Allez dans le monde entier

Homélie de l'abbé Xavier - 1ères eucharisties des enfants de l'école Sainte Thérèse à Saint Léger Lens

Allez dans le monde entier !

 

Chers enfants, vous tous, et je vous regarde les uns après les autres, c’est une immense joie de 1ers eucharisties 1ers eucharisties  célébrer votre communion. Depuis votre baptême, voilà plusieurs années que vous préparez cet événement. Merci à vos parents qui vous accompagnent, ainsi qu’à vos catéchistes ou professeurs qui ont à cœur de faire grandir votre foi. Oui les enfants merci pour votre beau témoignage, la qualité de votre écoute et de votre prière tout au long des rencontres de caté.

 

 

 

Il paraît que, lorsque que l’on veut s’adresser à tous, il faut parler comme à des enfants. Comme cela tout le monde comprend. Moi je crois l’inverse. Je pense que, vous les enfants, vous êtes parfaitement capables de comprendre ce que l’on dit lorsqu’on utilise un langage d’adulte. J’espère ne pas me tromper. Votre attention maintenant me donnera raison ou tort. Je compte sur vous pour montrer à tous que vraiment on en a assez des discours ou des attitudes infantilisantes, de certaines émissions de télé un peu ridicules où l’on prend les gens pour des « ploucs ». Bref, je vais vous parler comme à des grands, parce je crois en votre intelligence et en celle de toutes les personnes rassemblées ici ce soir.

 

Figurez-vous qu’hier soir, j’avais une réunion avec quatre couples. Des parents qui ont environ quarante ans. Ils sont tous croyants et pratiquants. A un moment, j’ai été un peu gêné par leurs paroles. Les uns après les autres, ils disaient leurs peurs par rapport à la société. L’une parlait du terrorisme, de la violence dans le monde, et aussi ici dans nos villes ; une autre des questions autour de l’éducation ; une autre de la montée des extrémismes dont tout le monde, soit disant, s’inquiète. Un autre exprimait sa révolte et sa colère devant les écarts entre les riches et les pauvres, toutes les questions concernant l’immigration, les réfugiés. Un autre parlait de l’écologie, du réchauffement climatique, du gaspillage. Un autre encore continuait en disant qu’il n’y a plus de repère, qu’Internet prend trop de place. Et le dernier parlait de la troisième révolution industrielle qui se met en place. Que bientôt tout sera robotisé, et qu’il n’y aura plus d’échanges entre les personnes, et encore moins de travail… Etc. Waouh… A les entendre, je peux vous dire qu’il y avait de quoi déprimer ! C’était à croire que le monde était fichu… Et hier, chez le coiffeur, tout comme ce matin en faisant mes courses, j’ai entendu des gens dire que vraiment tout va mal. Bref, tout le monde râle. Tout le monde a peur… Vraiment, le discours environnant est plutôt morose. Quel écart, mes amis, avec la joie de l’Evangile dont ne cesse de parler le Pape François ! Nous, nous sommes tristes alors que lui nous dit de rayonner.

 

Comment dire ? Evidemment, il y a beaucoup de souffrances et d’injustices dans le monde. Il ne faut malheureusement pas aller loin pour voir ou entendre le mal. D’ailleurs nous en sommes parfois les auteurs. En tous cas, c’est vrai pour moi. Le mal existe et il faudrait être terriblement aveugle ou égoïste pour ne pas le constater. Il est tout à fait légitime d’être inquiet pour bien des raisons. Surtout quand on est parent et que l’on souhaite le meilleur pour ses enfants. Les chrétiens, au même titre que tous les autres citoyens du monde, doivent dénoncer ce qui ne leur semble pas bon et qui peut compromettre un avenir meilleur.

 

Pour autant, mes amis, doivent-ils désespérer ? Non, non, et non ! Savez-vous quelle est la force imagesL8CZD5BC imagesL8CZD5BC  des chrétiens ? C’est l’Espérance ! Ce n’est pas l’espoir. L’espérance. Un jour Jésus a dit à un chef religieux qui s’appelait Nicodème : « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas mais obtienne la vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. » (Jn 3, 16-17). Dieu aime le monde. Il ne dénigre pas le monde. Il l’aime. Dieu ne condamne pas le monde. Il vient l’habiter en devenant homme, en partageant notre condition. En Jésus, il vient habiter la condition humaine avec ses multiples questions, ses joies, ses peines, ses fractures, ses erreurs, ses réussites, ses générosités, ses méchancetés, ses injustices mais aussi ses merveilles… Toutes les réalités. Il affronte la vérité de l’existence sans chercher à fuir ou se cacher, sans volonté d’anéantir, sans peur, et sans illusion. Pour vivre au cœur du monde, Dieu choisit la bienveillance et l’amour. Voilà notre Dieu.

 

Dieu aime le monde. Aimer le monde, cela veut dire encourager tout ce qui est beau : la fraternité, la créativité, les arts, les progrès techniques, la recherche… Il y a bien plus de merveilles que d’horreurs. Il faudrait d’ailleurs inventer le journal des bonnes nouvelles ! Mais c’est vrai qu’il y a aussi le mauvais. Aimer le monde, c’est savoir dénoncer l’erreur… et agir. Et agir. Ne pas tout tolérer. Ne pas tout mettre au même niveau, souvent le plus bas. La finale de la coupe de France, ce soir, est-elle vraiment plus importante que le tremblement de terre au Népal dont plus personne ne parle ? Ou celui au Japon ce matin. Aimer le monde, c’est savoir redire où sont les vraies priorités.

 

Continuons d’agir pour le monde, continuons tous par amour du monde, comme le Christ. Ne nous décourageons pas. Jamais ! Christ est vivant, ressuscité. Voilà notre Espérance. La mort est vaincue. Le mal est vaincu. Au cours de sa vie publique, Jésus n’a pas utilisé ses pouvoirs divins pour transformer les situations. Il a choisi la pauvreté, l’humilité, la simplicité. Et il nous dit (on vient de le réentendre dans l’Evangile) : « Allez ! De toutes les nations faites des disciples. » (Mt 28, 19) N’attendons pas d’être président ou pape pour faire le bien. C’est maintenant, dans la condition qui est la nôtre, que nous devons agir. Et vous les enfants particulièrement. Comment ? En faisant ce qui est à notre portée. Faire ce qui nous est possible, dans l’honnêteté. Le monde sera moins corrompu si, moi, je refuse la magouille ! Je peux toujours dénoncer le mal, mais si je triche à l’école, si je triche avec le fisc, si je fais appel au travail au noir, si je radote sur mes voisins, le monde n’avancera pas. Le bien se vit ici et maintenant, pas par les autres et ailleurs. Le chrétien, le disciple du Christ choisit de montrer Dieu humblement par l’unité et la cohérence de sa vie, calquée sur celle du Christ. Par les baptisés, le Christ dit sa présence au monde d’aujourd’hui. Pas demain. C’est maintenant que le monde est sauvé. Parce que c’est maintenant que nous décidons d’aimer en vérité. En totalité ! Pas à moitié.

 

Le monde ne change que si moi je me convertis et si j’agis selon les commandements révélés pleinement dans l’attitude lumineuse du Christ. Il n’y a pas de solution miracle. Pas de coup de baguette magique, à la manière d’Harry Potter, qu’on aime bien par ailleurs. Le seul miracle, c‘est la conversion des pécheurs. La mienne. Chaque individu est appelé à se questionner. Regarder le Christ et communier à ses actes : partager, pardonner, faire confiance. Relever. C’est cela communier, c’est cela vivre d’une vie eucharistique ! Une première fois et toutes les fois. Autrement, c’est du blabla, de la foutaise, du cinéma. Mieux vaut ne pas croire en Dieu que de se moquer de Lui. Et donc les enfants, si ce soir vous communiez pour une première fois - et on s’en réjouit, c’est génial ! -, tout au long de votre vie, désormais, vous allez vivre en cohérence avec ce repas partagé. Ici, maintenant, c’est le temps de la prière et de la médiation. Mais sitôt sortis, ce soir et demain, ce sera le temps de l’action. Avec nous tous, il vous faudra témoigner de la Bonne Nouvelle de Jésus Christ par des paroles et surtout par des actes de vérité. Pour cela il faut un certain courage. Rien ne se fait sans la force de Dieu. Cette force se puise dans la prière. Priez beaucoup. Seul et/ou avec d’autres mais priez souvent !

 

Nous n’avons pas le droit de tricher. Nous n’avons pas le droit d’être tièdes. Nous n’avons pas le droit de dire que le monde est malade et ne rien faire pour le soigner. Nous n’avons pas le droit de gaspiller notre intelligence en ne travaillant pas à l’école, ou en nous laissant abrutir par des discours médiocres ou des images fallacieuses. Demain le monde aura besoin de chrétiens engagés dans les institutions nationales, européennes, mondiales, dans les entreprises, dans les associations caritatives, dans les partis politiques. Demain il faudra des mères et des pères de famille qui sauront encourager leurs enfants à donner le meilleur d’eux-mêmes, des hommes et des femmes fidèles dans leurs paroles, dans leurs engagements. Nous n’avons pas le droit de zapper, de passer d’une activité à une autre, comme ça, sans chercher quelles conséquences nos décisions peuvent avoir sur les autres, sur les copains de classe, sur les professeurs, sur le personnel ou sur les autres parents. Il est temps de redevenir responsable ! Le chrétien est courageux. Il ose. Il affronte. Il risque. Il s’engage. Il a droit à l’erreur. L’important est qu’il essaie. Et qu’il soit fidèle !

 

Aujourd’hui, les copains de classe ont besoin d’amis qui savent écouter, réconforter, consoler. Jouer ensemble, intégrer celui ou celle qui est toujours rejeté simplement parce qu’il ou elle bégaie, ou parce qu’il ou elle ne partage pas la même religion. Aujourd’hui, mes amis, le monde a besoin d’hommes et de femmes qui ne fuient pas le monde, mais qui le regardent, l’aiment et agissent pour lui. Mes amis, on ne met pas son enfant, et vous le savez bien d’ailleurs, dans l’enseignement catholique pour le protéger d’une société qui serait dangereuse. On choisit une éducation pour qu’un jour les enfants fassent comme leurs parents : à la suite du Christ, servir le plus grand nombre d’hommes et de femmes, et en priorité les plus fragiles. On ne bâtit pas sa maison à l’écart avec des grillages très hauts, comme on le fait encore aujourd’hui en Afrique du Sud où existait imagesRRUDYYO2 imagesRRUDYYO2  l’Apartheid. « Allez dans le monde » nous demande Jésus ! Nous rappelle le pape. La foi nous expose. Notre baptême ne nous protège en rien de la maladie, ou de toutes sortes de fléaux. Il nous oblige à vivre comme le Christ qui meurt exposé sur la croix. Il est tout donné par amour de la vérité, par amour du monde que Dieu a créé pour et dans la paix. Il nous faut donc sortir de nos torpeurs, de nos égoïsmes, et de toutes nos pseudo-sécurités ! Si l’homme se referme sur lui-même, il se rétracte, diminue et il meurt, empêtré dans son marasme ! S’il s’ouvre aux autres, il vit ! Et il découvre la vraie joie. La joie de l’Evangile.

 

Je termine en vous redisant, et à vous en particulier les enfants, toute la confiance que l’Eglise, que nous sommes ensemble, fait à sa jeunesse. Vous êtes super et vous êtes beaux. Merci les enfants pour la joie, les chants et la beauté de cette célébration, les fleurs. Merci pour votre punch ! Continuez, osez la vie ! Et nous tous, mes amis, allons… Allons annoncer que le Règne de Dieu se vit maintenant. Qu’il est visible parce que nous avons choisi d’aimer envers et contre tout. Espérons, envisageons le monde ! Communions à Jésus qui nous promet d’être avec nous jusqu’à la fin des temps et qui nous répète inlassablement : « Allez, de toutes les nations, faites des disciples ! » Amen.

 

Abbé Xavier