Ta foi t'a sauvée, va en Paix!
11ème dimanche ordinaire
2, Samuel, 12, 7-13 ; Galates 2, 16-21 ; Luc 7, 36-50 + 8, 1-3
L‘évangile de la miséricorde et de l’inconscience.
Sur quoi faut-il insister dans la méditation de cet évangile, tant il rassemble en quelques lignes toute la relation de l’homme à son frère, à sa soeur et de Dieu à cette femme !
Dans l’ordre d’apparition dans l’évangile : voici un pharisien, nommé Simon, sans doute un brave homme, au-dessus de tout soupçon, qui connait la Loi et la respecte. Il avait invité à sa table Jésus. De Jésus, on vient de dire, deux lignes auparavant, que c’est un glouton et un ivrogne, un ami des collecteurs d’impôts et des pécheurs.
Jésus se rend chez Simon, et prend place à table. Il ne dédaigne donc pas cette invitation. Voici une femme de la ville, précision : une pécheresse. Elle a appris la présence de Jésus chez Simon, et aussi la réputation de ce Jésus. Sait-elle que le pharisien va la dévisager de haut en bas (ou de bas en haut) ? Ce n’est pas dit, mais on sait qu’intérieurement Simon a vite fait de médire sur son invité : « si cet homme était un prophète, il saurait que cette femme qui le touche !» Tout est dit des relations entre Jésus et le pharisien, entre cette femme et Jésus, entre le pharisien et cette femme. Aujourd’hui, en certains lieux de culte, on interdit aux femmes de s’approcher de l’autel et de donner la communion, "il ne faut surtout pas qu’elles puissent toucher le Corps du Christ". (J’attends toujours qu’on m’explique).
L’évangéliste Luc a dressé le tableau, la scène dans laquelle il va inscrire la présence de Dieu qui apporte la paix à son peuple. Cette femme est venue avec un vase de parfum, elle le verse sur les pieds de Jésus et l’inonde de ses larmes. Certains disent que : “c’est parce qu’elle a beaucoup a se faire pardonner”, d’autres “parce qu’elle se sait accueillie par Jésus l’ami des pécheurs”.
Pour choisir entre ces deux hypothèses, il faut entendre le dialogue que Jésus introduit en forme de parabole, où deux créanciers voient leur dette remise. L’une était énorme, l’autre le dixième du précédent. “Lequel aimera davantage ?” Et Simon de répondre “celui à qui l’on a davantage remis”. Cette réponse de Simon exprime à merveille la relation du Père aux hommes, aux pécheurs et aux humbles, qu’il relève selon la Parole du Magnificat. Comme Marie, cette femme inconnue peut dire “Le Seigneur fit pour moi des merveilles” et pleurer de joie et verser le parfum de l’allégresse. Laisser entendre que cette femme agit ainsi “pour se faire pardonner”, c’est considérer qu’avec Dieu, c’est donnant-donnant. Orceci est faux; dans l’ensemble de l’évangile, Luc vient affirme que le pardon de Dieu vient au-devant de l’homme pécheur. (Ainsi en est-il du Père qui court au-devant de son fils cadet.).
C’est alors qu’interviennent les convives. Ils s’interrogent sur cet homme qui va jusqu’à pardonner. Jésus se présente en visage du Père, un père de miséricorde et non un assoiffé de “réparations”. Le voilà qui s’est laissé approcher et toucher par la femme pécheresse. “Tes péchés sont pardonnés ! Ta foi t’a sauvé va en paix !”
Quelle conscience avons-nous, hier comme aujourd’hui de cette proximité d’un Dieu qui donne le pardon et la paix ? Faut-il donc que les prédicateurs prêchent et imposent le fardeau de la peur, le respect des règles ou au contraire accepteront-ils, -et nous avec-, de reconnaitre que celui qui aime et se sait aimé connait le chemin de Dieu. “Aime, et ce que tu veux, fais-le”, écrivait Augustin. Il a tout compris, lui qui avait tout connu. Jésus, visage de Dieu miséricordieux se laisse inviter. Le pharisien n’a pas reconnu en Jésus le prophète. La femme elle, l’a tout de suite reconnu.
Puisque la liturgie invite aussi à lire le début du récit suivant, lorsque Jésus se met à parcourir villes et villages, apprécions donc ces quelques lignes qui précisent la compagnie de Jésus : les Douze et un groupe de femmes. Pour trois d’entre elles Luc donne le nom. Ce sont elles que l’on retrouvera au pied de la croix puis au tombeau au matin de Pâques. C’est elles qui recevront la première annonce de la Résurrection et qui auront à la transmettre… Voici donc une compagnie féminine autour de Jésus pour entendre la Bonne Nouvelle proclamée, elles n’en sont pas exclues, elles ont choisi la meilleure place, comme Marie au pied de Jésus alors que Marthe s’affaire à préparer le repas. La Bonne Nouvelle, c’est que, elles aussi sont aux premières places, dans tout l’Evangile… Et dans l’Eglise ?
Emile Hennart
Invitation à lire : les femmes et Jésus dans l'Evangile