Ce monde que Dieu aime
Méditation sur les textes de la veillée pascale
L'expression "ce monde que Dieu aime" reflète un thème majeur sur lequel travaille l’équipe de préparation du 10.10.10, le rassemblement diocésain d’octobre prochain. Telle est la Bonne nouvelle que nous avons à annoncer. Il se fait que cette phrase « ce monde que Dieu aime » peut servir de fil conducteur à la relecture des textes proposés par la liturgie de la veillée pascale. La succession des lectures a pu sembler tout à la fois ardue et trop connue. Parcourrons quelques-unes de ces lectures.
Genèse, récit de la Création.
A vous de jouer!© pdesign - fotolia.com Pour ceux qui ont rédigé ce récit de la création, la vie ne devait pas être rose tous les jours. Ce devait être de juifs ballotés au gré de l’histoire, entre les puissances égyptiennes et assyriennes (Mésopotamie ou Irak actuel). Eux aussi, tout comme nous, pouvaient se demander où va l’histoire, à quoi cela sert-il de vivre, quelles actions pour mener sa vie ? Et voici un récit qui résume leur acte de foi : Notre Dieu veut la vie, et il organise le monde en vue que l’homme vive et s’épanouisse. Et Dieu vit que cela était bon !
Au cours d’une récente conférence quelqu’un me demandait comment Dieu avait créé le monde à partir de rien. Je lui ai répondu que la Bible ne parle pas comme cela de la création. Pour elle, Dieu agit à partir d’un chaos innommable, un tohu-bohu, et que la description de l’œuvre de Dieu la présent comme celle d’une organisation de la matière : séparation entre la lumière et les ténèbres, séparation entre les eaux du ciel et de la terre afin qu’apparaisse un espace vital, séparation entre le sec (la terre) et les eaux (les mers) etc. Ainsi, pour ces croyants d’hier, créer c’est organiser la matière en vue de la vie, afin que l’homme vive : et Dieu vit que cela était bon ; non point parait, comme on le dit trop souvent. Et c e monde créé bon, Dieu le confie à l’homme pour qu’a son tour il en prenne soin et l’organise.
Je me souviens avoir discuté avec un chercheur mathématicien de son état et enseignant à l’université de Lille. Avec ses étudiants il travaillait à la mise au point d’une formule concernant la lumière. Plus on progresse plus la formule (le résultat) nous pousse plus loin vers l’infini. Ce chercheur me disait ne pas savoir s’il croit ou non, mais il trouvait passionnante sa recherche sur la lumière… Cela me rapproche de la création de la lumière en Genèse confiait-il. Fin mars, des chercheurs se réjouissaient d’avoir organisé la collision de deux atomes. Eux aussi travaillent à comprendre la matière dans l’espoir de venir en aide à l’humanité dans son attente de nouvelles énergies. Tout cela n’est pas éloigné de l’attente du Dieu de la Bible. Il reste que ce sera à l’homme de décider de ce qu’il fera de ces découvertes.
La recherche fondamentale me fait aussi penser à cette jeune qui participait au club ACE dont j’avais la responsabilité. Elle avait une sœur trisomique, et pour elle, sa vocation était toute trouvée : elle voulait être chercheuse. Je j’ai revue bien des années après. Elle était à l’institut Pasteur, travaillant sur une partie du génome humain, espérant découvrir l’origine de telle maladie. Elle était heureuse de me dire l’importance du réseau Internet (à l’époque) où toute recherche mettait en lien avec d’autres chercheurs à travers le monde afin de vérifier et développer la recherche… Dieu confie à l’homme cette création inachevée… Et Dieu vit que cela était bon… ce monde que Dieu aime ! Et nous, que faisons-nous de ce monde-cadeau ?
Livre de l’Exode, la sortie d’Egypte.
Bien sûr il y a une part de poésie et de symbolique dans la mise en forme de ce récit. Mais là encore des croyants affirme que Dieu les aime au point de les sortir de l’esclavage, de faire d’eux un peuple et de faire avec eux, peuple libéré, une alliance éternelle. Bien sûr, il y a eu de la casse autant chez eux qu’auprès des égyptiens… Certains hébreux ont préféré se révolter, d’autre retourner d’où ils venaient. Mais à ceux qui ont continué, une terre promise à faire exister était donnée.
Le prophète Isaïe
La réputation des prophètes est d’être prophètes de malheur. Il n’en est point ainsi d’Isaïe, dans la continuité de celui qui annonçait la venue d’un messie qui détruirait les armes et les chaussures de soldat, qui ferait paître ensemble le loup et l’agneau, et joue l’enfant et le cobra… Voici Isaïe qui fait découvrir Dieu sauveur comme un époux : celui qui t’a créé, qui t’as sorti du chaos c’est lui qui t’accompagne et te fait sortir de la crainte. Et aujourd’hui croyons-nous que Dieu nous accompagne de tout son amour, pour que nous devenions son peuple, un peuple ardent à faire le bien, instruit de sa sagesse et heureux de vivre ? C’est vrai qu’il y a beaucoup à faire ne serait-ce que pour diminuer les inégalités de ressources entre ceux qui voient leurs salaires multipliés par quatre durant la crise alors que d’autres voient s’effondrer leur pouvoir d’achat. (Insee, 1er avril 2010) Dieu aime ce monde ! Et nous, que faisons-nous ou que laissons-nous faire ?
Ezéchiel : Je mettrai en vous un cœur nouveau.
Il fallait oser une telle image. Il est vrai qu’Ezéchiel était un visionnaire : le mince filet d’eau qui sortait de la maison de Dieu deviendrait un immense fleuve capable d’irriguer des champs entiers dans le désert et même de rendre pures et fécondes les eaux de la mer morte. Ezéchiel osait annoncer qu’en nous viendrait un esprit nouveau, un cœur nouveau… Cette transformation de l’homme serait un don merveilleux, toujours à, recommencer tant nous sommes prompts à quitter l’œuvre de la vie pour des œuvres de mort. Et Dieu a recommencé sans cesse au point de nous donner son fils, dans l’espoir qu’il, serait entendu. Croire en la résurrection, c’est croire que cet amour continue, qu’il continue à relancer la force d’aimer… Aux disciples d’Emmaüs qui disait que tout cela était bien beau, qu’ils avaient cru mais que c’était fini… voilà qu’il se fait reconnaitre, et qu’ils se remettent en route
L’œuvre de Luc, évangile et Actes.
Voici deux questions que l’on retrouve à la fin de l’Evangile et au début des Actes : aux femmes qui viennent honorer un cadavre, l’ange demande : "pourquoi cherchez-vous parmi les morts celui qui est vivant ?" Puis aux disciples qui restent le nez en l’air après le départ de Jésus : "Pourquoi regardez-vous le ciel ?"
En rapprochant ces deux questions nous pouvons découvrir où se trouve notre avenir : ce n’est ni en demeurant des enterrés vivants, ni en devenant des extra-terrestres hors des réalités de cette terre. Dieu aime ce monde et il nous le confie.
Cinq pains et deux poissonsCe n’est pas le moment de déserter ce monde. Il y a tant à faire pour l’organiser afin que l’homme vive en plénitude en fils et filles de Dieu.
Les croyants en Jésus-Christ, les baptisés en Christ ne sont pas appelés à vivre hors sol, mais en pleine pâte humaine. C’est là qu’ils feront du terreau humain, une pate divine qui prendra sens dans la consécration lors des eucharisties où nous offrons au Seigneur les biens qu’il nous a donnés.