Il est venu chez les siens…

Fête de la nativité de Jésus

Messe de la nuit : Isaïe 9, 1-6 ; Paul à Tite 2, 11-14 ; Luc 2, 1-14.
Messe du jour : Isaïe 52, 7-10 ;Hébreux 1, 1-6 ; Jean 1, 1-18

 

En cette nuit de Noël et dans les offices du jour, nous retrouvons quantité de textes bien connus, qu’ils aient été écrits par des prophètes en lesquels les premiers chrétiens ont reconnu, après coup, une annonce, ou écrits au début de l'ère chrétienne : le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu une grande lumière… on espérait, de fait, un messie qui délivre de la guerre, de l’esclavage, des souffrances sans nom. Quel beau texte d'Isaïe… mais s’il ne s’incarne pas dans nos vie, si nous ne reconnaissons pas les esclavages, les guerres et les souffrances d’aujourd’hui, à quoi cela sert-il ? La mission des prophètes des temps anciens, puis les commentaires de textes dans la liturgie synagogale insistaient sur l’aujourd’hui de la Parole entendue.

 

“Aujourd’hui un sauveur vous est né”… pas seulement il y a deux mille ans, mais aujourd’hui, en 2011. Heureux sommes-nous si nous évoquons l’évènement de la venue de Jésus dans notre monde, pas seulement comme une belle histoire d’hier, mais comme une certitude pour aujourd’hui : "voyez de quel amour Dieu nous a aimés : il nous a donné son propre Fils", dira Saint Paul. Il sera établi sur le droit et la justice dès maintenant et pour toujours, affirmait Isaïe. "Il nous rend participants de sa vie divine" est une autre expression pour dire la proximité de Dieu avec nous. Dans notre vie humaine, en notre chair il a planté son Amour, son Esprit… Suffit-il de le penser, de le croire, pour que cela se réalise ? Il faut encore que l’amour et la justice, la paix et la vérité prennent chair dans nos rapports humains, et cela ne se fera pas sans nous, sans notre réponse et nos gestes de fraternité, comme le rappellent nos eucharisties : à cause de Jésus nous sommes devenu frères. Que cela se voie, que cela se manifeste !


L’évangéliste Jean est sans doute à la fois le plus spirituel et le plus concret. Il affirme tout à la fois ce Dieu venu chez nous, qu'il a planté sa tente au milieu des hommes, mais tout aussitôt il reconnait que les siens ne l’ont pas reconnu (évangile du jour, Jean 1). Tel est le risque de Dieu : venir chez nous et ne pas être reconnu.

 

Il peut être intéressant de voir les reproches faits à Jésus dès les débuts de l’évangile selon Marc… reproches faits par ceux qui savent et qui reprochent à Jésus une trop grande proximité avec les pécheurs, les pauvres et les nécessiteux. C’est ce même reproche qui est fait aujourd’hui à l’Eglise du Concile : elle est trop proche de l’humain, des pauvres et nécessiteux, “trop sociale” comme j’ai pu le lire récemment dans un blog !

Alors nombreux sont ceux qui retournent aux anciennes pratiques, et qui délaissent la proximité sociale… Les évêques ont beau insister sur le service du frère ou la diaconie, cela ne semble pas être entendu : "je ne suis pas venu pour être servi mais pour servir…" est-il écrit au ch. 10 de Marc.

 

Le “laisser faire” généralisé qui est prôné par les économistes en mal de rentabilité pour quelques-uns est une fausse excuse pour justifier le principe de liberté. “Aime et ce que tu veux, fais-le" affirmait saint Augustin”. Le Christ Jésus venant chez nous a manifesté ce qu’aimer l’homme selon Dieu veut dire. Marchons à sa lumière et essayons de vivre en frères, qu’ils soient proches ou lointains. Alors l’offrande que nous portons à la crèche prend sens : dans nos mains, ce n’est pas du vent, mais le poids (et le prix) de nos vies associées à celle de Jésus.

Joyeux Noël. Abbé Emile Hennart

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