Dimanche 3 septembre : 22ème dimanche ordinaire

Deutéronome, 4, 1-8; Jacques 1-27; Marc 7, 1-23
(Le lectionnaire sélectionne quelques versets dans ces textes)

 

Histoire de table, histoire de mains sales
Nous voici à nouveau et pour quelques semaines dans la lecture continue de l'évangile de Marc. L'écrivain biblique place les éléments qui viendront éclairer la question du partage du pain eucharistique avec les étrangers (voir la section des pains). Il est question des règles de bonne conduite, par lesquelles les hommes de religion veulent se distinguer du commun des mortels, qui malgré son désir d'être approché de Dieu se sait "pécheurs". Les règles hébraïques sur le pur et l'impur * ont été codifiées dans le deutéronome, et bien des règlements ont été ajoutés, de génération en génération. Marc en cite quelques-uns, qui deviennent source de conflit entre Jésus et les pharisiens. Depuis le ch 3,6 l'opposition entre Jésus et les pharisiens est manifeste. Désormais toutes les occasions sont bonnes pour critiquer Jésus... il est trop laxiste, il ne respecte pas toutes les coutumes d'un "bon" juif, il ne fait pas tout comme la tradition des anciens l'enseigne. Que n'a-ton dit sur Jésus qui laisse tout faire, mais que ne dit-on pas aujourd'hui à l'égard de ceux qui ne respectent pas tous les rites et règlements hérités des anciens des siècles précédents ?

La réponse de Jésus est cinglante: "vos commandements ne sont que préceptes humains, vous oubliez Dieu... et votre prochain". On imagine bien Jésus tournant le dos à ses détracteurs pour se tourner vers la foule qui se sait exclue du Royaume de Dieu. Il invite alors chacun, non à l'introspection, mais à considérer quel est son regard sur l'autre, proche de lui. Tous les mots employés sont expression d'un rapport au prochain: vols, meurtres, adultères, cupidités, fraude, envie, diffamation etc.  Avant d'apprécier ou de déprécier l'autre sur des critères matériels, commence par considérer les pensées qui sont au fond de toi-même, quand tu regarde la personne proche de toi. Dans la boutique de ton cœur, quels sont les ferments de mort que tu distilles?

Ceci posé, il faut lire de suite l'épisode suivant, Marc 7, 24-30, que le lectionnaire dominical oublie. Cet épisode appelée "la cananéenne" ou "la syro-phénicienne" commence bien mal, car Jésus y fait le contraire de ce qu'il dit. Voici que Jésus est approché par une femme, une païenne, originaire d'un pays étranger, bref, ce qu'il y a de plus impur. Les noms d'oiseau fusent... le mot chien est même employé pour dire qu'on ne partage pas le pain avec les étrangers. Cette mise en scène éloquente a été voulue par Marc pour provoquer les premiers chrétiens "judéo-chrétiens" à revoir leur attitude à l'égard des chrétiens d'origine païenne à Rome. Marc veut dire à l'assemblée du dimanche: "Vous trouvez que Jésus ne doit pas traiter de chien cette étrangère, et vous, que faites-vous avec les étrangers?"
Cet évangile est toujours d'actualité.
Rassurons-nous sur Jésus: à la fin de l'épisode, il accorde la paix et la guérison à la maisonnée de cette étrangère. J'aimerai être aussi rassuré quand la République dit que tous les hommes naissent libres et égaux, et le met en pratique.

 

* Note. La législation sur le pur et l'impur part d'un bon sentiment, à savoir que Dieu est le pur, le tout autre, le parfait... et qu'on ne peut l'approcher que les mains pures (et le cœur aussi!). Ainsi tout ce qui ressemble à un handicap, une imperfection, tous ceux qui ont approché la mort ou l'étranger (l'infidèle), ceux qui exercent certaines professions, tous ceux-là sont impurs et doivent observer des rites de purifications pour s'approcher de Dieu...  oubliant que c'est Dieu qui s'approche de l'homme tel qu'il est, et se permettant de condamner tous ceux qui ne sont pas parfaits.