La joie de son Excellence

Lens, église Saint-Léger 33ème dimanche ordinaire - Année A

 

La joie de Son Excellence

 

Une chose est certaine, cet homme qui part en voyage connaît bien ses serviteurs. Il sait ce qu’il thHXDY4363 thHXDY4363  peut demander à chacun. Le nombre de talents confiés dépend des capacités qu’il leur a reconnues. Celui qui a reçu cinq talents a sans doute déjà fait preuve de courage ou de débrouillardise, de sagesse ou de lucidité. Celui-là a de grands potentiels. Le second un peu moins. Et le troisième encore moins. Mais nous remarquons que le serviteur le plus limité reçoit aussi un talent. Son maître le croit capable de le faire fructifier. Il ne lui en a pas confié plus, sinon le serviteur aurait été dépassé par la charge trop grande. Le maître considère son serviteur, lui fait confiance, et lui demande de produire ce qui est à sa mesure. S’il ne lui avait confié aucun talent, cela aurait signifié qu’il n’avait pas de considération pour lui. S’il lui en avait confié cinq, ou même seulement deux, cela l’aurait anéanti. Le maître respecte chacun des serviteurs.

 

Les serviteurs respectent-ils leur maître ? Répondent-ils à ses attentes ? Sont-ils dignes de sa confiance ? Il semblerait qu’en ce qui concerne les deux premiers serviteurs, la réponse soit « oui » puisque le maître leur dit : « Très bien bon et fidèle serviteur. Tu as été fidèle en peu de choses, je t’en confierai beaucoup. » Et à la fin de l’histoire, le premier reçoit un talent supplémentaire.

 

Qu’en est-il du troisième ? Celui-là se croit juste. Il rend le talent que le maître lui avait confié. « Tu as ce qui t’appartient. » Il ne se pense pas en faute. De fait, sur le plan comptable, il est irréprochable. Un talent donné, un talent rendu ! Cependant le maître ne se sent pas respecté. Son serviteur n’éprouve que de la crainte envers lui : « Je savais que tu es un homme dur... ». Il dit connaître son maître. Surtout il en a peur. Le serviteur n’a pas perçu qu’au-delà de l’exigence, son maître lui avait fait confiance, parce qu’avant d’être sévère, il est bon. Et que la bonté se montre aussi dans la recherche de l’excellence. Aimer quelqu’un, c’est lui demander de donner le meilleur de lui-même. Le serviteur est resté sur un a priori de peur. Il pensait connaître son maître ; le maître lui montre ô combien il s’est trompé.

 

Et le maître est en colère d’avoir été si peu compris, si peu entendu, si peu aimé. Cependant, quoiqu’en colère, le maître reste juste. Il applique envers son serviteur une pénitence qui correspond au regard qu’il porte sur lui. Puisque le serviteur pense son maître sévère, il sera jugé sévèrement. Le talent lui sera retiré. Et il sera « jeté dehors, là où il y a des pleurs et des grincements de dents ». C’est donc en dehors du domaine qu’il y a la souffrance et la peine, et non pas lorsque l’on est au service du maître de ce domaine. Finalement, c’est à croire que le serviteur s’est exclu lui-même. Son manque de confiance envers le maître a eu pour résultat les pleurs et l’exclusion. Il n’a pas su voir que son maître le croyait capable d’investissement, certes pas aussi important que les deux autres, mais quelque chose à la mesure de ses forces.

 

Pendant ce temps, les deux autres serviteurs sont entrés dans la joie de leur maître. Leurth3HD91MLQ th3HD91MLQ   confiance et leur fidélité dans les petites choses leur ont ouvert les portes de la joie. Ils ont osé investir leurs talents. Ils n’ont rien gardé pour eux puisque le premier en rend dix et le second quatre. Ils sont comme des serviteurs inutiles, considérant que rien ne leur appartient. Les profits ne sont pas pour eux, mais pour le maître. La joie réside dans ce détachement. La joie provient de la confiance offerte et rendue. Car bien plus que de l’argent, que des talents, c’est la confiance qui est donnée par le maître, et qui est rendue par les serviteurs fidèles. Entrant dans cette confiance, les deux serviteurs entrent pleinement dans la joie du maître. Le second autant que le premier. Cette fois, il n’est plus question de quantité ! La plénitude de la joie est offerte à l’un autant qu’à l’autre.

 

Que demande le maître ? Que l’on croit en lui. Que l’on croit au regard qu’il pose sur chacun. Il n’aime pas les peureux, les paresseux, les hommes qui se cherchent des excuses, surtout quand ces excuses l’accusent, lui. Le maître aime ceux qui agissent parce qu’ils se sont sentis encouragés par lui. Ceux-là font des merveilles. Certains avec de grands moyens, d’autres avec de tous petits moyens.

 

Peut-être étiez-vous à Béthune hier, pour écouter Jeanne PELAT, cette jeune myopathe de 21 ans ? Son témoignage est bouleversant. Malade depuis l’enfance, elle ne marche plus. Son corps, attaqué par la maladie, est bien faible. Elle a besoin de beaucoup d’assistance. Malgré sa faiblesse, malgré ses petits moyens physiques, cette jeune femme rayonne et témoigne de la joie de Dieu. Nul doute qu’elle est entrée dans le royaume de la confiance. Comme je nous souhaite de partager sa foi en ce Dieu qui a foi en l’homme !

 

Peut-être avez-vous entendu parler de l’Ecole de Production Automobile de Lens qui verra le jour en janvier ? C’est un retraité du monde de l’entreprise qui a réussi à mettre en place ce garage école pour des jeunes en situation de décrochage scolaire. Cet homme aurait pu passer une retraite paisible, bien méritée. Il a investi son temps, son argent aussi, dans la mise en place de ce projet fou. Et il a entraîné avec lui des partenaires privés ou publics, des bénévoles, des relations, chacun faisant ce qu’il peut en fonction de ses disponibilités ou ressources.

 

Peut-être croisez-vous une pauvre veuve tous les matins tandis que vous partez travailler. Comme celle de l’Evangile, elle ne fait pas de bruit. Appuyée sur sa canne, elle part à l’église pour prier. Elle n’a plus beaucoup de force. Mais elle s’offre à Dieu. Dans la confiance.

 

Les exemples de serviteurs fidèles sont nombreux. Tous entrent dans la joie de leur maître. Ce maître ne leur demande pas de tout réussir. Ceux de l’Evangile qui ont osé investir ont eu un rendement de cent pour cent. Ils ont de la chance ! Bien souvent, celles et ceux qui s’investissent n’ont pas autant de résultats. Parfois, c’est même le grand désert. Croyez-vous que cela fâche le maître ? Non. Ce qui le fâche, c’est de ne pas oser. Seules la paresse et le manque de foi fâchent le maître. Et n’oublions pas que les fruits de l’investissement ne sont pas forcément visibles. Seul le maître peut évaluer le résultat d’une action qu’il a souhaité voir entreprendre. A savoir qu’il donne aussi le moyen de réaliser ce qu’il demande : l’Esprit Saint accompagne toujours les hommes et les femmes de bonne volonté.

 

Regardons Jésus. N’est-il pas le plus talentueux ? Fils de Dieu, il connaît et peut toutes choses. Serviteur, il se rend disponible. Il fait la volonté du Père. On pourrait penser que, mourant sur la croix, sa vie n’a aucun sens, aucun résultat. Pourtant ne sommes-nous pas rassemblés au nom de l’amour qu’il a proclamé ?

 

Jésus, toi le Fils de Dieu, fais de nous les serviteurs de l’amour. Donne-nous ton Esprit afin que nous osions prendre les risques les plus fous. Tu nous dis que tu seras toujours avec nous. Permets que nos humbles talents servent à révéler la gloire de ton Père, le Maître qui croit que ses serviteurs sont capables d’entrer dans la joie de Son Excellence !

 

Abbé Xavier