Mon bien-aimé avait une vigne…
27ème dimanche ordinaire
Isaïe 5, 1-7 ; Philippiens 4, 6-9 ; Matthieu 21, 33-43
Ce dimanche est-il celui des regrets, l’expression des déceptions ? On pourrait le croire à la lecture du prophète Isaïe d’abord, de la parabole des vignerons homicides ensuite. Le chant du bien-aimé pour sa vigne était présentation des critiques adressées par le prophète aux habitants de Jérusalem, au nom de Yahvé. De cette vigne-Israël “le Seigneur en attendait le droit, et voici l’iniquité. Il en attendait la justice, et voici les cris de détresse, etc.”. On pourra lire dans ce début du livre d’Isaïe d’autres accusations, comme : “Tes princes sont des rebelles, complices de brigands, tous avides de cadeaux, courant après les pots-de-vin. Ils ne font pas droit à l'orphelin, la plainte de la veuve ne leur parvient pas. C'est pourquoi, oracle du Seigneur Yahve Sabaot, le Puissant d'Israël : Malheur ! J'aurai raison de mes adversaires, je me vengerai de mes ennemis”. Dans le même style des plaintes de Yahvé contre son peuple, on aura les récriminations de Jésus contre les mauvais bergers, qui ont laissé la foule dans le désarroi (Marc 6,34 ou Matthieu 9, 36).
Nous voudrions tant que ces reproches de Jésus ne concernent que les responsables de son peuple de Dieu hier. Or, à toute époque il a fallu que des prophètes se lèvent pour remettre sur le droit chemin ceux qui, ayant reçu l’autorité n’ont pas agi dans le droit chemin. L’étude de l’histoire de l’Eglise étudie aussi ces pas de travers des hiérarchies ecclésiastiques. L’histoire récente reconnait aux derniers papes une grandeur dans leur comportement et leurs engagements, dans les orientations qu’ils ont dessinées pour l’Eglise. Cependant il y a eu autour d’eux mauvais pasteurs. Certains ont été écartés de leurs responsabilités. Benoît XVI, par exemple, avait commencé la remise en ordre ; le pape François a poursuivi ce même chemin. On ne peut le lui reprocher. Mais nous sentons bien ces tiraillements. Au temps de Paul VI, dans l’après-concile on sait maintenant à quels tiraillements il a été exposé, et par qui. L’étude de l’encyclique Humanae vitae fait aujourd’hui connaître ces interventions qui ont entrainé le pape loin des pratiques du Concile Vatican II.
La question de la qualité des pasteurs est encore d’actualité au moment où s’ouvre le synode sur la famille. Il ne s'agit pas simplement de rappeler la doctrine mais de trouver des solutions: pour les divorcés remariés et pour tous.
Le travail du pasteur n’est pas simple. Que n’a-t-on reproché à Jésus et aux prophètes qui l’ont précédé ! Les leçons de l’histoire sont-elles reçues ? Autant dans l’Ancien Testament que dans l’Eglise d’aujourd’hui, tout homme, et plus encore s’il reçoit une responsabilité, un ministère, est confronté à la parole de l’Evangile qui appelle à porter du fruit. On ne peut se contenter de la rectitude théologique, encore faut-il qu’il y ait place à l’amour et à la miséricorde.
C’est un peu dans le même ordre de réflexion que Paul entraine ses amis Philippiens. Il vient de rappeler (ch.2) le chemin de Jésus, venu de Dieu il s’est fait homme obéissant jusqu’à la mort… pour que tout homme puisse proclamer les merveilles de Dieu. Jésus a été guidé par l’amour pour l’homme, souvent blessé, pécheur, il lui est venu en aide non pour le condamner, mais pour qu’il ait la vie, c’est-à-dire une nouvelle relation à Dieu possible, au-delà des chutes qu’il a subies.
La parabole du bon grain et de l’ivraie exprime que le bon et le mauvais coexistent ensemble, voulloir supprimer le mauvais revient à extirper aussi le bon… mais à la fin des temps, à la récolte, le Seigneur reconnaîtra ce qui produit du fruit. Ces évangiles ne sont pas des textes juridiques, mais des invitation à fleurir sous le soleil de Dieu plutôt que sous le soleil de Satan. A quels vignerons le Seigneur peut-il confier sa vigne, pour qu’elle produise du bon fruit ? EH