Tu es le Christ, fils du Dieu vivant.

21ème dimanche ordinaire

Isaïe 22, 19-23 ; Romains 11, 33-36 ; Matthieu 16, 13-20.

Tu es le Christ, fils du Dieu vivant.

 

Dans le parcours d’évangile selon Matthieu, Jésus et sa troupe de disciples reviennent d’un déplacement – en principe incognito en territoire étranger (territoires de Tyr et Sidon). Il vient d’être interpellé par une femme cananéenne, à la réplique facile, qui n’accepte pas la distinction entre les bons fils d’Israël et les chiens, qui pourtant se nourrissent des miettes tombées de la table ! Par deux fois, les disciples demandent qu’on renvoie ces gens qui dérangent leur intimité avec Jésus. La première fois, c’était lors de la multiplication des pains et la seconde fois, c’était à propos de cette femme. Jésus vient d’affirmer qu’il n’a été envoyé qu’aux enfants d’Israël, ce qui reste à vérifier !

 

Voici que Jésus demande qui il est. Nous connaissons la réponse, surtout celle de Pierre. Ce n’est pas une réponse d’après le catéchisme. C’est une réponse qui vient du cœur, une sorte de découverte qu’il a pu faire en fréquentant ce Jésus… fils de David, mais aussi fils de Dieu… Nous connaissons bien cet épisode que l’on appelle la profession de foi de Pierre à Césarée. Jésus affirme à Pierre : “Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise”. On a beaucoup utilisé cette phrase pour glorifier le successeur de Pierre, le pape, faisant de ce pape comme une idole. Il y a pourtant le mot Eglise qui termine cette citation. Un mot rare dans les évangiles. Il est peu probable que le Christ ait prononcé ce nom ‘Eglise’, car il appartient à la primitive Eglise plutôt qu’à l’époque apostolique. Ce mot désignera l'assemblée des chrétiens plutôt que la catégorie des clercs séparés du reste des baptisés.

 

Prenons le temps aujourd’hui de prier pour cette Eglise qui souffre, que le pape François invite à rebâtir. Il est peut probable que le Christ ait voulu construire une Eglise en séparant prêtres et laïcs, hommes et femmes. Pour lui, toutes et tous constituaient l’unique peuple de Dieu. Ce n’est pas Jésus qui a inventé le cléricalisme, dénoncé par le pape François. On peut imaginer que les clés soient confiées à Pierre pour que les gens y soient enclos…

 

On peut aussi imaginer que ces clés soient confiées pour ouvrir les portes qui donnent accès au peuple rassemblé. L’une des dernières images de l’Apocalypse offre la vision d’une cité resplendissante devenue tout entière maison de Dieu, un lieu où il n’y aura plus ni pleurs, ni larmes. C’est pour participer à la construction de cet ensemble que Pierre et les disciples sont appelés, non pour inventer des catégories de gens plus ou moins dignes d’accéder à Dieu. Le court extrait de la lettre aux Romains ne dit pas tout, mais il oblige à entendre : “Tout est de lui, tout est par lui, tout est pour lui”. A cette humanité aujourd’hui déchirée, divisée parfois, qui doute aussi d’un possible avenir, offrons la certitude que l’Eglise bâtie par Jésus s’offre comme chemin vers Dieu, pour tous et pour toutes, sans distinction.

 

(Précision : retenons que le mot prêtre vient de ‘anciens,’ ceux qui ont l’expérience, à qui sont confiés les baptisés, et non sacerdotal, mis à part pour le sacré). Abbé Emile Hennart