Et le soleil s’est mis à briller sur notre fraternité !
À l’invitation du groupe du « dialogue inter religieux »
Et le soleil s’est mis à briller sur notre fraternité !
À l’invitation du groupe du « dialogue inter religieux » du doyenné de la Gohelle, hommes et femmes de bonne volonté, jeunes et moins jeunes, croyants ou non, citoyens de notre beau pays, frères et sœurs en humanité… nous étions cette année encore plus nombreux, à nous réunir à Notre-Dame de Lorette ce dimanche 10 novembre 2024 en début d’après-midi.
Devant l’Anneau de la mémoire, nous avons prié avec respect et émotion pour ces 580 000 hommes, pères, fils, maris, fiancés qui ont été sacrifiés par la volonté de quelques hommes qui se croyaient « grands ».
Alors qu’en cette année 2024, le canon résonne encore en différents points de la planète, cet anneau, qui semble être posé en équilibre, nous rappelle que la paix est un acquis fragile. Les hommes et les femmes d’aujourd’hui veulent vivre en paix et pourtant la folie de certains expansionnistes (ou jusqu’au-boutismes) mènent le monde dans l’impasse.
Faut-il encore, comme ici à Notre-Dame de Lorette, que d’autres noms soient gravés dans le marbre, réunis sans distinction de nationalité, de genre, de religion ou de grade pour que la paix et la vie adviennent ?
Un autre chemin est pourtant possible, celui de la fraternité et de la fraternisation. Le 10 décembre 1915, des soldats français et allemands, donc ennemis, l’ont vécu. Un soldat français, Louis BARTHAS (1) originaire de l’Aude l’a raconté dans un livre.
« …. Boyaux et tranchées avaient complètement disparu sous l’eau, presque tous les abris s’effondrèrent.[…] Le 10 décembre, en maints endroits de la première ligne, les soldats durent sortir des tranchées pour ne pas se noyer : les Allemandsfurent contraints d’en faire de même et l’on eut alors ce singulier spectacle : deux armées ennemies face à face sans tirer aucun coup de fusil. […° Français et Allemands se regardèrent, virent qu’ils étaient des hommes tous pareils. Ils se sourirent, des propos s’échangèrent, des mains se tendirent et s’étreignirent, on se partagea le tabac, un quart de jus ou de pinard. Ah, si on avait parlé la même langue !
Un jour, un grand diable d’Allemand monta sur un monticule et fit un discours dont les Allemands seuls saisirent les paroles mais dont tout le monde comprit le sens, car il brisa sur un tronc d’arbre son fusil en deux tronçons dans un geste de colère. Des applaudissements éclatèrent de par et d’autre et l’Internationale retentit.
Cependant, nos grands chefs étaient en fureur… »
Cela montre bien que la fraternité et la paix sont au cœur de l’homme et qu’il en a un besoin vital !
À la suite de son récit, Louis BARTHAS rajoutait cette phrase : « Qui sait ? peut être un jour, sur ce coin de l’Artois, on élèvera un monument pour commémorer cet élan de fraternité entre des hommes qui avaient l’horreur de la guerre et qu’on obligeait à s’entre-tuer malgré leur volonté. »
Son vœu a été exaucé. Ce monument a été édifié à Neuville-Saint-Vaast, rue de Mareuil, sur la route qui relie Arras à Béthune. Le Monument des Fraternisations, symbole fort d’humanité, œuvre universelle et intemporellea été inauguré le 17 décembre 2015. C’est auprès de ce monument que s’est achevée notre rencontre. Commencée sous un ciel brumeux, elle s’est terminée sous un soleil magnifique, d’une intensité telle que nous nous sommes dit :« le soleil brille sur notre fraternité » !
Monique Brunet
1 : Les carnets de guerre de Louis BARTHAS, tonnelier, 1914-1918. Editions « la Découverte/poche. »