Amos et Osée fiche 07

Osée 12-14. Erreur et mort d’Ephraïm. Restauration.

Zoom, 14, 2-10 Anarchie politique et idolâtrie

 

Section précédente

Dans la section 6, nous avons pu découvrir un changement dans la manière de parler des relations de Dieu à son peuple. Après avoir fait l’exposé des reproches à Ephraïm, il eut été logique que Dieu inflige une punition comme c’était la coutume des suzerains envers leurs vassaux infidèles : punition et destruction. Or, autre chose apparait : “je suis Dieu et non point homme…” Os 11,9. Même si l’ensemble du texte reste embrouillé, voici que Dieu fait du neuf : ce n’est plus une relation de vassal à suzerain, mais une relation d’époux à épouse. “Que dois-je faire de toi ? Vais-je te livrer ? Vais-je te traiter comme Adma, c’est-à-dire comme Sodome ? Mon cœur s’agite au-dedans de moi. Je n’agirai pas selon l’ardeur de ma colère” (11, 8-10).

 

Lecture d’ensemble

Il est peut-être possible, dans les groupes ou personnellement, de faire un exercice de mémoire, un parcours d’histoire, même si c’est compliqué : à quoi font allusion, dans l’histoire d’Israël, les bouts de récit aux ch. 13-14 (voir jeu proposé ci-dessous).

Même si les sentiments de Yahvé, exprimés en termes d’épousailles ou fiançailles, laissent entendre un avenir positif, il n’est pas sûr que cela arrive. Pour Dieu et le prophète, trop c’est trop ! “En effet, Ephraïm m’entoure de mensonges.” Sont alors rappelés quelques éléments de la première histoire d’Israël après Abraham : Osée présente une succession d’évènements mis à l’actif de Jacob, mais qui ne le valorise pas. Le personnage de Jacob peut être trompeur. A partir de 12,3, Osée fait une énumération d’accusations, comme pour un procès (voir l’exercice proposé). Jacob vient supplanter son aîné Esaü ; ensuite c’est encore Jacob qui se bat contre l’ange du Seigneur (au bord du Yabboq). Le temps en Egypte puis au désert sont évoqués. Le Seigneur parle par l’intermédiaire des prophètes. Le récit évoque encore comment Jacob a travaillé pour son futur beau-père Laban, afin d’obtenir la main de Rachel après celle de Léa son aînée. Cet épisode peut laisser entendre que Jacob est “un homme à femmes”. Evoquer cette histoire ancienne a un objectif. Il s’agit, pour Osée, de rappeler à Ephraïm/Israël que son chemin, celui de ses ancêtres a été tortueux. L’accession à la royauté fut douloureuse, 13,11. Il faudrait relire les débats pour ou contre l’instauration de la Royauté en 1 Samuel 8…

Nous avons aux ch.12-13, des allusions à beaucoup de récits sur plusieurs siècles que l’on retrouve dans le Pentateuque, un peu comme le résumé d’un cours d’histoire mais aussi comme exposé en début de procès. Selon les exégètes, c’est à cette époque de l’histoire d’Israël que naît, “l’histoire deutéronomique”. C’est une construction dans laquelle les écrivains sacrés affirment que tout vient de Dieu, depuis les origines, depuis la création du monde jusqu’à la chute du royaume. Osée baigne dans cette culture et, s’il évoque une histoire tortueuse, c’est pour interpeller Israël : “Israël, reviens au Seigneur ton Dieu” (ch.14). Osée semble se référer à la généalogie plus ou moins légendaire de Jacob, en Gn 25-35, avec comme objectif de provoquer Israël à se référer à Moïse plus qu’à Jacob.

 

Les études historiques actuelles font découvrir qu’Israël s’est constitué davantage par agrégation de tribus indépendantes plutôt que suite aux divisions entre tribus hostiles (Nord et Sud) ou tribus favorables à la royauté de David. Le cycle de Jacob semble s’être développé dans la partie centrale du territoire (Samarie-Sichem). Les dieux vénérés sont les Baals et, peut-être, le dieu El (Béthel ; Israël), mais pas Yahvé, dieu vénéré en Juda. On suppose que la construction littéraire du livre d’Osée s’est faite autour de Béthel, car les Assyriens avaient épargné la ville. Les alliances entre Ephraïm, l’Assyrie et l’Egypte sont évoquées au début du ch.12. Mais ce n’est pas notre habitude de repérer les activités diplomatiques de ces temps-là, et pourtant ! Lorsque Osée parle du vent d’Est, il fait allusion à l’influence croissante de l’Assyrie, de là les tentatives d’alliance avec l’Egypte ou Aram. Pour Osée, Ephraïm ne vaut pas mieux que Canaan ; comme eux, les anciens habitants, il utilise des balances trompeuses, truquées (12, 8-10), tout comme l’avait déjà dénoncé Amos en 8,5.

 

Le zoom : 14, 2-10.

Ces quelques versets viennent dire un avenir possible de Dieu avec Ephraïm. Il commence par un appel “Reviens … Qu’ai-je encore à faire avec les idoles !” C’est avec de telles phrases que peu à peu grandira la compréhension d’un Dieu tout Autre.

« Apportez avec vous des paroles et revenez au Seigneur » est à rapprocher de la phrase suivante : « en guise de taureaux, nous t’offrirons en sacrifice l’hommage de nos lèvres (14,2) » C’est une manière d’exprimer un retour possible entre Dieu et son peule Israël. L’Assyrie ne nous sauvera pas, sous-entendu “mais Dieu le peut”. Ce dernier chapitre d’Osée est l’expression d’une conversion possible : “Oui, les voies du Seigneur sont droites”.

La méditation d’Osée avait commencé au chapitre 1 par un procès, une dénonciation de la prostitution sacrée, glissement vers les faux dieux. La méditation se termine par un retour possible d’Israël vers Yahvé.

Dans ce zoom, plusieurs innovations apparaissent qui auront du succès dans la littérature hébraïque, ce sont les comparaisons : Israël fleurira comme le lis ; comme la forêt du Liban ; ses rejetons ; sa splendeur comme celle de l’olivier ; comme le cyprès toujours vert… le blé, la vigne, le vin : “Qu’ai-je encore à faire avec les idoles ?” 14,8. Il faut une certaine hardiesse à Osée pour oser dire que Yahvé est le vrai Dieu de la fécondité, alors que c’était jusqu’alors la raison d’être des Baals !

 

Pour aller plus loin

En 12, 1-2 Il y est fait allusion à Juda (royaume du Sud) qui reste fidèle à Dieu-Yahvé à la différence du Royaume du Nord. De fait, Juda est plusieurs fois nommé alors qu’Osée ne parle qu’aux habitants du Nord. On peut parler d’extrapolation, ou d’erreur. En fait, il faut penser que les paroles d’Osée ont été relues, méditées et complétées bien après la chute de la Samarie, bien après la chute de Jérusalem. Les lecteurs successifs n’avaient pas notre maladie du copyright, et ils ne se gênaient pas pour ajouter des éléments en vue d’interpréter leur présent, pas seulement interpréter leur passé.  Le livre d’Osée n’a été fini d’écrire que vers -400, -350 !

 

13,8-10 : Israël, c’est un fils qui ne sait pas s’y prendre. Il semble qu’au-delà de la comparaison il faut interpréter les versets 8-10 comme une manière de dire : la solution, c’est de se tourner vers Dieu. Mais ce n’est pas la solution sage qu’Israël semble prendre. Le verset 14, qui interpelle la mort, semble avoir inspiré St Paul 1 Co, 15,55.

 

Un fil conducteur. Le livre d’Osée commence mal, avec une relation impossible entre un homme et son épouse. Et pourtant cette introduction, ch.1-3, se termine bien. Il en est de même pour la suite du livre, pour la relation entre Dieu et son peuple. Si au début, sortie d’Egypte et temps au désert, c’était le bon temps, il n’en n’est plus ainsi au temps du prophète qui annonce la destruction du pays par l’Assyrie. Et pourtant, à la fin du livre, Dieu se convertit à la réconciliation (relire le ch.11). Le châtiment et la rupture d’alliance ne peuvent être les derniers mots d’un Dieu, père, mère et époux de son peuple.

 

Si la lecture d’Osée fait référence à des situations dépassées, l’intuition qui guide Osée reste toujours valable pour nous aujourd’hui, dans la manière de comprendre notre relation à Dieu. Cette relation est à la fois une relation collective ! “Peuple de l’Alliance” et relation personnelle : celle d’un cœur à cœur, à la suite de Jésus-Christ

 

Jeu pour un parcours d’histoire, en 13 citations.

A partir des bouts de phrases ci-dessous, tirées des ch. 12-13, pouvez-vous voir à quels évènements de l’histoire d’Israël cela fait allusion (depuis Abraham jusqu’à la destruction de Jérusalem en -587) ? En groupe on peut se soutenir dans la recherche et les réponses.

1.       12,1 Quand Israël était jeune, j’appelais mon fils hors d’Egypte.

2.       12,2 Ils ont sacrifié aux Baals, offert de l’encens.

3.       Ils ne retourneront pas au pays d’Egypte, mais l’Assyrien sera leur roi.

4.       Te traiterai-je comme Adma ? (Voir fiche précédente, 6. Sodome et Gomorrhe transformés en Adma et Tséboïm).

5.       Je suis le Saint au milieu de toi.

6.       12,4 Dans le sein maternel, Jacob a supplanté son frère.

7.       12,5 Il lutta avec un ange.

8.       12,10 Je te ferai encore habiter sous des tentes, comme aux jours où je vous ai rencontrés.

9.       13,13 Israël (= Jacob) servit pour une femme.

10.   13,9 Te voilà détruit. Où donc est ton roi ?

11.    13,10 Où sont tes juges au sujet desquels tu disais : donne-moi un roi ?

12.   13,15 : Le vent d’Est viendra ; il desséchera les sources, tarira les fontaines.

13.   13, 16 Samarie sera punie.

 

Prier la Parole

Prière de conversion

Tu nous attends, Seigneur Dieu.

Il Te tarde de nous voir attentifs à ta parole.

Nous attendons la parole qui nous rende réceptifs.

Accorde-nous à ta voix, à ton silence.

Prononce vers nous ta parole de paix, ton fils, Jésus Christ.

 

Proche est ta parole, Seigneur notre Dieu ; proche est ta grâce.

Viens au-devant de nous, avec ta puissance et ta miséricorde.

Ne permets pas que nous soyons sourds à ta parole,

Mais ouvre notre cœur à Jésus Christ ton fils,

Lui qui viendra nous chercher et nous sauver,

Aujourd’hui et tous les jours jusque dans l’éternité.

 

Qui que nous soyons, Seigneur, Tu suscites la foi en nos cœurs,

Quoi qu’ils pensent de Toi, tu connais et acceptes tous les hommes.

Prononce ta parole sur le monde, envoie ton ciel parmi nous,

Fais luire ton soleil à jamais sur les bons et les méchants.

 

Eléments de réponse du jeu.

1.       12,1 Quand Israël était jeune, j’appelais mon fils hors d’Egypte (=la sortie d’Egypte)

2.       12,2 Ils ont sacrifié aux Baals, offert de l’encens (=le premier veau d’or devant le Sinaï.)

3.       Ils ne retourneront pas au pays d’Egypte, mais l’Assyrie sera leur roi (-722, et -589 : les déportations)

4.       Te traiterai-je comme Adma ? (Voir fiche précédente, 6, Sodome et Gomorrhe transformés en Adma et Tséboïm). Destruction de Sodome, en Genèse 19.

5.       Je suis le Saint au milieu de toi. (La tente de la rencontre, Exode 18 ; 26.)

6.       12,4 Dans le sein maternel, Jacob a supplanté son frère (= droit d’ainesse. Genèse 25

7.       12,5 Il lutta avec un ange (Gn 28, 10-22)

8.       12,10 Je te ferai encore habiter sous des tentes, comme aux jours où je vous ai rencontrés (Evocation du temps au désert, comme temps des fiançailles)

9.       13,13 Israël ( = Jacob) servit pour une femme (Léa et les péripéties pour obtenir Rachel, Gn 29)

10.   13,9 Te voilà détruit. Où donc est ton roi ? (Fin du Royaume du Nord, du Sud. Lire 2 Rois 25,22-26)

11.   13,10 Où sont tes juges au sujet desquels tu disais : donne-moi un roi. (1 Samuel 8-10)

12.   13,15 : Le vent d’Est viendra ; il desséchera les sources, tarira les fontaines (2 Rois 18. Destruction de Samarie en -722).

13.   13, 16 Samarie sera punie (2 Rois 18,9-18).

Article publié par Emile Hennart - Maison d'Evangile • Publié • 1123 visites