Vous êtes un sanctuaire de Dieu !

7ème dimanche ordinaire

Dimanche 23 février 7ème dimanche ordinaire

Lévite 19, 1-2 et 17-18 ; 1 Corinthiens 3, 16-23 ; Matthieu 5, 38-48

 

Parole de saint Paul aux chrétiens de Corinthe : “vous êtes un sanctuaire de Dieu”. Vous êtes Temple de Dieu. Cette parole au début de la première lettre adressée par Paul aux chrétiens de Corinthe devrait être reliée à d’autres paroles des deux premiers chapitres : vous qui n’êtes rien, voilà ce que Dieu a choisi ! Etre Temples de Dieu ou être des moins que rien ? Il faut se souvenir de la différence de population entre Athènes et Corinthe : Paul a quitté Athènes pour Corinthe, après un semi-échec : d’un côté des gens cultivés, de l’autres des esclaves ou des gens de basse extraction. Alors que le passage de Paul à Athènes fut de courte durée, à Corinthe, il a passé dix-huit mois.

 

Paul doit bien connaitre ces Corinthiens. Paul a travaillé avec eux, manuellement, comme eux pour subvenir à ses besoins. Partageant leurs conditions de vie, il en a aussi partagé les manières de penser et les chamailleries. Il y avait sans doute des hébreux, mais aussi des chrétiens expulsés de Rome par l’empereur Claude. C’était donc une population bigarrée. La plupart des traductions emploie l’expression temple de Dieu plutôt que sanctuaire de Dieu…

 

Qu’importe sanctuaire ou temple: le sens de l’expression est une manière de relever, de révéler  ce que sont ces chrétiens de Corinthe. Paul affirme l’incarnation de Dieu dans les corps, alors que la philosophie grecque avait développé une distance entre la chair et l’esprit. En eux habite l’Esprit de Jésus-Christ. Ils sont habités par le même Esprit qui fait d’eux des frères. Ce doit être un autre discours que celui des maîtres romains qui les avaient importés là, pour transporter les marchandises d’un port à l’autre. Ces gens réduits en manutentionnaires à vie sont venus de contrées conquises différentes. Ce sont des déracinés, de langues et coutumes diverses. Voilà que Paul les appelle à avoir de la considération pour eux-mêmes et pour les autres : à cause de Jésus et du baptême qu’ils ont reçu, qu’ils se considèrent désormais comme frères.

 

L’évangile de ce dimanche n’est pas éloigné de la pensée de Paul. Nous n’avons que quelques lignes du sermon sur la montagne. Là encore il faudrait tout lire. On a l’impression que Jésus pousse la Loi au maximum possible. En effet, Jésus reprend les termes de l’Ancien Testament, mais ce qu’il vise, c’est d’aller plus loin dans la considération envers le prochain : “on vous a dit, moi je vous dis… Tu ne tueras pas, mais si tu touches à l’un d’eux… etc.” Le livre des Lévites, dont nous lisons quelques lignes a ouvert la route à une interprétation des dix commandements : “Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Je suis le Seigneur”. Bientôt, même l’amour des ennemis sera conseillé.

 

Passer du statut d’étranger à celui de frère, ce ne devait pas être simple. La culture juive avait gardé ses distances entre ceux de l’intérieur et ceux de l’extérieur. Le baptême des païens fut un point de clivage entre judéo-chrétiens et pagano-chrétiens dont s’était affranchi Paul. C’est aux portes de Damas que l’apparition de Jésus l’avait amené à comprendre l’ouverture de l’Evangile à toutes les nations. Saint Pierre aussi comprendra cette ouverture lors de la vision à Césarée, quand une nappe comportant toute sorte d’animaux descend vers lui : “Ne déclare pas impur ce que Dieu a déclaré pur…”

 

En quoi cela nous concerne aujourd’hui ? Les replis identitaires dans lesquels s’enferment quelques catégories de chrétiens ne devraient pas nous faire oublier les appels du pape François à sortir des nos murs et de nos citadelles ; à ne pas avoir peur de sentir l’odeur du troupeau. L’amour de Dieu est universel, il est hors norme, sans norme ! Or, pour des raisons et des difficultés réelles, nous vivons davantage cachés, en attendant de meilleurs moments. Pourtant, le Dieu auquel nous croyons, nous devons l’annoncer et en témoigner : vous êtes sel de la terre et lumière du monde. E.H.