De qui l'Eglise se rend-elle proche?

15ème dimanche ordinaire

 

 

Deutéronome 30, 10-14 ; Colossiens 1, 15-20 ; Luc 10, 25-37

 

 

L’histoire de cet évangile est fort connue sous le titre « le bon samaritain ». Comme nous connaissons l’histoire, nous survolons ce récit plus que nous ne portons attention aux détails. Alors nous ne voyons pas l’une ou l’autre astuce par laquelle Jésus renvoie le questionneur à exercer par lui-même son propre discernement, et à mettre en œuvre, mettre en acte l’action qu’il aura jugé nécessaire. Ce faisant Jésus transforme la compréhension de la religion qui demeure au fond de chacun : le désir est d’avoir une religion qui dise ce qu’il faut faire, et nous n’aurions qu’à obéir. Or Jésus invite à passer de cette religion du devoir vers une religion de conviction : « lequel des voyageurs s’est rendu proche de l’homme dans le besoin sur la route ? » C’est au questionneur de faire la réponse et non à Jésus de dire la Loi.

 

Je me souviens avoir entendu un prédicateur défendre le prêtre qui se détourne du blessé sur le chemin, au motif qu’il était pressé de réaliser son service cultuel au temple… Or le texte précise qu’il descendait, c’est-à-dire qu’il quittait Jérusalem, c’est-à-dire que son service était  terminé… ? Et dans cette liturgie qu’il venait de terminer, il avait sans doute proclamé et chanté dans une langue morte « Souviens-toi du Seigneur ton Dieu qui t’as délivré… ». Cet exercice cultuel ne semble pas avoir transformé le fond de son cœur. A peine a-t-il quitté la ville sainte qu’il en oublie le commandement d’aimer Dieu et son prochain.

 

Il serait dangereux de transposer dans l’aujourd’hui cette parabole. Mais le désir de le faire est aujourd’hui trop grand en moi. N’y aurait-il pas dans la religion actuelle trop de zélés ministres du culte qui officient solennellement dans les espaces sacrés, et qui en oublient le souci du prochain. Fort heureusement lors de la neuvaine à Notre-Dame des Ardents, un après-midi fut consacré à réunir les animateurs des nombreuses associations de bienfaisance de la ville d’Arras : c’était un louable exercice pour ne pas dissocier le culte de Dieu et des saints du service dû au pauvre. Mais est-ce bien le cas de tous ceux qui, cet été, se presseront dans l’une des nombreuses neuvaines à Marie ou commémorations et pardons en Bretagne?

 

Autre exemple tout récent : l’ACE vient d’inviter à prêter attention aux jeunes dans une société qui n’a pas de place pour eux .Faut-il enfoncer les malchanceux et les laisser par terre ?

 

Revenons à cet évangile : Jésus déplace la question de l’obéissance « que dois-je faire ? » vers la question du discernement « lequel s’est rendu proche de l’homme à terre ». Ce discernement est toujours à faire, que ce soit dans l’entreprise, la vie publique comme la vie de quartier. Encore faut-il remarquer qu’il y a des hommes, des femmes, des enfants à terre !