Homélie du rassemblement

Faites des disciples

Letures: 2 Timothée 2, 8-13; Luc 17, 11-17.

 

Rassemblement diocésain Evangile des dix lépreux.  
Rassemblement diocésain
Rassemblement diocésain
La réflexion a propos du dixième lépreux qui revient vers Jésus peut surprendre: "Or, c’était un Samaritain !" Dans toute autre bouche que celle de Jésus, ces mots auraient le goût du mépris. Le Seigneur qualifie d’ailleurs le même homme d’étranger.


Des querelles théologiques et cultuelles liées aux événements de l’histoire avaient divisé les descendants des Hébreux. Samaritains et Judéens se méfiaient les uns des autres. Ils s’accusaient mutuellement de déviance. Ils évitaient de se fréquenter. Déjà, les débats religieux dégénéraient en rejet et en suspicion.


Or, voici qu’à l’encontre du dédain qu’affichent les Juifs envers les Samaritains, le Christ fait l’éloge de la foi de cet inconnu. Seul, il vient rendre gloire à Dieu pour sa guérison. Jésus souligne du même coup la liberté et la gratuité du choix de Dieu qui accorde ses bienfaits à qui Il veut et comme Il l’entend. Sa bienveillance et son Amour se moquent des barrières et des frontières que les hommes se croient autorisés à ériger.
Jésus fait souvent grincer des dents dans les rangs de son propre peuple. Puisque Dieu l’a choisi, chéri et comblé, ce peuple est devenu, selon lui, le bien propre et exclusif du Très-Haut. Le Christ agace les puristes de la loi qui estiment avoir des droits sur Dieu comme ils reconnaissent d’ailleurs que Lui en a sur eux.


Se situant dans un rapport marchand, les fidèles de la Loi ne peuvent plus s’extasier, se laisser surprendre par la tendresse et la miséricorde du Père. Ils savent tellement ce que Dieu doit faire pour eux, ce qu’eux-mêmes doivent Lui offrir en retour ! Ils sont devenus imperméables à l’Amour qui surprend et déconcerte toujours. Cet Amour n’est surtout dû et réservé à personne.
Notre société ne manque pas d’étrangers. Ils arrivent de loin ou ils sont déjà parmi nous. Dans un contexte où les rangs de l’Eglise sont plus clairsemés, où la notion d’appartenance est plus floue, nous serions tentés de distribuer plus largement encore l’étiquette d’étranger.


Ces hommes, ces femmes, ces jeunes qui n’ont pas entendu la Bonne Nouvelle, qui ne sont pas baptisés seraient-ils des étrangers ? Ces voisins, ces amis de classe, de lycée, d’université, ces collègues de travail ou d’engagement qui ne professent pas la même foi que nous seraient-ils des étrangers ? Ces membres de l’Eglise qui n’ont plus que de rares et fugaces contacts avec nos assemblées ou les ont désertées depuis longtemps, seraient-ils des étrangers ?


Au risque de bousculer nos appréciations, le Seigneur peut avoir de fort bonnes raisons de dire à des frères et sœurs humains « Ta foi t’a sauvé. » Où serons-nous à ce moment-là ? Nous pouvons prendre place dans le groupe des neuf guéris insouciants et légalistes. Nous pouvons reprocher à Dieu de jouer contre son camp et de faire peu de cas de ses familiers et de ses intimes. Nous pouvons rejoindre Saint Paul qui « supporte tout pour ceux que Dieu a choisis, afin qu’ils obtiennent eux aussi le salut par Jésus-Christ. »


Acceptant de nous lancer dans l’aventure de l’annonce de l’Evangile et de la catéchèse à tous les âges, dans tous les lieux, en toutes circonstances, nous reconnaissons que l’Esprit de Dieu nous entraîne là où Il accomplit déjà des merveilles pour le bonheur de tous ses enfants. Nous apprendrons encore à les reconnaître et à les contempler joyeusement. Nous n’en serons jamais les bénéficiaires jaloux et les propriétaires avides, mais les humbles et dévoués serviteurs.


+ Jean-Paul Jaeger