L'orientation de la catéchèse en France
Entre hier et demain. Présentation aux catéchistes mars 2005
le père Reichert responsable nationalLa catéchèse, entre hier et demain.
Avant la venue du père Reichert pour une journée de conférences (8 mars 2005), la revue diocésaine propose quelques éléments du dossier soumis à la réflexion des évêques de France. Dans la continuité de " proposer la foi ", publié en 1996, les évêques nous ont invités à " aller au cœur de la foi ". La transmission, que ce soit des valeurs ou de la foi, est un sujet auquel chacun est confronté, que ce soit en famille, ou dans la vie sociale. Nous attendons des outils tout ficelés... peut-être avons-nous encore à entrer davantage dans la relation avec le Christ et son Père dans l'unique Esprit, afin de témoigner du souffle qui nous habite. Jeunes, enfants et adultes, nous sommes tous appelés à entrer en catéchèse.
Se hâter doucement (Mgr Jaeger)
Il est normal que la transmission de la foi constitue une préoccupation constante dans l'Église. Elle ne s'impose pas comme un produit. Elle est affaire de relation personnelle entre Dieu et des personnes. Elle se reçoit comme un don. Le croyant, quel que soit son âge, découvre progressivement la nécessité d'organiser les contenus et les expressions de la foi. Il les partage avec les générations de fidèles qui l'ont précédé, avec celles et ceux qui aujourd'hui professent la foi avec lui. L'expérience appelle le savoir. La connaissance parle d'un attachement vécu.
Si
Les évêques de France ont ouvert, avec la collaboration de tous les services compétents et des chrétiens motivés, une recherche approfondie. Les remontées de la démarche " Aller au cœur de la foi " doivent conduire prochainement à l'élaboration d'un texte qui, voté par
A dire vrai, le cheminement est un peu plus lent que celui qui a avait été initialement prévu. La communion dans l'Église a de fortes exigences. Elle doit permettre un large accord qui va bien au-delà d'une majorité de type démocratique. Elle demande, en retour, plus de temps pour susciter et fonder l'adhésion. Au risque d'éveiller des impatiences, il est certainement plus sage de ne pas de brûler les étapes. Les évêques poursuivront le travail lors de leurs assemblées d'avril et de novembre
Les contributions au document "Aller au cœur de la foi"
éléments de synthèse; Ces textes s'appuient sur quelques documents présentés dans la revue nationale du CNER : " Tabga ", en particulier le n° 4 de Janvier 2005.
Les évêques avaient invité les chrétiens, à se saisir du document aller au cœur de la foi. C'était il y a deux ans. Plus de 1600 contributions personnelles ou collectives sont parvenues à la commission épiscopale de la catéchèse et du catéchuménat. Le père Yvon Bodin avait été chargé de présenter une synthèse de ces contributions.
Il relève tout d'abord l'intérêt porté à cette plaquette, relayé par les catéchistes et les pasteurs : " Tout d'abord, l'intérêt porté à l'appel "Le document des évêques a fait s'exprimer l'attachement de tout un peuple multicolore et bien vivant à sa foi et à son Église. Ce peuple a fait un très bon accueil à la démarche proposée, jugeant l'initiative des évêques utile et courageuse. Elle a même suscité chez beaucoup de la reconnaissance et chez certains de l'admiration. [...] On apprécie l'invitation faite à prendre la parole, à donner son avis, à partager la réflexion. ". Des contributions nombreuses sont parvenues, diverses par leur provenance et variées par leur réflexions.
Des réponses très diverses
"C'est vraiment le tout venant qui s'exprime dans la diversité des tranches d'âge, des situations familiales, des responsabilités sociales ou ecclésiales", souligne le rapport. "Le livret 'Aller au cœur de la foi' a eu un effet déclencheur de toutes les convictions, mais aussi de toutes les attentes et de toutes les questions, pour le meilleur et parfois pour le moins bon. On recueille des témoignages empreints du meilleur esprit, d'une grande sérénité ecclésiale, mais on peut tomber sur des réponses faisant cas d'une grande violence de ton. "
Le rapport du père Yvon Bodin propose un classement des contributions selon trois sensibilités: la contestation, la déploration et la refondation. Chez les uns, s'exprime "la résistance de toute une génération à un certain désenclavement du catéchisme, à cause d'un passé de chrétienté très riche", chez d'autres, " l'attachement du chrétien lambda à son Église, à sa foi, à son catéchisme, à ses prêtres. Et, à cet égard, la référence au Mystère pascal a emporté l'assentiment général, comme repère fondateur et gage assuré de renouveau. "
Des avis sur la catéchèse qui tiennent à cœur
Dans la troisième partie, le rapport résume "ce que pensent les gens de la catéchèse, ce qu'ils attendent". Elle relève une variété dans les propositions. "Il ne faut pas attendre de ces propos une vision claire et complète. Les repères de beaucoup sont trop effacés, leur vision de l'Église est trop floue, leur pratique trop solitaire. Même si ces propositions sont divergentes, voire contradictoires, donc sujettes [...], on tenait à les dire parce qu'elles tenaient à coeur. " L'aspect le plus souligné par les contributions est le passage obligé par les communautés chrétiennes, les contributions parlant plus de la vie des communautés chrétiennes que de la catéchèse en tant que telle. "On a ainsi compris, souligne le père Bodin, que l'Église devient le sujet de la catéchèse [...] Aussi, massivement les écrits fournissent moins des recettes à mettre en œuvre qu'ils ne parlent de la nécessité de réformer la vie de l'Église" .
Un texte national pour l'orientation de la catéchèse se dessine.
Un esprit commun, des orientations.
Des orientations se dessinent pour un renouvellement de la catéchèse. Ce sont des lignes directrices, des visées communes pour l'ensemble de Dieu, à partir desquelles des propositions concrètes pourront être travaillées. Il ne s'agit pas d'un nouveau catéchisme tout fait, prêt à l'emploi. Il s'agit de donner un esprit commun aux recherches et réalisations qui fleuriront dans les prochaines années. La première partie du document est comme une base de travail. Elle a été acceptée et voulue par les évêques lors de l'assemblée plénière.
Pour les évêques, la catéchèse ne peut être un "à part, spécial enfants" dans la vie de l'Eglise. La catéchèse a besoin de la vie des communautés chrétiennes, parce que la vie ecclésiale est comme le terreau nécessaire à l'action catéchétique. En ce sens, Mgr Garnier, lors de la présentation de graines de parole, rappelait que les parents eux-mêmes étaient responsables du premier éveil à la foi. Graines de paroles dans sa mise en œuvre, suppose la participation des différentes composantes de la communauté chrétienne. On ne peut se contenter de déléguer à un service aussi compétent fut-il, le soin de "faire la catéchèse", car l'ensemble des chrétiens est appelé à devenir participant de la démarche catéchétique. Dans l'Église, en effet, tout baptisé est responsable de proposer la foi, même s'il appartient aux services de catéchèse d'élaborer des instruments catéchétiques pour différents lieux et différents âges.
Vers une organisation concrète
La seconde partie du document transcrira les orientations dans l'organisation concrète de l'action catéchétique. On y trouvera par exemple des indications pour la formation des personnes sur qui reposera la responsabilité catéchétique de l'Église: les catéchistes, les responsables de communautés chrétiennes, la communauté chrétienne elle-même... Cette seconde partie traitera également la question des instruments catéchétiques et de leur approbation. Mais dès à présent, les évêques ont décidé de prévoir plusieurs modalités d'organisation, parce que tout ne sera pas possible partout de la même manière et au même rythme.
Quatre principes d'organisation
Les évêques ont approuvé quatre principes directeurs pour des organisations diversifiées et complémentaires de l'action catéchétique. Ils orientent la seconde partie du Texte national.
1) Parmi les principes d'organisation les évêques maintiennent une organisation de la catéchèse par âges et étapes de la vie, mais qu'elle soit souple par rapport aux années de la vie scolaire. Aussi parlent-ils d'étapes, plutôt que d'année de scolarité : l'étape des 6-8 ans, l'étape du mariage etc...
2) On y découvre une invitation à être attentifs aux lieux de regroupement et de vie (la famille, les quartiers, les établissements fréquentés, les aumôneries, les mouvements, mission étudiante. . .).
3) On y trouve une invitation à articuler davantage la catéchèse sur l'année liturgique. Cela ne signifie pas une "petite catéchèse" avant la messe du dimanche.
4) Une invitation à proposer des itinéraires limités dans le temps, en réponse aux demandes sacramentelles. Ces itinéraires devraient faire place davantage à des temps en équipe, à des temps qui tiennent compte des étapes liturgiques. Dans le même sens, ces parcours ne devraient pas s'arrêter à "l'avant "' ,mais à l'après, c'est-à-dire, à aider celui qui a reçu les sacrements à en vivre.
Si d'aucuns ne s'en étaient pas rendu compte, à la lecture de ces quelques lignes, peut-être faut-il préciser que les évêques, quand ils parlent de catéchèse, ne s'arrêtent pas aux 8-11 ans, mais qu'ils pensent à l'ensemble des hommes et femmes, enfants, jeunes et adultes. Ils évoquent la nécessité d'une catéchèse à tous les âges de la vie.
Deux intuitions pour l'orientation de la catéchèse :
Monseigneur Christophe Dufour, interviewé pour la revue Tabga retenait deux intuitions pour le renouvellement de la catéchèse en France : la communauté chrétienne comme premier lieu de la catéchèse et une pédagogie qui soit une initiation
Une communauté confessante.
La communauté chrétienne doit être le milieu de vie de la catéchèse ; la transmission de la foi c'est d'abord la transmission d'une vie. La catéchèse ne peut être résumée à un enseignement ; la foi est comme une vie qui a besoin d'être nourrie pour croître, elle n'est pas qu'une intelligence. Il lui faut une mère ; cette mère c'est la communauté. À Lourdes, les évêques ont parlé de communautés confessantes. Enfants, jeunes, parents, recommençants, catéchumènes, néophytes, tous ont besoin de vivre dans des communautés confessantes, d'entendre la confession de foi de ces communautés.
Une pédagogie de l'initiation.
Le mot d'initiation a plusieurs sens. Parler de pédagogie d'initiation c'est inviter à inscrire le Mystère pascal dans l'existence des personnes, en le regardant se déployer dans tout l'Évangile, un petit peu comme sur le chemin d'Emmaüs. Invitation à faire devenir personnelle cette démarche qui fut celle des premiers disciples. Une autre manière d'exprimer l'intuition de cette pédagogie ce serait de dire " faire l'expérience de... " ; faire l'expérience concrète de vivre l'évangile au temps présent, faire l'expérience de la prière, des sacrements, par la participation effective à ces temps de vie communautaires indispensables pour que grandisse la foi
Dans combien de temps ?
A cette question, Mgr Dufour répond : " Tout le monde attend rapidement des décisions concrètes. Elles viendront. Un processus de transformation qui met en jeu le cœur de la mission de l'Église ne peut pas réussir d'un coup de baguette magique. Pour ceux qui seraient pressés, la meilleure nouvelle c'est que le travail continue dans les diocèses ".
Témoignage Une douce complicité entre catéchiste, parents et enfants
" Je fais route avec eux "
Heureux ! Comme ils ont l'air heureux et bien dans leur peau, les huit élèves de 6éme réunis, ce samedi matin-là, à Hallines, près de Saint-Omer, autour de Francine Leclercq, leur catéchiste.
Il y a une telle entente entre ces préados et cette maman de grands enfants -Francine fait le caté depuis les 7 ans de sa fille aînée qui en a aujourd'hui trente-trois - qu'on ne peut s'empêcher de chercher la formule de cette subtile alchimie. " Je ne suis pas un prof. Je ne suis pas le chef. Je fais route avec eux ", explique Francine, qui partage cette tâche avec Corinne Helleboid, en tandem avec elle depuis 4 -5 ans. Et les enfants approuvent : " C'est une copine... Oui, une " grande " copine... C'est comme une grande sœur ".
L'osmose est aussi au sein du groupe. On parle beaucoup mais on écoute beaucoup l'autre, aussi. " C'est parce qu'on se connaît bien maintenant ", explique l'une des filles. Ici on a appris à se connaître mieux alors qu'on croyait se connaître depuis l'école primaire ".
Cette connaissance, ce respect mais aussi l'amitié qui soude le petit groupe c'est au cours des dossiers choisis qu'ils l'ont bâtie peu à peu. " Les sixièmes mènent l'enquête : qu'est-ce qui change pour nous cette année ? " leur a permis d'échanger leurs interrogations, leurs petites angoisses de rentrée en collège. " Noël ", leur dossier préféré, a permis de faire la part des choses entre le folklore de Noël, le Noël affaire de gros sous et la fête, celle de famille et celle des chrétiens. Point fort pour toute l'équipe, ils sont allés animer la veillée pascale paroissiale avec les enfants de la commune voisine.
Et les parents dans tout ça ?
Et les papas et mamans dans tout ça ? Et bien, ils viennent juste d'être mis à contribution pour aider leur enfant à écrire son " histoire avec les autres et Dieu dans mon histoire ", à chercher ses racines.
Naissance, fête du baptême, choix du prénom, du parrain ou de la marraine... Chaque enfant constate qu'en parlant avec ses parents il a appris des choses qu'il ne connaissait pas sur lui-même ou sur sa famille. Et le lien entre l'enracinement dans sa propre famille et l'enracinement dans la grande famille des chrétiens n'a pas échappé à ces enfants à l'esprit vif et ouvert, certes, mais au cœur aussi prompt à s'ouvrir lui aussi.
Témoignage Pastorale en aumônerie de l'enseignement public et laïcité
" Respect de chacun ne veut pas dire taire la foi qui nous fait vivre "
Martine Gatoux, mère de deux enfants, est animatrice pastorale à l'aumônerie de l'enseignement public de Boulogne-sur-mer, depuis septembre 1989, avec Catherine Ballin. Elle témoigne aujourd'hui de ses convictions par rapport à la laïcité.
" L'aumônerie se veut ouverte à tous quelles que soient les convictions philosophiques et religieuses de chacun. Le royaume de Dieu ne peut se construire sous la contrainte et c'est donc dans le respect et l'acceptation de la différence que nous pouvons grandir et faire grandir. Mais respect de chacun ne veut pas dire taire la foi, qui nous fait vivre.
Quand un jeune pousse la porte...
Quand un jeune pousse la porte de l'aumônerie, il doit savoir qu'il sera accueilli tel qu'il est dans un lieu d'Église. Certes, il s'agit de l'Église du seuil mais c'est l'Église quand même. L'oratoire n'est surtout pas un passage obligé mais un passage proposé. Il ne s'agit pas pour nous de faire du prosélytisme mais pouvoir proposer à chacun, s'il le désire, la rencontre du Christ, en offrant des seuils à respecter. Proposer, c'est permettre à chacun d'être confronté à l'Évangile. Mais, je le rappelle, il nous faut accepter que, parfois, un jeune pousse la porte et ne nous demande rien car, à ce moment-là, il n'attend rien de nous ".
Des partenariats vécus au quotidien...
Martine Gatoux constate : " Avec l'école, nous avons vécu, il y a quelques années, une plus grande ouverture, surtout dans les situations éducatives difficiles. Mais, depuis quelques temps, une certaine méfiance polie nous oblige à être un peu plus en retrait. Nous continuons à communiquer mais différemment. Les rapports de personne à personne sont plus faciles que d'institution à institution. Il n'y a pas une réelle hostilité de la part de l'institution scolaire mais on sent que chacun doit rester à sa place. Et nous ne forçons pas les barrières même si la loi nous l'autorise.
Nous partageons les mêmes valeurs que l'École veut promouvoir et c'est sur ce terrain là que nous pouvons agir. Il en est de même pour les autres partenaires. Ainsi, pour la journée de lutte contre la misère organisée par la mairie de Boulogne ou pour le ramassage des produits alimentaires par l'ABAL (banque alimentaire de Boulogne-sur-mer) nous sommes sollicités et participons à l'organisation des différents projets. Là où il y a un projet commun nous relevons ensemble le défi et coopérons tous, chacun le faisant au nom de ses convictions, qui peuvent être différentes ". Rappelons que la journée mondiale de lutte contre la misère est une initiative d'ATD Quart-Monde. " Depuis quelques années, ajoute Martine, la mairie de Boulogne invite les différents partenaires dans ce cadre-là à sensibiliser l'opinion publique à la pauvreté. Cette année, ce fut par la distribution sur les marchés boulonnais, des journaux d'ATD " Résistances ". Les jeunes de l'aumônerie n'ont pas participé, en fait, à la distribution mais ont réalisé des panneaux qui ont été mis en stand sur les marchés. Ils y ont analysé les mécanismes de la pauvreté à l'aide des nombreux témoignages du journal. Ils ont aussi regardé les moyens pour tenir et vivre " debout ". Pour ce qui est de la Banque alimentaire de Boulogne, depuis quelques années les jeunes de l'aumônerie sont sollicités pour participer à la collecte alimentaire dans les grandes surfaces boulonnaises, le dernier week-end de novembre ". Dernièrement, enfin, l'aumônerie a été demandée pour animer des ateliers de travaux manuels dans un quartier populaire dans le cadre du marché des associations de ce quartier. Elle a proposé des cartes de vœux à confectionner ainsi que des crèches.
Partenariat et actions ponctuelles
Avec ATD et la Banque alimentaire
Avec les associations
A partir de ce dernier vécu Martine Gatoux s'interroge : " La laïcité ne nous contraint pas à cacher ce que nous sommes, mais faut-il, dans un espace public où les parents nous confient leurs enfants sans connaître notre identité oser une approche catéchétique ? C'est un équilibre à trouver au quotidien, un défi à relever qui nous remet constamment en question ". Mais, n'est-ce pas là l'Évangile au défi de la modernité ?
JP. Chavaudra