Servir le dialogue de Dieu avec nous

Journée de pré-rentrée diocèsaine 2008

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Servir le dialogue de Dieu avec nous Prérentrée 2008  
Servir le dialogue de Dieu avec nous
Servir le dialogue de Dieu avec nous
S’il est une journée à ne pas manquer, c’est bien celle de la prérentrée organisée chaque année par le service de catéchèse, l’inter-service ados et l’Enseignement catholique. Quatre cent cinquante personnes ont répondu présent. Marie-Laure Rochette, du service national de la catéchèse et du catéchuménat, avait accepté l’invitation d’animer la matinée.
1- Aborder les textes de l’EcritureServir le dialogue de Dieu avec nous Marie-Laure Rochette  
Servir le dialogue de Dieu avec nous
Servir le dialogue de Dieu avec nous
 

 

 

La réflexion proposée portait sur la place centrale de la Bible en catéchèse dans la perspective de la nouvelle orientation et du congrès de la responsabilité catéchétique, Ecclésia 2007. Son propos : en catéchèse, comment conduire au texte biblique pour rendre possible l’expérience du dialogue que Dieu veut sans cesse nouer avec les hommes ? Ce fut tout à la fois une méditation et une formation en vue de mettre en œuvre la phrase du décret sur la Parole de Dieu "Dieu invisible s’adresse aux hommes comme à des amis et converse avec eux pour les inviter à entrer en communion avec lui et les recevoir dans cette communion" (Vatican II, Dei Verbum n°2).
 
Méditer cette phrase devient invitation à reconnaitre que l’initiative vient de Dieu, et nous, avec toute notre bonne volonté, nous avons souvent à l’esprit qu’il nous revient de provoquer le dialogue des catéchisés ou des catéchumènes avec Dieu… Nous avons aussi le désir d’enseigner les vérités de la foi, alors qu’il faut servir ce dialogue que Dieu inaugure avec chacun et chacune. Le texte national pour l’orientation de la catéchèse, publié en novembre 2006, invite à entrer dans la dynamique de servir le dialogue que, sans cesse, Dieu veut nouer avec les hommes. Les animateurs ont donc reçu cette matinée comme un appel à se repositionner devant ce Dieu qui en Jésus-Christ est d’abord personne qui se communique. Nous avons alors à recevoir les textes bibliques comme textes qui viennent nourrir cet échange, et non comme une somme de connaissances. La façon dont Dieu va initier ce dialogue va toujours passer par des dialogues, des évènements de notre vie, la liturgie, l’Ecriture, etc.

 

 

Dans une première partie, Mme Rochette invite chacun à entrer dans une pédagogie d’initiation qui mettra en premier le désir de servir  la rencontre avec Quelqu’un, avant d’assouvir le désir de communiquer les connaissances de foi. Plusieurs fois, l’assistance aura souri devant les exemples de l’animation habituelle, où l’on se rassure en allant chercher des textes bibliques par thème, une phrase par-ci, une autre par-là, pourvu qu’elle confirme ce que l’animateur souhaite « faire passer » ! Sourire encore, à propos de la recherche sur les contenus cachés des textes : « qu’est-ce qu’il veut dire ». Est-ce bien ainsi que se fera, au plus intime, la rencontre avec le Vivant ? N’avons-nous pas à faire découvrir : « Le Seigneur désire te parler ».
En parcourant Dei Verbum, nous sommes conduits ailleurs, appelés à nous organiser différemment. Nous sommes amenés à découvrir Dieu comme quelqu’un à découvrir, quelqu’un qui attend notre réponse, et non apprendre quelque chose à propos de Dieu ?
Un contenu ou une personne
Dans cette première partie encore, Mme Rochette invite à découvrir comment dans la liturgie nous recevons la Parole comme Parole vivante : “nous rendons grâce à Dieu” après la première lecture, ou “louange à toi Seigneur Jésus” après l’évangile… sans oublier les gestes qui entourent le livre : la procession, l’élévation après l’Evangile, la médiation que constitue celui qui proclame, pour tous, la Parole de Dieu comme une parole de vie. Beaucoup de gestes sont posés ‘sans explication’ : ouvrir le livre ; faire trois petites croix sur le front, la bouche, le cœur: autant de signes qui nous rendent disponibles à accueillir le Seigneur qui nous parle.
 
Animateurs en catéchèse, il nous revient d’entrer dans le mouvement de Dieu qui se donne. « Il a plu à Dieu dans sa sagesse et sa bonté de se révéler en personne et de faire connaître le mystère de sa volonté grâce auquel les hommes, par le Christ, le Verbe fait chair, accèdent dans l'Esprit-Saint, auprès du Père et sont rendus participants de la nature divine. Dans cette révélation le Dieu invisible s'adresse aux hommes en son immense amour comme à des amis; il s'entretient avec eux pour les inviter et les admettre à partager sa propre vie ». Nous avons tant envie de dire des choses sur Dieu que nous oublions parfois de laisser Dieu lui-même parler !
La révélation
Même le mot révélation peut prêter à confusion. Nous savons que Dieu se révèle mais nous fonctionnons comme si nous allions à la recherche de vérités révélées.
La révélation c’est la découverte, comme d’une relation amoureuse, d’un Dieu veut participer à notre conversation humaine, au cœur de ce qui nous préoccupe, de ce qui nous rend heureux, de ce qui fait le quotidien de notre vie, avec nos émotions, avec tout ce que nous portons. Dieu parle pour tisser de la relation. Il ne parle pas directement, mais par Jésus-Christ, Parole faite chair : la Parole, c’est quelqu’un.
2- Dieu s’adresse aux hommes comme à des amis

Dans la seconde partie de son intervention, Mme Rochette rappelle que le Christ ne prend pas la Parole dans un monde rêvé, plus ou moins parfait, à des hommes et des femmes plus ou moins saints. On pourrait imaginer que Dieu attende que nous ayons fait des progrès ! Il nous prend là où nous en sommes, avec diverses médiations : la parole des prophètes, la parole de ceux qui nous ont précédés ou accompagnés, mais aussi dans les évènements de notre vie. Ils sont des lieux où nous pouvons voir la Parole de Dieu en acte prendre corps.

A ceux qui pensent que les temps actuels sont plus défavorables qu’hier pour accueillir l'Evangile, la Lettre aux catholiques de France répond non ! Dieu s’adresse à chacun tel qu’il est, où il en est. Les personnes engagées dans le monde des prisons ou de la santé peuvent en rendre compte. Dieu cherche des partenaires… il cherche le dialogue, il attend notre réponse. Si nous disons non aujourd’hui, il recommencera demain ! Il est le Dieu des multiples conversations qu’il instaure dans le quotidien et dans l’histoire de chacun. La rencontre de Dieu n’est donc pas dans la bonne réponse aux questions que pose l’animateur, elle se fait dans les conversations où se tisse la relation avec Lui.

3-    Laisser la Parole de Dieu faire son travail

Les chrétiens sont habitués à dire que la Parole de Dieu est efficace : « il dit et cela est » (Genèse ch.1). La Parole appelle et transforme la personne qui la reçoit. Les catéchumènes en font l’expérience, eux, appelés à la conversion ; mais l’animateur aussi est appelé à se laisser transformer, convertir par la Parole, dans la mesure où il prend le temps d’accueillir cette Parole et de répondre. Il en sera de même pour les maisons d’Evangile, les animateurs auront à vivre pour eux-mêmes l’expérience qu’ils proposeront à d’autres : se laisser transformer par la parole, c’est laisser la Parole de Dieu faire son travail en nous… en ceux que nous accompagnons.

 

Par peur de ne pas en dire assez l’animateur ne laisse pas toujours la conversation s’instaurer entre Dieu et l’ami qu’il souhaite rejoindre dans la quotidienneté et l’imprévu de l’existence. Là où ca résiste, là se joue quelque chose de fondamental, et la Parole de Dieu y fait son travail. Que l’animateur ne prenne pas la place de l’autre pour donner la réponse ! Il est au service de la rencontre, mais c’est Dieu qui invite à entrer en communion avec Lui et qui le reçoit dans cette communion.

 

4-    Prendre au sérieux la pédagogie d’initiation
« La pédagogie d’initiation prend sa source dans l’Ecriture affirme le texte national pour l'orientation de la catéchèse ». De cette phrases découlent trois enjeux principaux.

Un premier enjeu est de passer d’une parole écrite à une parole vivante,

passer de la religion du livre à la Parole de Jésus. Si nous recevons les évangiles comme une succession d’histoires sur Jésus, si nous les lisons comme des reportages journalistiques, nous risquons de ne pas les recevoir comme des catéchèses, des témoignages où la Parole de Jésus vient nous rejoindre. Les évangiles sont le lieu où résonne la Parole de Dieu, pour aujourd’hui. Cette réflexion n’est cependant pas une invitation à délaisser la part d’exégèse indispensable pour mieux connaitre le lieu, le contexte, la situation politique où furent écrits ces textes.

Un second enjeu consiste à passer du contenu de foi à la rencontre croyante.

Cela demandera du temps aux animateurs pour se laisser transformer, tant ils ont été formés à étudier les contenus des textes… Or ces textes sont avant tout la médiation d’une rencontre. Ils sont “une parole qui s’adresse aux hommes avant d’être un texte à étudier” (Texte national pour l’orientation de la catéchèse, p. 50). C’est une invitation à se laisser instruire par Dieu lui-même, et donc de passer du catalogue de choses à croire, à la révélation qui est “Dieu qui se révèle lui-même”, personne qui s’adresse à l’homme.

Un troisième enjeu, tout aussi subtil mais indispensable, est de passer du “vouloir faire comprendre” à “se mettre à l’écoute”. Chaque animateur a, chevillé au corps, le désir de bien faire son travail d’explication, de compréhension, et on ne peut lui en faire le reproche. Pourtant l’Orientation (‘nouvelle’ comme le disent certains) insiste sur le dialogue que Dieu veut sans cesse nouer avec nous. Et nous sommes au service de ce dialogue. Comment l’esprit des animateurs et catéchètes passera-t-il du « il faut que l’enfant ait compris que… que le catéchumène sache que… » à « tout faire pour que la relation à Dieu puisse se nouer ? »

Au moment de conclure,

 Mme Rochette reprend une citation du père Maxime Leroy : « Personne n’est propriétaire d’une vérité que d’autres sembleraient ignorer… tous sont invités au festin de la Parole où chacun donne et reçoit. Chacun prend sa place avec son histoire singulière, son génie propre, son expérience, ses joies, ses blessures Tous prennent place… poussés par l’Esprit qui déjà travaille leur existence. Au centre de la table, il y a un tiers, l’Ecriture, qui fait surgir parmi nous la Parole de Dieu tandis que nous nous entre-tenons ».  Texte paru dans le n° 517 d’avril-juin 2008 des Cahiers de l’Atelier. Le père Maxime Leroy a été directeur du Cipac, (Centre interdiocésain de pastorale catéchétique).

Emile Hennart

 

P.S. Dans la cinquième partie de l’intervention furent présentées huit repères pour conduire une démarche de catéchèse qui passe par la médiation des Ecritures. Vous trouverez ces repères ci-dessous.

Huit repères  pour conduire une démarche de catéchèse qui passe par la médiation des Ecritures.

 

1. Vivre la démarche pour soi-même, entre animateurs, avant la rencontre.

 

Accueillir la Parole de Dieu pour nous-mêmes, entrer dans ce processus de conversion. Comment conduire un groupe dans ce processus si nous n’avons à aucun moment pris nous-mêmes ce chemin-là ? Ce ne serait pas sérieux. Nous n’avons jamais le temps ! Sauf si c’est pour chercher et expliquer des bricolages etc. Nous sommes devant des choix fondamentaux. Ainsi en est-il de l’évangile de Marc : vivre d’abord pour soi-même cette démarche. Donner à tout animateur l’occasion de vivre ce chemin-là. Prière de bénédiction de catéchiste (bien antérieur au texte national) : « Regarde Seigneur, tes serviteurs et tes servantes, qui se proposent pour assurer la catéchèse. Par ta bénédiction, confirme leurs dispositions, pour qu’ils s’instruisent d’abord en méditant ta Parole » (et non qu’ils apprennent bien les articles du catéchisme).

2. Créer un compagnonnage avec les personnages des récits bibliques.

 Il faut prendre du temps, pour rester un peu au cœur du texte, ce qui se passe dedans. Quand on a trois versets pour illustrer un thème, on n’aura pas beaucoup de facilités. Rien ne nous empêche quand le parcours nous offre royalement trois versets, d’aller chercher au minimum la péricope entière et de se donner la chance de passer du temps avec cette parole-là. Tant que nous avons les anciens parcours, nous aurons cette manière de faire, à changer radicalement. Demeurer avec les personnages, qu’est-ce qui leur arrive, ils rencontrent le Christ, qu’est-ce qui se joue dans leur histoire à ce moment-là ? Prendre le temps, c’est dire aussi  : quelque chose s’est passé dans la vie de Zachée, quelque chose qui devrait se passer aussi dans la vie de la personne qui écoute la Parole. Regarder ce qui s’est passé dans la vie de Zachée, et après, je ne sais pas à l’avance ce qui va se passer pour cette personne, puisque je ne sais pas ce dont elle est porteur à ce moment-là, selon son âge, son histoire…

Pour nous aider, il y a le travail avec les récits bibliques qui suppose un travail de mémorisation, les noms, cf. les méthodes actuelles, comme les cantilènes bibliques,, les chœurs parlés, les récitatifs de Jousse, etc. Des méthodes qui prennent des textes entiers de la Bible, qui habitent alors le cœur, la pensée, la prière des jeunes, des adultes etc. Non pas pour expliquer ce que le texte veut dire, comme un résumé à la fin, mais pour méditer les véritables paroles du texte.

3. Préparer un apport de type exégétique du texte.

Tout ne va pas se faire tout seul. Si nous remettons l’initiative dans la main de Dieu, nous avons aussi à moment ou l’autre, besoin de nous appuyer sur une aide exégétique : connaitre le contexte du texte, le style littéraire, ce qu’il y a avant, après ce texte dans l’évangile, qui est l’auteur, etc. Il y a pour cela une mine dans les notes de votre bible et dans les introductions… Si votre bible n’en comporte pas, il faut vous en offrir une autre ! Il y a aussi d’autres lieux proposés pour cela. Il faudra toujours, à un moment ou l’autre se familiariser avec ce langage particulier de l’Ecriture, pour qu’il soit audible. Quand une personne que vous accompagnez vous pose une question, vous avez votre petit bagage, qui évite d’être déstabilisé.

4. Accepter de lâcher ses idées toutes faites à propos du texte.

 Écouter ce qui est réellement écrit, dit. Dieu prend l’initiative de se faire connaitre tel qu’il est et non tel que nous voudrions qu’il soit. Quand on scrute l’Ecriture, on découvre soucent des choses non encore vues ; et ainsi, nous découvrons quelque chose qui nous apparait, et ce faisant qui ouvre notre oreille et peut nous transformer. Je n’avais pas vu pas cela comme ca… Si nous abordons le texte en disant : ce texte, je sais, je le connais déjà… Il faut donc accepter de repartir avec une oreille nouvelle, et pouvoir partager cette expérience.

 
5. Entrer dans une démarche de questionnement
Les questions de soi-même et des personnes que nous accompagnons. S’il n’y a que des réponses, ca cerne. Il n’y a pas de réflexions sur une réponse. La question, elle, ouvre un espace où la Parole de Dieu va pouvoir faire son travail. Il ne faut pas avoir peur qu’un catéchumène, un jeune quitte le groupe avec une question. Or beaucoup de catéchistes, d’animateurs, pensent que s’il n’a pas répondu à toutes les questions, ca ne va pas. Laissez-les partir avec des questions. Regardez dans l’évangile le nombre de rencontres où Jésus laisse partir l’interlocuteur avec une question, car alors un véritable travail intérieur peut commencer. Le travail ne va pas se faire pendant la séance de caté, mais après, pendant la semaine.
 
6. Laisser la parole circuler dans le groupe.  
Et même se taire le plus possible. Notre travail est surtout de relancer, de recentrer, de relancer de pousser un peu plus loin la réflexion et non d’avoir les réponses toutes faites, et donc pas de travail prédéterminé. On voit cela dans le travail avec Marc. “Le mieux est de prendre nous-mêmes la parole sur le texte lui-même”. C’est possible si l’animateur se tait-un peu- S’il parle tout le temps, comment voulez-vous que les autres prennent la parole, surtout s’ils n’ont pas été habitué à cela. Surtout qu’ils n’auront pas forcément osé, surtout s’il traine encore dans leur tête qu’il y aurait une bonne réponse à trouver. La prise de parole libre, personnelle fait un peu peur. “Est-ce que c’est la bonne réponse que je tente ?” Il faut beaucoup de temps pour les rassurer. Dites plutôt : “Qu’est-ce qui se passe au-dedans de toi depuis qu’on a commencé ?” Quelle question tu te poses, qu’est-ce qui te mets en colère ? Amer ? Qu’est-ce que tu trouves injuste, qu’est-ce que tu ne comprends pas ? Sinon on risque de juger le travail à la bonne réponse et non entendre le dialogue qui se crée[1]. Il faut que les colères, les non-compréhensions puissent se dire.
 

7. Laisser toute sa place à l’Esprit Saint.

Dans la plus grande tradition de l’Eglise, il y a toujours cette indication : lisons, écoutons, accueillons la Parole de Dieu à la lumière de l’Esprit. Une partie de nous-mêmes le sait, mais la plupart du temps, la pratique fait comme si on ne le savait pas. Combien de fois prions-nous l’Esprit-Saint avant notre lecture.

 

8. Conduire à la prière chrétienne.

Non plus parler de Dieu mais parler à Dieu. On s’engage à quelque chose de bien plus intime, d’où les hésitations. Beaucoup, à ce moment-là se retirent… là, je ne vais pas. Le premier chemin est de pouvoir soi-même prendre, entre animateurs, le chemin de la prière chrétienne. C’est indispensable, surtout si nous dans le groupe certains ne sont pas à l’aise avec la prière. Prier en chrétien ce n’est pas, prendre la parole en premier, c’est plutôt répondre (Cardinal Danneels). La parole divine précède, elle précède. La prière n’est pas un faire elle est plutôt un laisser faire quelqu’un de vivant qui vient à notre rencontre

 

[1] Je me souviens de la réaction d’un syndicaliste, en colère, il y a 40 ans à propos des ouvriers de la onzième heure. Ca fait quarante ans qu’il est en colère !

 

 

Quelques repères pour conduire une démarche de catéchèse qui passe par la médiation des Ecritures.

 

Article publié par Emile Hennart - Maison d'Evangile • Publié • 8113 visites