La relecture, de quoi s'agit-il ?
Edito N°2
Nous avons célébré le mystère de Noël. La foi et la tradition de l’Église nous ont rappelé que le Fils de Dieu « se rend visible à nos yeux ; engendré avant le temps, il entre dans le cours du temps. 1»
La liturgie actualise cet événement. Elle proclame que par la venue du Christ en notre chair, l’homme acquiert une incomparable dignité. « Il devient tellement l’un de nous que nous devenons éternels. 2» Déjà est annoncé ce qui se vivra dans le mystère de la rédemption. L’homme est en Jésus-Christ, mort et ressuscité, une créature nouvelle.
L’apôtre Paul précise cependant que si nous sommes ressuscités avec le Christ, « notre vie est cachée avec Lui en Dieu. 3» Ainsi se révèle notre condition humaine en ce qu’elle a de plus quotidien : « Nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons ne paraît pas encore clairement. 4»
Il nous faut donc apprendre à découvrir toute la valeur de nouveauté et d’éternité enfouie dans toutes les réalités de la vie toujours blessée par le péché et pourtant déjà purifiée et renouvelée par le baptême. Notre qualité de membres du Corps du Christ fait l’objet d’une révélation permanente.
Il nous faut sans cesse scruter ce qui échappe à notre regard et à une perception sommaire des personnes et de leur histoire. Cette démarche de foi est souvent appelée relecture.
Du livre de l’Exode jusqu’aux Actes des Apôtres en passant par les prophètes et les Évangiles, le texte biblique nous fait entrer dans ce mystère, à la lumière de l’Esprit-Saint.
La relecture a une visée plus large et plus profonde qu’un simple bilan ou une rapide évaluation, par ailleurs souvent utiles et opportuns. Il s’agit de reconnaître la présence et l’œuvre de l’Esprit-Saint qui souffle où Il veut et comme Il veut. Aucun élément de l’existence personnelle, communautaire ou collective ne lui est étranger. Toute vie, toute la vie est examinée et parcourue avec lucidité et vérité, avec comme lumière et guide l’amour et la bienveillance du Christ venu s’offrir sur la croix « pour que les hommes aient la vie. 5»
Il faut alors reconnaître les signes de la présence du Christ et de sa mission de salut là où il plaît à Dieu de les manifester. Il importe aussi d’entendre les appels à la conversion et de découvrir de quelles manières ils ont été accueillis et suivis d’effets. Relire, c’est encore rendre grâce pour les fruits de la mission rapportés à la tendresse de Dieu, même si les missionnaires de l’Évangile peuvent en être les humbles instruments. Cette relecture exige que les cœurs soient accordés à Dieu. Elle contribue à la croissance dans la foi. Elle la présuppose cependant, même si le don que le Seigneur nous en fait ne reçoit encore qu’une réponse balbutiante et fragile.
La relecture est nourrie par l’accueil, la méditation et la proclamation de la Parole de Dieu. Elle est soutenue par la prière personnelle et liturgique. Elle s’enracine dans la vie sacramentelle, notamment dans l’Eucharistie. Elle s’accompagne de la participation active à la mission de l’Église. Elle est inséparable du service inconditionnel du frère par qui Dieu vient à notre rencontre et se fait reconnaître à nous.
La relecture a une dimension personnelle. Elle nous ouvre aussi à toute l’Église et à l’humanité. Elle nous dispose à épouser avec enthousiasme le projet de Dieu, à le laisser s’inscrire dans notre propre vie et dans celle de nos frères. Elle nous prépare toujours à répondre à l’appel qui est adressé à chacun pour le bien de tous.
Ces quelques considérations expliquent pourquoi avec le conseil presbytéral, j’invite à honorer ce chemin de foi, d’espérance et de charité que constitue une relecture patiemment et fidèlement vécue.
Ce numéro d’Église d’Arras propose des éléments de réflexions et de mise en œuvre de la relecture. Ils ont été élaborés par le conseil presbytéral. Je vous les confie. Ils sont valables pour tous. Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi, ils s’adressent de façon particulière à celles et à ceux qui sont engagés dans la mission et le service.
Dans l’Église, nous ne pouvons pas en rester à la générosité, à la solidarité, à des valeurs humanistes partagées, même si elles portent déjà l’empreinte divine. Nous sommes disciples de Jésus-Christ en qui Dieu fait toutes choses nouvelles.
La relecture n’est pas le seul moyen, mais elle est un moyen indispensable qui aide à vérifier que notre attention et nos engagements sont effectivement au service du Christ venu rassembler l’humanité dans l’unique famille des enfants du même Père. Non la relecture n’est pas une figure imposée à quelques-uns et par quelques-uns. Elle est pour tous une reconnaissance joyeuse et authentique de Dieu Père, Fils et Esprit qui redit sa fidélité à l’Alliance qu’Il a scellée avec l’humanité !
+ Jean-Paul Jaeger