BONNE ANNEE, BONNE CONVERSION !
Lettre de Mgr Jaeger Eglise d'Arras 2016-2
BONNE ANNEE, BONNE CONVERSION !
Il est de tradition de formuler tout au long du mois de janvier des vœux à l’intention des personnes et des groupes que nous rencontrons. Le respect de cette coutume ne garantit par l’efficacité des intentions et des paroles. Il nous rappelle simplement que tout être humain aspire au bonheur, à l’épanouissement, à la santé à la paix. Malgré le côté conventionnel de la démarche, il n’est pas inutile de nous redire périodiquement que nous souhaitons le meilleur pour nous-même et pour nos semblables, même s’il n’est pas aisé de donner un contenu à cette attente nichée au plus profond de chaque être humain.
Je résume volontiers en un mot les vœux que j’’adresse à celles et ceux qui voudront bien en prendre connaissance. Je demande pour tous et pour toutes, en ce début de l’année 2016 la grâce de la conversion.
Au cours de la soirée électorale du dimanche 13 décembre 2015, les responsables politiques de tous bords ont proclamé d’une seule voix que cette fois, ils avaient bien compris le message adressé par les Français par le biais des urnes. Plus rien ne serait, demain, comme hier. Soit !
Sur les écrans de télévision des délégués venus du monde entier se sont félicités de l’accord obtenu au Bourget au terme de la COP 21. La planète se porterait mieux dans quelques décennies. Soit !
L’accélération de la poussée migratoire qui s’est exercée en direction de l’Europe en cours des derniers mots a obligé les autruches à sortir la tête et le cou du sable. Les gouvernements ont cessé d’agir ou plutôt de ne pas agir comme si aucun mouvement n’était repérable à la surface de la terre. Soit !
10 rencontres organisées dans notre diocèse ont manifesté le réel intérêt que suscitaient auprès de nombreux fidèles et de pasteurs les conclusions du synode provincial dont les actes ont été promulgués le dimanche 27 septembre 2015, à Lille. Soit !
Sans projet affirmé, il est impossible d’innover, d’avancer et de progresser. Il est parfois nécessaire de vouloir beaucoup pour réaliser un peu. Nous savons, cependant, que dans une société hautement médiatisée, la magie et verbe et de l’image risque de se suffire à elle-même. L’effet d’annonce parvient trop souvent à fasciner plus que ne le fait le résultat !
Telle sont les raisons pour lesquelles, j’ose prononcer en ces premiers jours de l’année le mot de conversion. En bien des domaines, nous ne pouvons plus en rester à l’intention. Livrée à nos seuls bons sentiments, cette dernière sombre vite dans l’inertie. Devant les obstacles à franchir, nous entonnons les litanies indéfiniment rabâchées : « On a toujours fait comme ça ! » « Il faudra bien changer, mais les esprits ne sont pas mûrs ! » « Après tout, la réalité n’est pas aussi dramatique qu’on veut bien le dire ! » « Nous sommes les meilleurs, tout ira mieux quand les autres se rangeront sous notre bannière ! »
Face à toutes les réticences, la conversion des esprits, des cœurs, des habitudes, des jugements, des personnes, des groupes, des communautés s’impose. Pour des raisons bien compréhensibles, la légitime recherche de sécurité peut paralyser la recherche et la mise en œuvre des moyens propres à s’attaquer aux causes profondes de l’insécurité. Protéger et nous protéger des attaques, des carnages et les prévenir, nous en avons le devoir. Celui-ci ne nous dispense pas pour autant d’agir et d’entreprendre pour transformer les relations humaines et les purifier de tous les calculs et les intérêts qui les dénaturent et en faussent le sens.
Je ne suis certainement pas le seul à entendre dire qu’un nombre croissant de nos contemporains, notamment les plus jeunes, cherchent vainement les repères qui les aideront à se construire et à s’insérer dans la communauté humaine. Il ne suffit pas de répéter qu’il était tellement simple de ne pas s’écarter des repères qui ont jalonné le parcours de leurs aînés. Il est urgent d’emprunter avec eux un chemin et de retrouver le cœur brûlant de l’humanité.
Il n’y a pas dans notre monde d’un côté les pauvres égarés qui devraient se convertir et, de l’autre, les détenteurs de la clé des valeurs qui jugeraient de la conversion de leurs semblables.Tous ont à retrouver ensemble la source authentique de l’humanité, à en recevoir les richesses, à les partager et à les inscrire dans les choix quotidiens des individus, des groupes, des réalités familiales, économiques, sociales, politiques, morales et associatives.
Quand le pape François nous engage à faire l’expérience de la Miséricorde divine, il ne suggère pas autre chose. Lorsque nous laisserons humblement Le Père poser sur chacun de nous le regard qui relève et fait revivre, nous regarderons autrement nos semblables renouvelés par le même Amour. Il deviendra alors évident qu’il faut briser les murs de la haine, de la division, de la séparation et laisser la force de l’Esprit Saint édifier en nous et par nous la cité et le monde qui feront la joie de Dieu et cette de la famille humaine. Nous devons juste accepter de nous laisser convertir. Bonne année !
+ Jean-Paul JAEGER