Nouvelle Traduction oecuménique Bible
La TOB fait peau neuve
La traduction œcuménique de la Bible : une longue histoire.
Jusqu’à l’invention de l’imprimerie, l’Eglise catholique avait le monopole du texte de la Bible, traduction latine appelée Vulgate. Au XVIème siècle, la Réforme introduisait une rupture dans le tissu ecclésial. Bientôt Erasme publiait une édition grecque du Nouveau Testament. Les traductions en langues vernaculaires (langues locales) se développent et participent du mouvement humaniste et du “retour aux sources”. Il fallu cependant bien des années pour que soit reconnue l’étude critique de l’Ecriture. (Pie XII, 1942, Divino afflante Spiritu) et le dialogue entre confessions chrétiennes.
Jusque dans les années 1945-1950, catholiques et protestants se référaient chacun à leur Bible : la Bible Segond (1911) pour les protestants, Crampon (1904) pour les catholiques ou, à partir de 1956, la Bible de Jérusalem. L’intuition d’une Bible commune, œcuménique remonte au père Jean Starsky et au pasteur André Morel. Au début il était plutôt envisagé une révision de la traduction de la Bible de Jérusalem. L’essai ne fut pas concluant.
Il faut attendre le 23 janvier 1965 pour que naisse le projet d’une “Traduction œcuménique de la Bible” à partir des textes hébreux et grecs. Les orthodoxes, favorables au projet ne pouvaient cependant pas assurer une part dans le travail de traduction et d’annotation ; ils apportèrent leurs réflexion et assentiment. Un essai test fut réalisé à partir de la lettre aux Romains (lieu de divergences entre interprétations catholique et protestantes. Une équipe paritaire de huit exégètes se retrouvait chaque mois pour partager leur travail et commentaires. De la longue et rude discussion finissait par surgir un accord unanime.
Après l’accord des autorités catholiques et de l’Alliance biblique, il fut possible d’engager, dans l’aire francophone, plus de 120 exégètes. De ce travail émergeait un constat : les divergences et les débat ne se situaient pas d’abord entre catholiques et protestants, mais au sein même de chaque confession, selon leurs méthodes exégétiques et présupposés théologiques. Toutes les annotations furent communes, excepté pour 4 versets. Avec la participation de coordinateurs, le débat fut fraternel et il se créait des liens solides permettant de résoudre les difficultés pour la satisfaction de tous.
A la même époque se dessinait un retour des chrétiens vers la Bible. Le cardinal Achille Liénart, du diocèse de Lille, promouvait une traduction de la Bible : “Pour élargir sa diffusion, notre intention est de répondre au vœu exprimé par les fidèles, en mettant nos textes bibliques à la disposition des libraires” (la Bible pour tous, imprimatur 1955).
La liste et l’ordre des livres.
Fallait-il placer les livres des prophètes à la suite du Pentateuque comme “interprétations de la Loi” (bible hébraïque) ou avant le Nouveau Testament, comme “annonces de la venue du Christ” (Vulgate) ? La TOB a repris l’ordre des livres selon la Bible hébraïque et non selon la Bible latine de Saint Jérôme dite Vulgate (ordre repris par la BJ).
Autre souci : du côté catholique on devait inclure dans la TOB les livres deutérocanoniques, c’est-à-dire les livres qui ne furent pas écrits en hébreu, soit 8 livres de la Septante (LXX, en grec). Pour l’édition revue de 2010 se posa la question d’intégrer des livres reconnus dans la liturgie orientale des Orthodoxes. Ainsi, Les chrétiens orthodoxes peuvent retrouver, dans le même livre de la TOB l’ensemble de leurs livres sacrés, ont certains considérés jusque là comme deutérocanoniques ou apocryphes chez les catholiques et les protestants.
Esaïe ou Isaïe ?
L’appellation Esaïe était familière aux protestants pour désigner le prophète du 7ème siècle, mais elle étonnait les catholiques ; la formulation Isaïe est plus proche de l’hébreu. Cependant cette appellation prêtait à confusion avec Isaï, le père du roi David appelé aussi Jessé. Aujourd’hui dans la TOB, fruit du travail interconfessionnel, le prophète est appelé Esaïe et le père de David Jessé. Ceci n’est qu’un tout petit exemple des difficultés que les traducteurs eurent à dépasser : conflits de méthodes, acceptation d’une exégèse biblique de type scientifique, interprétations particulières, approches théologiques différentes, etc. La dernière traduction comporte nombre de modifications et révisions, ainsi sur le Nom de Dieu Tout puissant ou la traduction du mot Juifs, pour être plus fidèle aux textes originaux. (Eglise d’Arras n° 19-2010, p.20). Ainsi progresse la transmission de la Parole de Dieu.
Verbum Domini de Benoit XVI § 46
L’importance d’une traduction commune n’a pas échappé à Benoit XVI : « Ecouter et méditer ensemble les Ecritures nous fait vivre une communion réelle même si elle n’est pas encore pleine ; l’écoute commune des Ecritures nous pousse ainsi au dialogue de la Charité et fait grandir celui de la vérité… La promotion des traductions communes de la Bible participe à l’effort œcuménique».
Conclusion : La traduction commune et la fréquentation de la Bible, loin d’être facteurs de division entre les confessions chrétiennes a bien au contraire favorisé le dialogue et l’écoute réciproques. Les pères de l’Eglise avec leur recherche du sens littéral et du sens spirituel, avec l’interprétation de nombreux textes comme “figures” du Nouveau Testament avaient manifesté la diversité d’approches possibles de l’Ecriture qui donnèrent aux lecteurs de vivre de la Parole lue et méditée dans leur aujourd’hui. Les dialogues entre croyants issus des lectures différentes, ont provoqué et continuent de provoquer une meilleure compréhension des textes d’hier, au service des croyants d’aujourd’hui pour qu’ils entendent et vivent de la Parole de Dieu toujours actuelle.
Source, Unité des chrétiens, n°161 janvier 2011 “Bible, de nouveaux outils œcuméniques” p.6-20