FAQ-9 ch 16-17. Foi et transfiguration

Confession de Pierre; transfigurationde Jésus et annonce de la passion

Pourquoi les disciples ont compris que c'était Jean-Baptiste? 17,13
 

Jean-baptiste Jean-baptiste   Il était dans l'air du temps, au premier siècle, que le messie allait revenir bientôt, rejeter les romains et restaurer la royauté de David. Il faut insérer la vie de Jésus et son interprétation dans ce contexte. Les Juifs espéraient la venue toute proche des temps messianiques. Pour ceux qui ont suivi Jésus, il leur apparaisait comme le messie annoncé, quoi que certains avaient des doutes (cf. ch. 11 à 12,50) et que finalement ce Jésus sera rejeté. Mais pour les disciples de Jésus et nompbre de galiléens qui l'avaient suivi, il n'y avait pas de doute et ils recherchaient des traces qui rendaient évidente la venue de ce temps messianique. Ainsi ils ont rapproché Jean-baptiste et Jésus, se souvenant du dernier verset du dernier livre de l'Ancien testament, Malachie 3,22-23 : Enlèvement d'Elie Enlèvement d'Elie   "Souvenez-vous de Moïse… Voici que je vais vous envoyer Elie le prophète, avant que n'arrive le Jour de Yahvé, grand et redoutable”.

 

 La figure de Jean-Baptiste, suivi par beaucoup de petites gens, pouvait correspondre à cette espérance de l'envoyé en avant, à cause de son enseignement, d’autant plus qu’il était mort comme bien des prophètes. Le livre des Rois rapporte la mort énigmatique d'Elie: emporté dans un char de feu… (2 Rois 2, 11), ce qui laissait supposer que, emporté par Dieu, il reviendrait un jour de la part de Dieu.
 

"Suivre Jésus prendre sa croix." Expression anachronique?

 Je n'ai pas connaissanc que l'expression ait été utilisée avant Jésus,  Simon de Cyrène aide Jésus à porter sa croix Simon de Cyrène aide Jésus à porter sa croix  ni par Jésus lui-même à moins de lire l'Evangile de manière littérale. Jésus en plusieurs occasions à explicité les difficultés de le suivre (pas où reposer la tête, délaisser le devoir envers un parent défunt, devenir serviteur-esclave, premier/dernier, etc.). Que le Christ ait invité à se renier soi-même pour se mettre au service de la Bonne Nouvelle du Royaume, c'esst une évidence. En quels termes? C'est après que Jésus lui-même ait été jusqu'à la mort sur la croix qu'il est devenu le modèle de celui qui va jusqu'à se renier lui-même  pour le service des frères. L'expression prendre/porter sa croix prends alors tout son sens. Si l'on ajoute que Matthieu écrit alors que certains chrétiens ont été persécutés et exécutés par des Juifs ou par des romains rendait l'expression bien plus réaliste que la manière dont on la comprend aujourd'hui. Ne nous trompons pas cependant sur l'enseignement de Matthieu : la suivance de Jésus amène à considérer jusqu'où a pu aller le don de Jésus.  Aujourd'hui les croyants sont amenés à prendre Jésus commemodèle de leur existence; cela ne signifie pas vouloir sa propre mort, cela signifie qu'il y a des risques pour sa propre vie, quand on prend au sérieux l'appel de Jésus à devenir serviteur de tous.

 

De où vient le chemin de croix?

 

Depuis la reconnaissance de la religion chrétienne par Constantin en 313, des foules de chrétiens ont voulu, chaque année, se trouver à Jérusalem la semaine de la Passion du Christ, et refaire le chemin que celui-ci avait parcouru durant les jours et les heures qui ont précédé sa mort. En quelque sorte, ils voulaient revivre l'événement, s'identifier à Jésus et, par ce geste, le remercier.

 

Les religieux franciscains imaginèrent et diffusèrent aux XIVè et XVè siècles la dévotion du Chemin de la Croix. Ils étaient devenus gardiens des lieux saints depuis le XIVè siècle en vertu d'un accord passé avec les Turcs. Ainsi, ils dirigeaient à Jérusalem les exercices spirituels des pèlerins sur la via dolorosa suivie par le Christ, et allant du tribunal de Pilate au bas de la ville, jusqu'au Golgotha (le Calvaire), à son sommet. Ils eurent l'idée de transposer cette forme de méditation sur la Passion au cadre de la vie habituelle de l’ensemble des fidèles et, ainsi, de permettre aux pauvres et à ceux qui ne pouvaient se rendre en Terre Sainte d'accomplir la même démarche que les pèlerins.

 

Pour ce faire, ils disposaient en plein air, ou dans les églises, des séries d'évocations (tableaux, statues. croix...) des scènes marquantes de l'itinéraire du Christ vers le Calvaire, et ils faisaient prier et méditer les fidèles à chacune de ces étapes ou stations. Le nombre de celles-ci variant jusqu'au XVIème siècle, époque où leur nombre fut fixé à quatorze par les papes Clément XII et Benoît XIV qui, de manière plus générale, donnèrent au Chemin de Croix les caractères qu'on lui connaît aujourd'hui. Depuis 1958 et la construction d'un chemin de croix de quinze stations à Lourdes, s'est répandue l'habitude de terminer ce petit pèlerinage avec Marie, dans l'espérance de la résurrection du Christ ».

 

Nous ne connaissons presque rien de l’itinéraire vers le Golgotha, excepté le départ et l'arrivée, la ville ayant été rasée en 70 et en 135 par les Romains. L’itinéraire à Jérusalem s’est fixé au cours des siècles à partir de diverses traditions ou légendes (Véronique) L’itinéraire actuel commence à se dessiner au XIIIème siècle.

 

Pourquoi parle-ton d'Elie?

 

Cette allusion à Elie fait référence à une tradition selon laquelle Elie, enlevé au ciel doit revenir. Enlèvement d’Elie en 1 Rois ch.2 et reprise par Malachie 3, 21-23. Malachie est le dernier livre des prophètes de la Bible hébraïque. Les dernières lignes du dernier livre parle explicitement de Moïse et Elie… On attendait le retour d’Elie comme précurseur de la venue du Fils de l’homme. Les premières communautés chrétiennes ont relu leur Bible et interprété ces passages de l’Ancien Testament comme “annonçant” la venue de Jean-Baptiste. C’est cette relecture qui est à l’origine des versets 17, 9-13.
La transfiguration est un moment indéfinissable. Que s’est-il passé ? Qu’a voulu nous faire comprendre Matthieu : que Jésus, le crucifié est aussi celui qui parle à égalité avec la Loi et les prophètes (Moïse et Elie), d’où la proximité de l’annonce de la Passion : Jésus, le crucifié est bien celui qui a toute la confiance de Dieu (celui-ci est mon Fils bien-aimé), que Jésus est du côté de Dieu et du côté de leurs Ecritures.


“Quiconque fait la volonté de mon père”. Une insistance de Matthieu, plus que les autres évangélistes, porte sur le faire. Sans doute y a-t-il là un indice que la communauté à laquelle il s’adresse manque particulièrement du dynamisme de l’agir. Il faudrait relire la conclusion du sermon sur la montagne 7, 21 “ Ce n'est pas en me disant : Seigneur, Seigneur, qu'on entrera dans le Royaume des Cieux, mais c'est en faisant la volonté de mon Père qui est dans les cieux.” ; ou 7, 26 “ Et quiconque entend ces paroles que je viens de dire et ne les met pas en pratique… ” Dans les paraboles sur la fin des temps, Il y a insistance sur le faire : le jugement dernier porter sur le faire, les jeunes filles non prévoyantes, pour n’avoir pas prévu, l’homme avec un seul talent, pour n’avoir rien fait, tandis que le serviteur attelé à sa tache est félicité par le maître à son retour… (ch. 24 et 25).
 

 

Pourquoi Jésus imposer le silence à ses disciples?

La question du silence imposé était déjà trés présent en Marc. Pourtant elle est logique:tant que Jésus fait des miracles, on a envie tout naturellement de dire qu’il vient de Dieu etc. Mais au pied de la Croix, dira-t-on encore qu’il est fils de Dieu ? Toujours est-il qu’au pied de la croix, les disciples ne sont pas là (excepté Jean, selon le 4ème évangile) et c’est un païen qui proclame Jésus-Fils de Dieu : cela peut donner à réfléchir. Tant que Jésus n’est pas passé par la mort-résurrection… il est difficile de comprendre qui il est. De là vient la question de ce silence appelé aussi secret messianique. La foi est bien celle concernant le Christ mort et ressuscité, non celle en quelqu’un qui ferait des choses extraordinaires (miracles ou discours attractifs). Aujourd’hui nous ne sommes pas dans la même situation que les disciples en Galilée.

 

 Aux origines de l’expression Le Fils de l’homme


Le titre de Fils de l'homme que se donne Jésus dans les évangiles intrigue les chercheurs. Devant les couches les plus archaïques de la tradition évangélique, on se demande si, en employant l'expression « Fils de l'homme», Jésus parle de lui-même ou d'un autre. II pourrait s'agir aussi d'une formule orientale de politesse: « le fils d'homme dit, pense que...' équivaudrait à « je dis, je pense...».
Chez Matthieu qui, seul, nous Intéresse ici, la figure du Fils de l'homme semble l'aboutissement du processus suivant:

 

  • 1. Le livre de Daniel (7,9-14) voit paraître dans le ciel un Fils d'homme à qui Dieu donne tout pouvoir sur les royaumes de la terre. Le personnage symbolise le peuple des saints du Très-Haut (v.18), c'est-à-dire les juifs fidèles dans la persécution à qui Dieu promet la victoire sur les royaumes qui les oppriment.
  • 2. Cette vision du IIè siècle avant notre ère a inspiré les visionnaires Juifs ultérieurs, les pères d'une littérature mise sous le nom du patriarche Hénok. Dans cette tradition, le Fils de l'homme devient un personnage individuel (semble-t-il !), une sorte de Messie céleste à qui Dieu donne mission de juger l'univers.
  • 3. Matthieu connaît apparemment, sinon le livre d'Hénok, du moins les traditions que véhicule cette littérature, comme l'atteste la fresque du jugement dernier (Mt 25,31-46).

Pour l'évangéliste, Jésus est massivement le Fils de l'homme en tant que mandaté par son Père pour juger l'univers au terme de l'histoire (cf. 10,23; 13,41; 16,27-28; 24,27,30,39,44; 25,31; 26,64) et son autorité s'exerce déjà sur la vie présente des hommes (9,6; 12,8). Mais le paradoxe de l'Évangile, c'est que Dieu confère cette autorité suprême à celui qui se soumet à un destin de pauvreté, d'humilité (8,20; 20,28) et de mort: bien que Fils de l'homme, Jésus sera livré (17,22; 20,18; 26,224.45). Le Fils de l'homme pourra d'autant mieux juger les hommes qu'il aura partagé le fond de leurs détresses.

 

La question de l'identité de Jésus “Qui est-il ?”

Cette question parcourt l’ensemble de l’évangile de Matthieu (et chacun des évangiles y répond à sa manière). Que nous dit la généalogie, selon Matthieu, pourquoi l’annonciation à Joseph, pas à Marie… pourquoi le baptême et les tentations ? Matthieu nous présente un Jésus en référence à Moïse : ch. 5-7 sur la montagne etc… Il n’y a pas un moment unique, précis, où Jésus est révélé, mais l’ensemble de l’Evangile c’est comme des témoignages, des pièces d’un puzzle pour que chacun découvre Jésus, sa relation à Dieu ainsi que nous et notre relation à lui et à Dieu. Comme dit saint Jean : “ Jésus a fait sous les yeux de ses disciples encore beaucoup d'autres signes, qui ne sont pas écrits dans ce livre. Ceux-là ont été mis par écrit, pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu'en croyant vous ayez la vie en son nom.”Jean 20, 30-31. Cet homme Jésus, dont ils partagent la vie, c’est lui “Dieu-avec-nous”. C’est annoncé dans le prologue (ch1, 23) et c’est confirmé à la fin de l’Evangile (28,20). Entre le début et la fin, l’ensemble du récit sur Jésus est là pour manifester qui est Jésus, quelle est sa relation à Dieu… mais aussi qui sommes-nous dans notre relation à Lui et à Dieu son Père : “Dieu avec nous”… Il ne faut pas séparer Pierre qui affirme “tu es le Fils de Dieu” du Pierre appelé Satan quelques lignes plus loin, ni de celui qui dira “je ne connais pas cet homme” au ch.26. Pourtant Jésus lui fait confiance, comme à nous. Sur l’identité de Jésus, chaque geste aussi est expression de qui il est, venu pour les malades et les pécheurs, pas les bien-portants, par exemple la rencontre chez Zachée (Luc 19), ou chez Simon (Luc 7), ou la série des rencontres chez Matthieu ch 8.


Pierre est-il le premier pape?

A Pierre Jésus affirme ’tout ce que tu lieras…’ Quelques lignes plus loin, c’est à l’Eglise toute entière assemblée qu’est confiée cette responsabilité (18, 18). Il ne faut pas séparer Pierre des Douze, comme on l’a trop souvent fait, surtout en France. Le pèlerinage à Rome de “Le jour du Seigneur” (21 avril2013) était instructif quand Mgr Bousquet refuse de séparer Pierre de Paul et quand il précise que l’Eglise est confiée à Pierre et aux Douze. (Pour en dire plus sur la conception de “Pierre seul chef de l’Eglise”, il faudrait relire les débats lors de Vatican I et de l’ultramontanisme. Vatican II a complété la définition de Vatican I dans Lumen Gentium ch. 3). Quand Matthieu écrit que “ Jésus donne à Pierre les clés du Royaume ?” veut-il faire comprendre que les Douze n’ont rien à voir dans cette affaire ??? Ce serait oublier que Jésus confie cette responsabilité de lier et délier à son Eglise 18,18. L’image “Tu es Pierre et sur cette pierre…” est à rapprocher de l’image d’Abraham, interprétée par Isaïe 51, 1-2, Abraham comme rocher, pierre et fondement de la multitude des croyants. Il faut plutôt voir ici une invitation de Jésus à comprendre que la puissance de la mort ne peut rien contre une communauté fondée sur la relation vivante d’un disciple avec son Seigneur, tout comme le fut la relation d’Abraham, le croyant, à Dieu. Confier les clefs… ce n’est pas un pouvoir mais une responsabilité confiée, celle de lier ou d’exclure de la communauté. Pierre et l’Eglise en ont cette responsabilité. Cela devrait évoquer d’abord l’inscription dans la communauté, par le baptême, plutôt que l’exclusion, par l’excommunication… Tout cela est de la responsabilité de la communauté autour de Pierre. Vouloir séparer Pierre des Douze dans cette responsabilité, ce serait une erreur.

 

La “profession de foi” de Pierre est le début d’un très long ensemble où Matthieu manifeste son attachement à Pierre avant d’en arriver à des paroles très dures, ch. 23… mais aussi bien avant, quand il fustige les communautés où l’on cherche à être le premier plutôt que le serviteur… manière de faire comprendre à ses lecteurs des années 80-85 que son évangile est le même que celui qu’a enseigné Pierre quant il était encore là. Par trois fois, Mathieu se réfère à Pierre : 16, 13-25 puis 17, 1-9 et enfin 17, 24-2. (Pour cette courte séquence, on imagine bien Pierre, chargé d’affaire et son attaché-case pour régler les affaires de Jésus !) Quand Matthieu rappelle “que le premier soit le dernier, se fasse serviteur”, etc…début du chapitre suivant, il remet en cause certaines pratiques de son Eglise où certains se pensaient comme au-dessus des autres. Quand au ch.23 Matthieu accuse les pharisiens d’être mal intentionnés, il n’oublie pas que bien des chrétiens de ses communauté sont aussi des pharisiens d’origine et sensibles aux paroles des pharisiens dans les années 80 ! Matthieu s’appuie sur Pierre avant de dire ses quatre vérités à sa communauté : Mon Evangile, c’est le même que celui de Pierre semble dire Matthieu ! C’est dans ce cadre qu’il faut entendre se renier…, ou se faire serviteur, et non se faire valoir au-dessus des autres.


L’expression Fils de l’Homme“ est assez délicate à interpréter. Son origine se trouve au livre 7 de Daniel (apocalypse qui veut redonner espérance au peuple juif persécuté). Les premiers chrétiens et Jésus lui-même ont utilisé ce terme pour faire comprendre que Jésus est bien celui qu’avait annoncé le prophète Daniel 7, 13-14. Pour votre recherche de compréhension-interprétation, n’hésitez pas à situer une phrase ou une section dans un ensemble plus large que les deux ou trois lignes qui posent question.