Dossier "La crise"

Dossier réalisé par le MCR

image001 image001   La crise économique nous submerge

  

J’aime bien en été, marcher pieds nus sur les belles plages du Nord. Je me place au sec près de l’eau à la marée montante ; je regarde les vagues qui se succèdent et viennent s’échouer sur le sable. Bientôt l’eau m’atteint, puis elle me dépasse, me contourne, m’environne ; prudemment je reviens vers la digue.

Le temps des vacances est le temps bienfaisant du rêve et de l’oubli ; mais bien vite, la réalité prend le dessus, et je pense à la crise économique qui m’atteint un peu et qui submerge les gens que je côtoie.

 

  

Nous sommes directement concernés

 

Les retraités constatent que la valeur de leur retraite stagne ; le pouvoir d’achat diminue ; heureux les propriétaires de leur logement et ceux qui ont terminé de rembourser leur emprunt. Certains sont piégés dans la spirale des prêts revolving qui volent légalement les pauvres gens. Se faire soigner à domicile, entrer dans une maison de retraite coûte cher. Lorsqu’un conjoint décède les rentrées financières baissent très fort. Parfois un fils perd son emploi ; il cherche une aide auprès de ses parents. Dans la commune une entreprise ferme et met les salariés au chômage ; nous connaissons des familles effondrées par ce cataclysme. Les restaurants du cœur aident de nouvelles personnes…

 

 

Nous ne sommes pas des autruches, regardons cette réalité complexe

 

épicerie sociale image002  Les trois articles de Pierre-Marie Empis, professeur d’économie à la faculté de Lille, peuvent nous aider à mieux comprendre ce qui nous arrive.

Les causes de la crise. C’est la faute à qui ? Aux banquiers, au capitalisme, aux actionnaires, aux patrons, aux hommes politiques, à tous ceux qui veulent toujours plus, à moi peut-être aussi d’une certaine façon ?

Il y a des défis à relever. Imposer une réglementation concernant l’argent et les finances, exiger une transparence, supprimer les paradis fiscaux, punir ceux qui blanchissent l’argent. Laisser entrer, au nom de la liberté, les renards dans le poulailler, c’est être complice de la mort des plus faibles. Et justement il est à craindre que certains vont profiter de la crise pour s’enrichir encore davantage au détriment des plus pauvres de notre pays et des pays les plus pauvres.

 

Que faire ?

 

Ressentir dans notre chair la morsure de la crise. Être en relation proche avec un chômeur, aller dans les lieux d’accueil du Secours Catholique ou du Secours Populaire pour écouter la « misère de mon peuple » comme dit Dieu dans la Bible. Nous avons la chance de participer au MCR, à partir de cas concrets vécus dans notre entourage parlons-en dans nos réunions.

La crise a une cause psychologique ; la méfiance généralisée s’installe dans les organismes ; les évêques de France nous aident à réfléchir et nous invitent à rétablir un climat de confiance et d’espérance. Et puis, il y a l’engagement dans une association de solidarité, la présence au conseil municipal, les élections. En juin nous avons participé aux élections européennes.

 

 

Roland Delplanque


 

1 - La crise, un moment de choix

  

Pierre-Marie Empis, professeur à la Catho de Lille image003  

 

Les causes

  

La crise est certes bien financière et bancaire : l'abondance de liquidités liées à la politique monétaire de crédits faciles aux États-Unis et les déséquilibres des paiements internationaux dans un contexte de dérégulation tous azimuts ont conduit à la situation actuelle, les banques contournant les règles prudentielles en se débarrassant du risque attaché au prêt en le reportant sur d'autres.

  

Cependant, si l'on y regarde de plus près, la débâcle financière est la contrepartie d'exigences excessives de rentabilité du capital (dividendes des actionnaires) ; elle renvoie aussi à la répartition des revenus, i.e. des salaires/profits.

  

Comme dans beaucoup de pays riches - sauf la France - la part des salaires a diminué, il a fallu accroître l'endettement pour soutenir la demande (endettement considérable aux États-Unis).

La consommation se maintenait grâce à des niveaux toujours plus élevés d'endettement, facilités par des taux d'intérêt faibles.

  

La faillite de la banque Lehman Brothers a paralysé les banques déjà en grande difficulté par les crédits subprime (crédits immobiliers accordés à des ménages n'ayant pas des revenus suffisants pour rembourser) ; elles sont alors devenues méfiantes les unes à l'égard des autres et ont freiné leurs prêts à l'économie.

  

De là la crise financière s'est propagée au secteur productif : les ménages et entreprises ont du mal à obtenir des crédits et perdent confiance dans le fonctionnement économique ; d'où leur attentisme pour certains achats (automobile, logement…) ; en découlent des problèmes de débouchés pour les entreprises avec son cortège d'arrêt ou de ralentissement de la production et paralysie des banques image004  ses conséquences de chômage partiel ou de licenciements.

 

L’autorégulation des marchés ayant conduit à l’impasse actuelle, l’État est de retour en économie.

  

Les États parent au plus urgent en soutenant les banques de diverses manières et en les aidant à assainir leur bilan ; pour stimuler la croissance ils mettent en place des plans de relance de montants jamais observés.

 

 


2 - Principaux enjeux, autant de défis à relever

 

La réglementation des banques et des marchés financiers

 

La réglementation existe déjà mais elle comporte des failles et est mal appliquée. Transparence et contrôle, tel est le programme. On retrouve ici la question des paradis fiscaux, zones grises de la finance, celle du contrôle des fonds spéculatifs (par exemple, quelle surveillance appropriée pour limiter l’effet de levier en plafonnant les sommes prêtées par les banques ?), celle des agences de notation qui ont failli à leur mission (ces agences sont rémunérées par leurs clients : on est en plein conflit d’intérêts).

Il s’agit pour les banques et les marchés financiers de retrouver leur rôle : financer l’économie.

 

Le débat libre-échange/protectionnisme

 

Le protectionnisme, de retour, pose un vrai problème mais il n’est pas la réponse. C’est bien la division internationale du travail qui permet la spécialisation et une plus grande efficacité, qui peut être profitable à tous par l’échange.

Mais il faut s’interroger sur un libre-échange absolu, conduisant à une concurrence par le moins-disant social, et sur sa pertinence pour les produits alimentaires.
 

L’avenir de l’Union Européenne

 
Deux chantiers sont(ré)apparus : celui du gouvernement économique ; à la différence de la politique monétaire, unique, les politiques budgétaires sont restées nationales. Force est de constater que les États de l’Union Européenne ont échoué à coordonner vraiment leurs plans de relance. Ceci renvoie au chantier des institutions politiques.
Par ailleurs, l’UE doit se poser la question de l’harmonisation sociale et fiscale en son sein.
 

L’amélioration de la gouvernance mondiale

 

Le pouvoir est passé du G7 au G20, où sont présents les pays émergents.

La tâche de certaines institutions internationales a été renforcée : en particulier le FMI, dont les ressources ont triplé, retrouve un rôle stratégique (alerter sur les dangers de déséquilibres, élaborer de nouvelles règles financières) ; le pouvoir y sera mieux partagé.


 

Deux autres défis, tout aussi importants sinon plus

 

L’environnement tend à passer au second plan. Or les échéances écologiques se rapprochent dangereusement. La crise actuelle peut être une formidable occasion de mettre en place des outils, des mécanismes, conduisant à une production et une consommation durables (par exemple, il est urgent de se poser la question des transports).

En France, l’enjeu est la mise en œuvre réelle des propositions du Grenelle de l’environnement.

 

Les besoins alimentaires ne sont pas satisfaits pour près d’un milliard de personnes. En 2000, 192 chefs d’État et de gouvernement ont décidé de tout faire pour atteindre les 8 objectifs du millénaire qu’ils se sont fixés alors pour 2015 (dont diviser la pauvreté par deux). La focalisation sur la crise actuelle risque de nous détourner de ces engagements solennels pour le développement de tous les pays.

 

 

 

 

3 - Chrétiens, que pouvons-nous faire ?


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Nous avons à travailler avec les autres à relever ces défis. Pour cela :

 

§  s’informer et réfléchir : avoir le courage de la lucidité, de la vérité ; mettre en œuvre son intelligence !

 

§  se laisser interroger et par l’analyse et par l’enseignement social de l’Église, qui rappelle la destination universelle des biens de la terre et le choix prioritaire pour les pauvres. Et à partir de là :

 

§  discerner et agir : là où je suis, tel que je suis, quels sont les degrés de liberté ? les choix offerts ? (par exemple, dans le champ de la consommation, de l’épargne, du mode de vie).

 

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§  participer, être responsable : avoir le souci du collectif : par la vie associative et/ou l’engagement politique chercher avec d’autres à faire avancer les questions évoquées plus haut (participer = apporter sa part).

 

 

§  vivre l’espérance : ne pas se payer de mots ; avec pertinence vivre davantage une vie de frères, aimés gratuitement et pour toujours par le Père.

  

 En toutes ces choses nous sommes invités à passer de l’appel à la vigilance de Jésus

 

 

« méfiez-vous de l’avidité» (Lc 1215)

 

à son invitation

 

« va, vends ce que tu as, donne-le aux pauvres… puis viens et suis-moi » (Mt 1921)

 

en accueillant l’interrogation

 

« qu’as-tu que tu ne l’aies reçu ? » (1 Co 47)image014 image014  

 

  

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Pierre-Marie EMPIS

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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