Je suis le pain de la vie

18ème dimanche du tems ordinaire

Exode 16, 2-15 ; Ephésiens 4, 17-24 ; Jean 6, 24-35

 

Les lectures de ce dimanche invitent à mettre en parallèle un épisode de l’Exode avec le discours du pain de vie, prononcé à Capharnaüm par Jésus après le partage des pains. Que ce soient les hébreux autour de Moïse, que ce soient les Juifs autour de Jésus, les uns comme les autres s’interrogent sur la signification de l’évènement. Bien des chercheurs ont essayé de comprendre ce qui s’est passé et nous-mêmes restons interrogatifs : que s’est-il réellement passé ? Ce type de questionnement se comprend, mais il ne trouve pas réponse qui nous satisfasse.


D’où un autre type de questionnement : pourquoi donc les rédacteurs de ces textes ont-ils écrit ces récits ?
Nous savons bien que ces récits n’ont pas été écrits d’un seul jet. Ils sont le fruit de longues méditations, probablement sur plusieurs générations de croyants. Une des pistes que je vous propose aujourd’hui c’est de repartir de la question des signes… “Quels signes vas-tu accomplir pour que nous puissions le voir et te croire ?” Telle est la demande des gens qui se sont agglutinés autour de Jésus. Sous-entendu : on veut bien croire, mais sur pièces ! Mais peut-on parler de foi quand on subit une preuve ?

 

Là-dessus, nous-mêmes entretenons en nous-mêmes un malentendu : les miracles ont-ils lieu pour donner la foi, ou bien ont-ils lieu à cause de la foi de la personne guérie (ou pardonnée) ? Les évangiles synoptiques (Marc, Matthieu et Luc) reprennent tous trois les mêmes paroles de Jésus ; “à cause de ta foi, va, tu est guéri, tu es pardonné !”. Les Juifs autour de Jésus à Capharnaüm, ne sont pas dans cette attitude-là : il leur faut des preuves. Nous-mêmes, nous aimerions que notre foi soit étayée, soutenue par des preuves. Or la relation à Jésus n’est pas le fruit d’une évidence où d’une preuve, mais une adhésion fondée sur les Paroles et la rencontre avec Lui.

 

Nous bénéficions seulement du témoignage des premiers disciples ; un témoignage… ce n’est pas une preuve. Ainsi en va-t-il de notre foi, de notre relation à Jésus, l’envoyé de Dieu. Nous connaissons le dialogue rapporté par Jean entre Jésus et Thomas : "parce que tu as vu, tu crois… Heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru…" Tout est dit, et de la foi des premiers disciples, et de notre foi: ce ne sont pas les preuves qui sont  la base de notre foi.

 

L’Evangile se termine aujourd’hui par “Moi, je suis le pain de la vie… ” Depuis bientôt deux mille ans, des hommes et des femmes acceptent de donner leur foi au Christ sans autre élément que le témoignage accordé par d’autres personnes, avant eux et autour d’eux. L’eucharistie qui nous rassemble est le lieu de la communion de tous ceux qui entendent la Parole de Jésus. Dans le rassemblement eucharistique nous nous soutenons les uns les autres, nous entretenons la flamme les uns des autres, dans la certitude que le christ est au milieu de nous.

 

Les plus anciens d’entre nous ont appris à aller à la messe "par obligation". Aujourd’hui certains, plus jeunes, mais pas seulement, s’estiment dispensés de ce commandement, plus exactement, de cette participation à l'eucharistie. Or c’est n’est pas un commandement, mais un besoin et un désir : j’ai besoin de nourrir ma foi, j’ai besoin de l’entretenir au contact d’autres croyants “pratiquants” comme moi. J’ai besoin de m’arrêter en même temps que d’autres croyants autour de Jésus qui se donne, de m'arrêter avec d'autres autour de Jésus qui a donné sa vie pour nous. Abbé Emile Hennart