Le jeûne que Dieu préfère

 

Jean-baptiste Jean-baptiste   Nulle intervention ne vaut le contact direct avec la Parole de Dieu. Elle est forte, rugueuse et décapante, comme elle sait être douce, encourageante et réconfortante. Le temps du carême, nous appelle à la vérité, à la lucidité, à la conversion. Il nous invite à nous laisser réconcilier avec Dieu.
 
Nous pourrions penser que quelques efforts nous obtiennent, par eux-mêmes, le pardon de nos fautes et nous rétablissent dans une relation juste et apaisée avec Dieu, avec nous-mêmes, avec nos semblables.
 
Les plus anciens d’entre nous ont gardé le souvenir de ces multiples gestes sollicités de la part des enfants pendant le carême. Ils étaient qualifiés de « bonnes actions » et de « sacrifices. » Toute démarche, même la plus modeste, jaillie du cœur, peut exprimer une volonté de changement, d’appel et d’accueil du pardon. Pour le prophète Isaïe, l’attente de Dieu dépasse largement nos maigres efforts.
 
Lisons plutôt : «  Le jeûne que je préfère, n’est-ce pas ceci : dénouer les liens provenant de la méchanceté, détacher les courroies du joug, renvoyer libres ceux qui ployaient, bref que vous mettiez en pièce tous les jougs : N’est-ce pas partager ton pain avec l’affamé ? Et encore : les pauvres sans abri, tu les hébergeras, si tu vois quelqu’un nu, tu le couvriras : devant celui qui est ta propre chair, tu ne te déroberas pas… Si tu élimines de chez toi le joug, le doigt accusateur, la parole malfaisante, si tu cèdes à l’affamé ta propre bouchée et si tu rassasies le gosier de l’humilié, ta lumière se lèvera dans les ténèbres, ton obscurité sera comme un midi.[1] »
 
Nous sommes bien loin de rites à observer, d’attitudes symboliques à adopter. Le véritable jeûne pour Dieu se situe dans un changement de vie pour chacun, chacune d’entre nous. Il porte du fruit dans la manière dont nous agissons à l’égard des plus démunis et avec eux. Nous ne le redirons jamais assez !
 
Dieu ne met pas de limites et de frontières à ce mode de conversion et de pénitence. Il a valeur universelle. La réponse que nous apportons à la requête divine met en jeu notre propre foi et l’authentifie, comme les actions de Jésus Lui-même accréditent sa Parole.
 
Nous sommes enfants de Dieu, disciples de Jésus-Christ par l’écoute de l’Évangile, la célébration et la réception des sacrements, le témoignage. Nous le sommes indissociablement en changeant et transformant les relations inhumaines et injustes dans tous les domaines de la vie personnelle, collective et sociale.
 
À côté de nous, comme loin de nous, les croyants ne supporteront jamais les fléaux décrits par Isaïe. Ils continueront à les combattre dans les villages, les quartiers, les villes, les contrées lointaines, les pays d’au-delà des mers. Ils le feront, au risque de l’incompréhension, sur notre littoral, dans nos campagnes où des personnes émigrées stationnent ou cherchent refuge, en quête d’un autre destin. 
 
Plus percutant qu’une longue lettre, le passage du prophète Isaïe cité plus haut peut faire comprendre à un ministre de la République pourquoi des Chrétiens, avec d’autres, bien sûr, n’abandonneront jamais des migrants qui font halte chez nous.
 
À l’invitation du Comité Catholique Contre la Faim et pour le Développement, nous entendrons montrer le cri de frères soucieux de mettre en valeur les capacités de leur pays autrement que par l’assistanat. Nous apprendrons à connaître et à respecter d’autres frères.
 
Le carême n’exige pas que nous fassions la charité. Il nous demande de donner corps à la charité, de nourrir le quotidien de tout être humain de l’Amour du Fils de Dieu en qui nous sommes pardonnés et qui nous est, à nouveau offert !
 
 
 
+ Jean-Paul JAEGER
 
 
 
 


[1] Isaïe 58, 6-7, 9b-10.