Ils disent et ne font pas
31ème dimanche ordinaire
Malachie 1, 14 à 2, 10 ; 1 Thessaloniciens 2,7-13 ; Matthieu 23, 1-12
Lentement nous approchons de la fin de l’année liturgique. Concernant la lecture de l’Evangile de Matthieu il en est de même.
Ce dimanche, nous pouvons lire la dernière altercation de Jésus avec les “observateurs intransigeants” de la Loi de Moïse avant de passer devant le grand Tribunal. Ce n’est que le début du chapitre 23. "Pratiquez et observez tout ce qu'ils disent, mais n'agissez pas selon leurs actes, car ils disent et ne font pas!" Nous n’aurons pas à entendre les noms d’oiseaux comme “hypocrites”, des versets 13, 15, 23, 25, 25 ou “engeance de vipères” v.33. Il arrive en effet à Jésus d’user de paroles violentes contre ses adversaires. Ce sont les mêmes qui mettent les bâtons dans les routes aux premières générations de chrétiens d’origine juive, pour qui Matthieu écrit cet évangile. Il est de moments où il faut savoir dire “ça suffit !”, au temps du Christ, comme de nos jours.
Les accusations de Jésus portées à l’encontre des scribes et pharisiens sont gravissimes. Mais elles sont le reflet de l’enseignement de Jésus depuis le début. Il suffit de se rappeler “On vous a dit, moi je vous dit, au ch.5 ; ou encore “quand vous priez, ne soyez pas comme ces hypocrites qui se font voir sur les places publiques… ch.6. Le Christ vient accomplir la Loi, toute la loi, dans son sens véritable et non dans l’esprit de façade. Ce faisant il remet en cause une certaine pratique de la Loi où le cœur n’y est pas, mais seulement les apparences. Il nous faut relire l’Evangile de Matthieu au moins une fois avec les yeux de Celui qui remet en cause les interprétations ritualistes.
Comme Ezéchiel, Jésus appelle à une religion du cœur : Je leur donnerai un seul cœur et je mettrai en eux un esprit nouveau : j'extirperai de leur chair le cœur de pierre et je leur donnerai un cœur de chair,… Alors ils seront mon peuple et moi je serai leur Dieu. Si le Christ a été condamné, c’est bien pour avoir proposé une relecture de la Loi selon l’esprit des grands prophètes, et non selon l’esprit des lettrés de son temps, pour qui toute évocation de la Loi était l’occasion d’exclure, de rejeter le petit peuple constitué surtout des anawims, ou pauvres, les préférés de Yahvé.
Lorsque les évêques du monde entier, à l’appel de Jean XXIII ont entrepris le toilettage des institutions ecclésiastiques, ils ont vu se lever des opposants pour qui seule la lettre compte. Ce courant a persévéré depuis cette époque. Dans les périodes précédentes, l’Eglise exprimait sa vérité sous forme d’anathèmes, c’est-à-dire sous forme de rejet de formulations erronées. C’était une manière de retrancher de la communauté Eglise bien des gens, comme le faisaient les scribes et pharisiens, au nom des lois de pureté et de ritualité.
A partir de Vatican II, l’Eglise s’adresse au monde avec un autre langage, ferme parfois, mais surtout plein de compassion et de miséricorde. Il est donc heureux que Benoit XVI nous invite dans une année de la foi à ouvrir les esprits et les cœurs, en vue de la communion avec Dieu grâce à une porte toujours ouverte. C’était déjà inscrit dans la constitution sur la Parole de Dieu, où les pères affirment que Dieu s’adresse à nous comme à des amis et désire s’entretenir avec nous. En méditant la Parole c’est la : miséricorde que je veux et non les sacrifices, puissions-nous mieux comprendre. “Dans la révélation, le Dieu invisible s'adresse aux hommes en son immense amour comme à des amis, il s'entretient avec eux pour les inviter et les admettre à partager sa propre vie” (Dei Verbum §1).Apprenons à devenir serviteurs de cette relation Dieu/homme, plutôt que gestionnaires et maîtres des commandements. EH