Le salut pour Zachée et sa maison
31ème dimanche ordinaire
Sagesse 11, 23 à 12, 2 ; 2 Thessaloniciens 1, 11 à 2, 2 ; Luc 19, 1-10
Voici terminée la succession des réflexions de Luc sur la prière, celle du pauvre comme celle du maitre en Israël. Maintenant Jésus prend la route qui le mène à Jérusalem. En chemin, entre Jourdain et colline de Sion, voici qu’il s’arrête à Jéricho. On sait qu’il arrive, on le guette, on peut même imaginer l’impatience des gens pour voir enfin cet homme dont la renommée a déjà fait le tour des quartiers.
Zachée est un homme de désir, désir de rencontrer ce Jésus, ami des pécheurs… Il se sait pécheur lui-même, mais condamné à rester à l’écart à cause de sa notoriété. Dieu ne fait pas de différences entre les personnes, était-il dit la semaine dernière, et les Ecritures nous précisent qu’il accueille celui qui est humble de cœur. Voici donc Zachée perché dans son arbre à espérer le voir… voir, non pas de haut, mais de loin. Jésus s’invite chez lui. Nous ne saurons rien de la conversation entre Zachée et Jésus. Luc fait comprendre l’attitude de Zachée après cette rencontre. Il est peu probable que Jésus ait donné des ordres ou rappelé les commandements de la Loi : ce n’est pas son style.
Ce que Luc fait remarquer, c’est l’attitude des gens qui observent l’épisode : ils récriminent contre ce Jésus qui s’invite chez un pécheur notoire. Ils espéraient voir sans doute un prophète ascétique, un homme de Dieu hors du monde, et voici que se présente en ami des pécheurs et va manger chez eux ! Cela avait déjà été signalé au début de l’évangile, avec les réflexions des pharisiens aux ch. 5 et 7 de Luc ; c’était en Galilée. Peu importe les lieux, les attitudes des humains sont les mêmes ici et là, et ils n’acceptent pas un Dieu qui se rende proche des pécheurs.
Il fut des époques où l’Eglise et les clercs étaient de l’autre côté de la barrière et donneurs de leçon, on les reconnaissait à leur attitude distinguée et hautaine, aux habillements hors du commun. Il y eut, plus récemment, des prêtres proches du peuple et des petites gens, que rien ne distinguait, à première vue, des gens de leur quartier. Il n’est pas inutile de rappeler que bien des amis de l’actuel François, en Amérique latine, ont été dénoncés pour n’être pas assez enfermés dans leurs églises en grands habits sacerdotaux et davantage présents au milieu des communautés de base. Que n’a-t-on dit des prêtres ouvriers ou des vicaires de cités de notre ex bassin minier. Que ne dit-on, ces derniers temps, contre un pape peu soucieux du spectacle, moins cérémonieux… Si les foules d’aujourd’hui ne le réprimandent pas mais accueillent cette nouvelle manière d’être pape, plus proche de l’Evangile, cela mérite réflexion.
Et si le Zachée d’aujourd’hui était cette femme musulmane, emprisonnée, dont François a baisé le pied un certain jeudi-saint ??? Là aussi il y a eu des murmures contre ce pape. Dans son Evangile, Luc n’a rien dit du dialogue entre Jésus et Zachée, mais il a signalé la bave des spectateurs. Bref retenons dans cette histoire qu’il y avait Jésus, Zachée, la foule. A nous d’entendre la conclusion : “Aujourd’hui le salut est entré dans cette maison.” A défaut relisons la première lecture : Seigneur, tu fermes les yeux sur leur péché, pour qu’ils se convertissent… ceux qui tombent, tu les reprends peu à peu… Saint Jean le redira à sa manière : “Dieu n'a pas envoyé son Fils dans le monde pour juger le monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui.
Abbé Emile Hennart