Il était perdu et il est retrouvé

4ème dimanche de carême

Josué 5, 10-12 ; 2 Corinthiens 5, 17-21 ; Luc 1-3..11-32

 

La première lecture, en trois versets, évoque la fin du temps au désert et l’entrée en terre promise. Il faudrait y ajouter le mémorial des douze pierres dressées au bord du Jourdain. Ce lieu, Guilgal sera souvent évoqué par les premiers prophètes, Osée en particulier, car Guilgal est le lieu de la célébration de la nouvelle Pâque, Lieu de l’alliance. Mais Gilgal deviendra évocation du reniement, des promesses d'alliance non tenues (relire le début du livre de Josué). Les quelques lignes lues aujourd’hui rappellent la fin du temps au désert et le début d’un monde nouveau.

 

Saint Paul aussi évoque un monde nouveau quand il parle de réconciliation obtenue par le Christ. L’évangile de ce dimanche nous est bien connu, avec son titre : le fils perdu et retrouvé. Nous devons méditer l’attitude de chacun des personnages : le père, le fils cadet et le fils aîné. Le récit de l’attitude de chacun est ciselé par le rédacteur pour orienter notre regard vers la miséricorde de Dieu et notre propre amour à développer. Devant le père plein de miséricorde, il faudra au cadet une confiance pour oser aller à la rencontre de son père. Pour le fils aîné… on ne sait pas quelle sera sa décision. Le père a ouvert la voie : tu es toujours avec moi… il fallait bien se réjouir et festoyer puisque ton frère est revenu.

 

Nous aurons prochainement des élections, et l’attitude du fils ainé peut nous interroger. En effet, les clivages se sont amplifiés dans la société et en particulier entre chrétiens de différentes obédiences. Il y a les fidèles de toujours, les tradis, les conservateurs, les purs, les “sens commun“, les chrétiens de gauche (ce qu’il en reste), les chrétiens des grandes fêtes et des grandes occasions, ceux qui ne pratiquent pas et les déçus, écœurés ces dernières semaines. Le pape a exclu quelques cardinaux, il en a conservé d’autres : tout cela écœure le peuple des croyants. Jean-Paul II avait refusé d’ouvrir les yeux sur la pédophilie et la pédérastie au sein de l’Eglise.

 

Certes, Benoit XVI avait essayé et commencé la réforme de la curie. Mais il n’avait plus la force de poursuivre la restauration. François s’y est essayé, en commençant par les finances et le C9, en incitant à sortir de nos murs et non à vivre entre nous, en cercle fermé. La dimension identitaire n’a que peu à voir avec l’Evangile. Beaucoup de chrétiens ont quitté la barque, cette barque avait aussi oublié l’héritage social du siècle dernier depuis Rerum Novarum de Léon XIII, puis la vie avec la société (Lumen Gentium et Gaudium et Spes en particulier). Nombre de chrétiens ont rejeté la dimension sociale de l’existence chrétienne pour suivre quelques gourous politiciens. Cette histoire récente et plus ancienne, il nous faut la relire à la lumière des trois personnages de l’Evangile de ce dimanche celui qui a quitté et celui qui refuse le retour de l'aîné. Ces trois personnages nous aident à recadrer l’originalité du christianisme, sinon nous risquons de voir les nouvelles générations s’éloigner encore plus de l’Evangile : “J’étais malade, en prison, mal vêtu et vous êtes venus jusqu’à moi” (Mt 25). Chacun y a à prendre de la graine, pas seulement les gilets jaunes !

 

Ce dimanche, il ne faudrait pas oublier la visite du pape François au Maroc cette semaine, ou en Arabie saoudite il y a quelques semaines. Cela devrait nous inciter à relire le récit des funérailles de notre Père Abraham (Genèse 25,9) : la Bible précise que les deux fils, Isaac et Ismaël, y sont allés… Ce n’était pas des frères ennemis, souvenons-nous en. Cela a quelque chose à voir avec l’évangile de ce jour. N’y a-t-il pas une invitation à vivre autrement notre existence chrétienne ? En effet les accueillis lors du jugement dernier posent la question : “Mais où étais-tu ? On ne t’a pas vu”. Ce n’était donc pas une question d’identité dans le troupeau, mais de proximité avec les plus petits. EH