord sur le plan ecclésiologique – qu’entend-on quand on dit « l’Église » ? –, et notamment les thèmes controversés de l’autorité, de la succession apostolique ou encore de la communion des saints. Puis, dans les années 1970, plusieurs documents se sont attachés à mettre en lumière les points d’accord des Églises sur des aspects essentiels de la foi : eucharistie, Esprit Saint, ministères…
Les années 1990 seront marquées par un important travail autour de la conversion des Églises, suivi d’un document consacré à Marie. Ce texte, qui a largement contribué à revaloriser la figure mariale dans le protestantisme ces dix dernières années, a été primé en 2001 par la Faculté théologique pontificale Marianum à Rome. Mais comment travaillent au juste ces théologiens, qui ont pour habitude de se réunir dans la plus parfaite parité.
Ils sont donc 20 catholiques et 20 protestants qui vivent d’abord une expérience de fraternité, de respect mutuel. À la différence d’autres instances de dialogue, ils n’ont pas d’abord le souci de rassembler les meilleurs théologiens du moment, mais des gens qui ont un même désir de faire avancer l’œcuménisme. Nous ne sommes pas un groupe de techniciens ! »
Redire quelque chose de commun sur la foi dans un langage d’aujourd’hui
Quel que soit le travail engagé, le protocole est immuable : une fois qu’un thème a été choisi, deux théologiens – généralement un protestant et un catholique – sont invités à apporter une contribution devant leurs confrères. Des documents sont alors rédigés et affinés collectivement, afin que chacun puisse signer le texte final en son âme et conscience. Celui sur le Notre Père, par exemple, a ainsi été remanié à quatre reprises ; il a nécessité plus de cinq ans de gestation ! « Le défi, c’est de parvenir à redire quelque chose de commun sur la foi dans un langage d’aujourd’hui à partir de leurs différentes sensibilités et expériences.
L’œcuménisme de demain ne suivra plus forcément les frontières confessionnelles
La rigueur reste une nécessité pour progresser ensemble. Depuis Vatican II, le dialogue entre les Églises a connu de grandes avancées, que ce soit au niveau de la liturgie, de la pastorale ou des ministères… Aujourd’hui, il faudrait qu’elles aient le courage de franchir une étape de plus en signant des déclarations communes, mais elles prennent peur.
Or il est important que les Églises donnent un signe visible d’unité, que la réconciliation soit quelque chose de concret pour les peuples. Mais le chemin est encore bien long, d’autant que l’œcuménisme de demain ne suivra plus forcément les frontières confessionnelles comme aujourd’hui.
En effet, un réformé peut se sentir plus proche d’un catholique conciliaire que d’un protestant fondamentaliste, et réciproquement. Au fond, selon le pasteur Marc Chambron, les grands désaccords entre protestants et catholiques ne portent plus tant sur la formulation d’une « foi commune » que « sur la manière de vivre en tant qu’Église et sur des options morales ou éthiques ».
Document source publié par François-Xavier MAIGRE.