Servir
Homélie de l'abbé Xavier à Lens, église Saint-Léger, le 5 février 2014, lors des funérailles de madame Thérèse CAUCHE
Servir
La générosité, et même l’amour, ça n’est pas le monopole des religions, ça n’est pas le monopole d’un parti. La générosité, l’amour, c’est ce qui fait le cœur de tout homme. Dans cette assemblée ce matin, vous êtes nombreux, quelles que soient vos convictions, à agir pour une plus grande fraternité, une plus grande justice. Vous ne partagez pas tous la foi des croyants, qu’importe ! Tous, tous ici, nous désirons la dignité de l’homme. Simplement mais sincèrement, merci à toutes et tous pour les engagements vécus pour le bien des frères en humanité.
Le service est une valeur sûre. Peut-être est-ce la seule à toujours encourager. Non pas le service par ambition mais le service par gratuité. Trop souvent l’argent et le pouvoir détruisent les relations. Le don de soi, la gratuité du service, par contre, honorent celle ou celui qui le vit, ainsi que ceux qui en bénéficient.
Le service gratuit, sans désir de reconnaissance, sans volonté de possession… gratuit vraiment… honore celui ou celle qui le vit, parce qu’alors la personne montre le vrai visage de l’humanité. Le fond, le cœur, l’essence même de l’homme, ce qui fait son originalité, c’est sa capacité à regarder l’autre, estimer l’autre, tout autre, tout autre quelle que soit son origine. C’est aussi sa capacité à compatir. A aimer. Le mot peut-être est trop souvent galvaudé. Aimer… jusqu’aux tripes, dans le cœur. L’homme vrai est altruiste. L’homme n’est pas ego, il est « alter ». Non pas « moi », « moi », « moi » toujours mais « toi ». Toi, as-tu un toit pour vivre ? La vérité de la personne humaine se trouve dans sa capacité d’émotion. « Toi ami, as-tu ce qu’il faut pour manger, pour dormir, pour apprendre ? »
Cette inquiétude de l’autre fait la grandeur de la conscience humaine. Plus on est tourné vers autrui, plus on est vivant, plus on est humain. Et plus le service est service, c’est-à-dire gratuité, plus il dit la grandeur du donneur, du serviteur. Merci vraiment aux nombreux bénévoles qui engagent leur vie, donnent leur temps, servent, souvent aussi en donnant de leur propre argent. Merci à ces hommes et ces femmes qui se soucient des enfants et des jeunes, des vieillards, des malades, qu’ils considèrent comme des frères et des sœurs.
Le service gratuit honore ceux-là qui reçoivent le don. Par cette attitude, par ce regard sur eux, par cette attention qu’ils reçoivent, ils existent. Et que c’est bon d’exister quand on est seul quelquefois ! Quand on est oublié. Oui, soudain ils comptent. Leur vie prend du poids, du sens. Soudain, ils ne sont plus isolés, ils ne sont plus perdus… Par le service de quelqu’un, par l’amour offert, ces personnes découvrent qu’elles sont dignes d’être aimées, qu’elles sont dignes de vivre, qu’elles sont dignes à leur tour de grandir en humanité… Et de ce fait, d’accéder au sommet de leur humanité, de devenir à leur tour serviteurs.
Merci à toutes et tous d’oser vivre le service du frère.
Dans cette église, à l’occasion de cette célébration, nous remercions notre défunte pour son exemple, pour son amour. Nous remercions aussi le Christ. Pour les croyants, il est l’exemple parfait du service. Lui qui était de condition divine s’est abaissé à la condition de serviteur allant jusqu’à laver les pieds de ses disciples.
Mes amis, croyants ou non, puissions-nous découvrir que la vraie vie, la vie éternelle, c’est-à-dire le maintenant de toujours, se trouve dans la joie de servir, non pas pour se montrer mais pour ressembler au Christ, le frère à notre portée.
Que Dieu bénisse les serviteurs de son humanité !
Amen.
Abbé Xavier