Je te salue Marie
homélie du 21 décembre 2014 4ème dimanche de l’Avent
Lens, le 21 décembre 2014
4ème dimanche de l’Avent
Je te salue Marie,
Je te salue Marie, jeune femme de Nazareth, promise en mariage à Joseph. Je te salue, je m’incline devant toi, devant ta grâce. Je suis Josué, le fils du tisserand. Un humble villageois, ami de Joseph, ami de celui qui est de la maison de David. Je passe tous les jours dans ta ruelle et quand j’arrive à la hauteur de ta maison, je ne peux m’empêcher de tourner mon regard vers ta fenêtre. Je te cherche. Il n’y a pas de mauvaise intention. Tu es promise à Joseph et je te respecte. Je n’éprouve aucune jalousie envers lui. Bien au contraire, je me réjouis de sa joie. Il est mon ami et je suis heureux de l’entendre chanter ton nom alors qu’il rabote les planches de nos maisons. Il est heureux, tu sais. Et tu seras heureuse avec lui, c’est un homme bon, juste. Il est fidèle. Il honore toutes ses promesses. Il t’honorera, puisque tu es sa plus jolie promesse. Il ne te comblera peut-être pas de richesses, mais il te donnera des fils et des filles dont les sourires seront aussi lumineux que le soleil.
Je te salue Marie, et ma salutation n’a rien de malhonnête. Je voudrais seulement te remercier pour ta beauté. Je te remercie de ne pas rougir en cet instant de compliment. Pour tout dire, je savais que tu ne te méprendrais pas sur le sens de mes propos. Ton cœur est clair, limpide, comme l’eau des torrents. Tu ne t’attribues point les louanges et tu comprends le sens de mes paroles. Tu es humble Marie. Tu ne cesses de louer Dieu. Voilà ce qui fait ta beauté. Quand je passe dans la rue, quand je cherche ton visage, je ne cherche pas à le capturer. Si je fais le détour, ce n’est que pour recevoir une part de ta lumière, de ta paix. On dirait qu’à l’intérieur de ta maison brûle un feu, et sa lumière irradie tous ceux qui s’en approchent. Il sort de ta maison des rayonnements de paix. J’aime passer devant chez toi, et quelques instants, me reposer. Lorsqu’ensuite je pars livrer mes modestes tapis, je sais mieux vanter les motifs que ma femme y a brodés. Tu mets en lumière le travail de mon aimée. Je lui raconte cela et elle sourit. Elle rougit, elle, parce qu’elle n’a pas ton humilité. Et j’aime quand son visage trahit sa fierté. Je le lui dis et je me mets à l’embrasser. Elle est belle, et je crois que tu me révèles sa beauté.
Je te salue Marie, modèle de paix. Toutes les femmes du village reconnaissent ta douceur. Jamais l’on entend le moindre mot contre toi, jamais le moindre reproche. Tu ne suscites que le respect et l’admiration. Tu es comme une reine, sans défaut, sans tache. Les hommes, quant à eux, restent muets. Tu sais ô combien leurs plaisanteries sur les femmes peuvent parfois être vilaines. Jamais, Marie, je n’ai entendu la moindre allusion te concernant. Les hommes restent sans voix devant ta grâce et ta jolie légèreté. Aucun ne te désire, aucun n’est pris par le vice lorsqu’il te regarde. Tu inspires la vérité. Lorsque l’on te croise, ton regard et ton attitude nous font entrer en nous-même, en notre âme, en notre éternité. Soudain, nous sommes en présence d’un au-delà de nous-mêmes. Comme si Dieu nous parlait. Il n’y a plus aucune place pour le moindre péché. Moi-même, en cet instant, je crois être au royaume des anges. Ta pureté nous rend chastes et fidèles. Lorsque l’on te côtoie, nos humeurs s’adoucissent. Comment fais-tu, Marie, fille de Joachim, pour nous mener vers le ciel ? Quel est ton secret ?
Je te salue Marie, humble fille de Nazareth. Nous sommes étonnés, émerveillés, par ta confiance et ton obéissance. Tu es belle de serviabilité. Lorsque tu portes le balai, on croirait voir danser la poussière. Le sol s’éclaire avant même que tu ne l’aies balayé. Serais-tu une fée ? Une déesse ? Non bien sûr, car tu ne te sers jamais de tes dons, de tes pouvoirs, pour être glorifiée. La poussière que tu chasses est celle de nos idoles, et de nos avidités. Je suis fils de tisserand, Marie, et mon métier consiste à rassembler les fibres des tissus pour fabriquer des tapis. Il me faut être attentif : je dois les réunir sans les nouer, mais de façon jolie. C’est un métier difficile et je suis souvent fatigué. Toi, Marie, par ta simplicité, tu tisses les liens de notre communauté. Lorsque les gens du village conversent avec toi, ou simplement lorsqu’ils te regardent, tout se simplifie, toutes les situations difficiles se dénouent, tous les conflits disparaissent. Tu tisses les liens de la paix, sans rien faire si ce n’est sourire et nous parler de Dieu. Marie, comment le connais-tu ? D’où te vient cette sagesse, cette science du divin ? Nos rabbis nous enseignent la Loi et les prophètes. Ils ont scruté les rouleaux de l’Ecriture. Nous savons d’où provient leur compréhension de la volonté de Dieu… Mais toi, Marie, comment se fait-il que ta conscience soit infiniment plus éclairée par l’Esprit ? Qui t’a donné d’habiter le ciel aussi intensément ?
Je te salue, Marie, et nous te saluons. Tu es jeune et vierge, et pourtant nous te considérons comme notre mère, car tu nous nourris du lait de la vérité et de la paix. Les gestes que tu poses ne sont que charité, grâce et beauté. Tu nous éduques. Tu nous fais grandir en humanité. Marie, nous saluons ta sainteté.
Je te salue, Marie, et je dois déjà m’en aller. J’ai ce tapis à livrer. J’aime beaucoup ses motifs en fils dorés. Je vais passer près de chez Joseph. Je lui dirai que je t’ai vue, même si ce ne sera pas nécessaire : en voyant ma joie, il comprendra que je t’ai rencontrée. Merci Marie, je sais qu’aujourd’hui la paix ne pourra pas me quitter. Je te laisse, je ne voudrais pas abuser de ta disponibilité. D’autres ont sans doute le désir de venir te saluer. Il se pourrait même qu’un ange du ciel vienne te visiter…
Abbé Xavier